Un jeune militaire a été inculpé vendredi par la justice fédérale aux États-Unis, soupçonné d'être à l'origine de la fuite d'une série de documents confidentiels américains sur la guerre en Ukraine, qui met Washington dans l'embarras. Jack Teixeira, 21 ans, a été présenté vendredi devant une cour fédérale de Boston (nord-est), où il est apparu vêtu d'une combinaison beige de détenu. Cette recrue de la Garde nationale aérienne a été inculpée pour "conservation et transmission non autorisées d'informations relatives à la défense nationale", et "retrait et conservation non autorisés de documents ou de matériels classifiés", selon un document judiciaire.
Des faits passibles de dix ans et cinq ans de prison. Le ministre de la Justice, Merrick Garland, a promis de requérir de "très lourdes peines". Le jeune homme a été placé en détention provisoire dans l'attente d'une nouvelle audience prévue mercredi. Au lendemain de son arrestation, tous les regards étaient braqués sur ce jeune militaire, qui aurait profité de sa position pour diffuser sur un groupe privé du réseau social Discord des documents confidentiels et sensibles sur les opérations en Ukraine.
Depuis jeudi, les images aériennes de son arrestation à Dighton, une petite ville rurale du Massachusetts, ou sa photo en uniforme, l'allure un peu frêle, tenant un téléphone portable devant lui, tournent en boucle.
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"Risque très grave"
L'affaire soulève aussi des questions sur de possibles failles de sécurité et la possibilité pour une jeune recrue d'avoir accès à de tels documents. Les documents confidentiels, dont certains ont ensuite circulé sur Twitter et Telegram, révèlent notamment les inquiétudes des services de renseignement américains quant à la viabilité d'une contre-offensive ukrainienne contre les forces russes. Ils suggèrent aussi que Washington collecte des renseignements sur ses plus proches alliés, notamment Israël et la Corée du Sud.
Une affaire des plus embarrassantes pour le gouvernement du président Joe Biden, qui s'était dit jeudi "préoccupé que ce soit arrivé". La Garde nationale a indiqué que Jack Teixeira s'était engagé en septembre 2019, travaillait en tant que spécialiste en informatique et communications et avait atteint le rang d'engagé première classe, le troisième plus bas de la hiérarchie. Jack Teixeira disposait d'une habilitation de sécurité "top secret" depuis 2021, d'après une déclaration sous serment d'un agent du FBI à l'appui des poursuites judiciaires.
Un groupe composé de Russes et d'Ukrainiens
"Les personnes qui signent des engagements pour recevoir des documents classifiés reconnaissent l'importance pour la sécurité nationale de ne pas divulguer ces documents. Et nous avons l'intention d'envoyer un message (pour montrer) à quel point c'est important pour notre sécurité nationale", a déclaré Merrick Garland. Le groupe, dans lequel Jack Teixeira jouait le rôle de meneur sous le pseudonyme "OG", était composé d'environ 24 personnes, dont certaines originaires de Russie et d'Ukraine. Il s'est formé dès 2020 autour d'une passion mutuelle pour les armes à feu, le matériel militaire et la religion, d'après le New York Times et le Washington Post.
"OG" avait demandé aux autres membres du groupe Discord de ne pas diffuser les documents, assurant qu'il n'avait pas l'intention d'être un lanceur d'alerte, selon le Washington Post. Il se montrait critique envers l'État - dont il dénonçait "l'abus de pouvoir" -, les forces de l'ordre et la communauté du renseignement. Selon le Washington Post, "OG" aurait déclaré aux autres membres du groupe qu'il avait accès dans le cadre de son travail à "une installation sécurisée".
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Un audit ordonné par le ministre de la Défense
La Maison Blanche a affirmé jeudi que les États-Unis examinaient les "implications" de cette fuite "pour la sécurité nationale". Le ministre de la Défense Lloyd Austin avait annoncé jeudi avoir ordonné un "audit des accès à notre renseignement". Des dizaines de photos de ces documents ont été relayées sur Discord, mais aussi Twitter et Telegram, certains ayant sans doute circulé depuis des semaines, sinon des mois, avant d'attirer l'attention de la presse.
Les autorités américaines n'ont toutefois pas publiquement confirmé l'authenticité de ces documents publiés en ligne, et elle n'a pas encore été vérifiée de manière indépendante. Beaucoup de ces documents ne sont plus disponibles sur les sites où ils sont initialement apparus.