Ils sont les petits frères des "Panama papers" qui, il y a 18 mois, avaient révélé les pratiques du cabinet panaméen Mossack Fonseca en matière de fraude fiscale. Ils, ce sont les "Paradise papers". Issus d'un "leak" (une fuite) transmis au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, ces documents ont été traités par 96 rédactions du monde entier (dont Le Monde, Radio France et Cash investigation pour la France) réunies sous la bannière de l'ICIJ, le consortium international des journalistes d'investigation.
Cette fois-ci, pas ou peu de fraudes fiscales avérées en tant que telles, mais de l'optimisation que d'aucuns pourraient juger "agressive". Une pratique à laquelle se serait notamment livrés les gestionnaires de fonds de la reine d'Angleterre, Lewis Hamilton ou des proches des dirigeants américains ou canadiens. Tour d'horizon de quelques personnalités, physiques ou morales, concernées.
- La reine d'Angleterre et les investissements peu transparents
Elisabeth II est jusqu'à présent la personnalité la plus célèbre impliquée dans ces "Paradise papers". Les documents indiquent que des fonds appartenant à la reine d'Angleterre ont été investis dans le Dover Street VI Cayman Fund LP, un fonds d'investissements basé aux îles Caïmans.
Autre récrimination faite à la reine : des investissements dans la société BrightHouse, accusée d'exploiter des personnes pauvres ou vulnérables. Là-encore, rien de pénalement répréhensible mais certaines voix regrettent un manque de transparence concernant la gestion des finances de la famille royale.
- Wilbur Ross et le gendre de Poutine
Wilbur Ross est le Secrétaire d'État au commerce de Donald Trump. Et, alors que les soupçons d'ingérence russe dans la dernière campagne présidentielle sont au cœur de l'actualité, les "Paradise papers" ajoutent un nouvel élément à ce dossier gênant pour le président américain : les liens économiques qui lient Wilbur Ross avec la Russie et, notamment, avec des proches de Vladimir Poutine.
L'une des neuf sociétés enregistrées dans les paradis fiscaux dont Ross est encore le propriétaire fait effectivement des affaires avec des oligarques russes visés par des sanctions internationales, ainsi qu'avec le gendre de Vladimir Poutine. Cette société, spécialisée dans le fret maritime fait également concurrence aux entreprises américaines, faisant craindre des conflits d'intérêts.
- Lewis Hamilton et le jet aux multiples ports d'attache
C'est un fait, Lewis Hamilton, récemment assuré d'obtenir un quatrième titre de Champion du monde de F1, va très vite volant en main. Il va aussi très vite dans les airs, grâce à un jet privé pour lequel il n'a pas payé de TVA.
Car officiellement, ce jet ne lui appartient pas : il est la propriété d'une société enregistrée aux Îles Vierges. Celle-ci loue le jet à une société de l'Île de Man, qui la loue de nouveau à une autre société avant que Lewis Hamilton ne l'utilise effectivement. Un habile tour de passe-passe : en louant ce jet à ces sociétés, le pilote économise la TVA puisque certaines lois permettent de s'en exonérer si l'on en n'est que locataire. Or, ces sociétés appartiennent à... Lewis Hamilton.
- L'argentier de Justin Trudeau et les Îles Caïmans
Stephen Bronfman, proche conseiller de Justin Trudeau et leveur de fonds pour l'une de ses campagnes, possédait lui-aussi une société offshore aux Caïmans. Une révélation gênante puisque le Premier ministre canadien a fait de la lutte contre les paradis fiscaux son cheval de bataille.
Selon les auteurs de l'enquête, les révélations concernant Stephen Bronfman illustrent bien l'activité des ressortissants canadiens dans les paradis fiscaux.
- Les proches de Trump et les sociétés offshore
Rex Tillerson, Gary Cohn... Les "Paradise papers" mettent également en lumière les sociétés offshore qu'ont détenues d'autres proches de Donald Trump. Tillerson, actuel secrétaire d'État de Donald Trump possédait une telle société lorsqu'il dirigeait Exxon Mobil.
Gary Cohn, conseiller économique du président américain et autrefois pressenti pour prendre la tête de la Fed, possédait quant à lui une vingtaine de sociétés, pour la bagatelle de 37 milliards de dollars.
The #ParadisePapers reveals the offshore activities of 13 of @realDonaldTrump allies. Explore the connections here: https://t.co/HWyN1wcS7Mpic.twitter.com/sIfkUnf59t
— ICIJ (@ICIJorg) 5 novembre 2017
- Twitter, Facebook et les investisseurs russes
En 2001 et 2012, la deuxième plus grosse banque de Russie et une filiale de Gazprom ont respectivement fait des investissements dans Twitter et Facebook. Des informations rendues publiques alors que les deux entreprises ont récemment été entendues dans l'enquête concernant l'ingérence russe dans la campagne présidentielle américaine.