Il n'y a pas qu'en France que la polémique enfle sur la lenteur de la vaccination. En Allemagne, pays dans le milieu du peloton européen avec plus de 264.000 injections du vaccin Pfizer/BioNTech, les critiques s'intensifient alors que le pays s'apprête à prolonger ses restrictions anti-Covid. Une grogne qui s'appuie sur la lenteur de la campagne et sur la stratégie jugée trop dépendante de l'Union européenne, avec en toile de fond des rivalités politiques. Car à neuf mois des élections, les candidats à la succession d'Angela Merkel ont intérêt à se démarquer.
Un nombre de doses disponibles qui pose question
Ce n'est pas tant un problème de logistique qui rend les Allemands impatients que le nombre de doses disponibles. Elles sont encore trop rares pour que le pays puisse véritablement accélérer sa campagne de vaccination. Un comble pour certains, alors que le laboratoire BioNTech est... allemand. Aussi, la décision de Berlin de déléguer les commandes de son propre vaccin à l’Union européenne passe mal pour ces derniers, et la Chancelière se retrouve sous le feu des critiques.
Le quotidien Bild, le plus lu d'Allemagne, mène une campagne contre le gouvernement, accusé d'avoir "trop compté sur l'Union européenne" pour s'approvisionner en vaccins, et de privilégier le seul produit Pfizer/BioNTech au détriment du vaccin Moderna. On voit apparaitre une forme de nationalisme vaccinal, un "nous d'abord" que l’entourage d'Angela Merkel tente de contrer en expliquant que la mise en concurrence des pays européens aurait conduit à des déséquilibres au sein de l’Union, et finalement plombé la facture économique commune.
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Une polémique qui enfle jusqu'au sein de la majorité
Et la polémique s'envenime jusqu'au sein du gouvernement allemand. Le vice-Chancelier et candidat social-démocrate Olaf Scholz a ainsi transmis à son collègue de la Santé, le conservateur Jens Spahn, une liste de questions sur la stratégie vaccinale. "Pourquoi la Commission européenne a-t-elle commandé à l'avance si peu de doses de vaccin ? Et pourquoi certaines parties des doses non réclamées par l'UE (...) n'ont-elles pas été commandées pour l'Allemagne ?", demande-t-il notamment. "Il est toujours juste de mon point de vue d'avoir pris et de prendre ce chemin européen", rétorque le ministre de la Santé, promettant un approvisionnement pour tous les Allemands d'ici à l'été.
Mais en attendant, les chiffres des contaminations restent élevés avec 1,787 million de cas recensés depuis le début de la pandémie, pour plus de 35.000 morts. Et si la courbe a fléchi avec la fermeture des magasins et des écoles mi-décembre, on s’attend à ce que ces mesures soient prolongées voire durcies, probablement jusqu'au 31 janvier. Les commerces - à l'exception des magasins d'alimentation -, restaurants, bars et lieux culturels devraient ainsi garder portes closes dans les semaines à venir. Les périmètres de déplacement autorisé depuis son domicile pourraient aussi être limités, une mesure radicale en Allemagne. "Il y a peu de place pour des assouplissements", résume le porte-parole du gouvernement, Steffen Seibert.
Citée en exemple avant l'été, l'Allemagne, où a émergé une mouvance anti-masque mêlant réfractaires aux vaccins, adeptes des théories complotistes et militants d'extrême droite, n'est pas parvenue depuis septembre à prendre des mesures efficaces. Angela Merkel, dont la popularité reste très élevée à moins d'un an de son départ de la Chancellerie, n'a pas été en mesure d'imposer des mesures plus strictes à des régions inquiètes de la perte d'activité économique. La Chancelière doit rencontrer les 16 Etats-régions cet après-midi.