L’affaire des enfants de migrants séparés de leur famille et retenus dans des cages dans des centres de détention, au-delà de l’émotion qu’elle suscite, met en lumière un problème récurrent des Etats-Unis, et une obsession de Donald Trump : l’immigration venue du Mexique. Pour dissuader autant que possible les candidats au passage de tenter l’aventure, l’administration du président américain a décidé début mai d’une tolérance zéro vis-à-vis des migrants illégaux. Tous sont donc poursuivis au pénal et incarcérés. Or, ne pouvant pas être emprisonnés, les enfants sont séparés de leurs parents et retenus dans des centres de détention.
La politique dissuasive semble porter ses fruits. En 2017, les arrestations d’immigrants le long de la frontière américano-mexicaine ont largement chuté par rapport à 2016. Mais le phénomène reste d’une ampleur certaine. La preuve en quelques chiffres.
3.200 kilomètres de frontières, 48 postes-frontières. Si l’on excepte Cuba, via l’enclave de Guantanamo, les Etats-Unis n’ont de frontières terrestres qu’avec deux pays : le Canada au Nord et le Mexique au Sud. Avec ce dernier pays, ce sont pas moins de 3.200 kilomètres de ligne de partage qui séparent les deux Etats. Depuis San Diego et Tijuana à l’Ouest, jusqu’à Brownsville et Matamoros à l’Est. Cette frontière traverse une grande multitude de paysages, de centres urbanisés à des déserts hostiles, sans oublier le Rio Grande, qui fait office de frontière naturelle sur près de 2.000 kilomètres.
Cette frontière terrestre est émaillée de 48 postes-frontières, dont les plus importants sont ceux d’El Paso, au Texas, et de San Ysidro, en Californie.
655 kilomètres de barrière. Dans le cadre d’une loi votée par les parlementaires américains à l’instigation du président George W. Bush en octobre 2006, une large et imposante barrière a été édifiée sur une bonne partie de la frontière. Actuellement, elle court sur 655 kilomètres, sur des portions discontinues. Donald Trump avait fait de l’édification d’un mur entre les Etats-Unis et le Mexique (en fait la consolidation des barrières existantes et la construction de nouvelle portions) l’une de ses promesses de campagne les plus emblématiques. Mais aujourd’hui, il se heurte à l’hostilité des élus démocrates. Il a promis de cesser de séparer les familles de migrants illégaux si l’opposition cédait sur ce point.
Les Mexicains les plus nombreux pour l’immigration légale… et illégale. En 2016, selon des chiffres de l’office statistique de l’immigration américain, 1.183.505 migrants légaux se sont installés aux Etats-Unis, un nombre divisé en deux parties presque égales entre les nouveaux arrivants et les migrants régularisés. Parmi eux figuraient 174.534 Mexicains, soit 17,4% du total.
En 2014, 60% des immigrés illégaux vivant aux Etats-Unis étaient originaires du Mexique, selon le département de la Sécurité intérieure des États-Unis.
Des interpellations à la frontière en chute libre. Les tentatives de franchissement de la frontière américano-mexicaine semblent avoir chuté, si l’on en croit les chiffres de l’administration américaine sur le nombre d’interpellations. En 2017, 341.084 migrants ont été arraisonnés alors qu’ils tentaient de franchir la ligne de partage, contre 611.689 en 2016. Soit une baisse de 44%.
En revanche, le nombre de migrants morts en tentant de franchir la frontière est en augmentation : 412 en 2017 contre 398 l’année précédente, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), affiliée aux Nations unies.
L'immigration illégale reste en 2018 élevée à la frontière avec le Mexique : de mars à mai, plus de 50.000 personnes ont été appréhendées chaque mois, selon les autorités américaines. Environ 15% de ces clandestins arrivent en famille et 8% sont des mineurs non accompagnés.
Les Etats-Unis en tête en termes de demandes d’asile. Les Etats-Unis sont redevenus l'an dernier le premier pays de demandes d'asile dans l'OCDE, a annoncé mercredi l'organisation. Elles ont augmenté de 26% aux Etats-Unis l'an dernier, à 330.000 au total, affirme l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)
Ces demandeurs sont à 40% des Salvadoriens, Vénézuéliens et Guatémaltèques, venant donc de pays d’Amérique centrale en proie à de graves difficultés économiques ou à de meurtrières guerres civiles. Et contraints, pour se rendre aux Etats-Unis, de le faire via la frontière mexicaine.