Combattre quelque part sur le front du Donbass, dans le froid. C'est la seule précision que Mykyta, jeune lieutenant-supérieur de l'armée ukrainienne peut donner sur sa zone de combat. Là-bas, il dirige une formation de six tanks, réduite au nombre de quatre suite aux bombardements russes. Le lieutenant détient à son actif une avancée vers Lyssytchanks en plein cœur de la zone la plus disputée entre russes et ukrainiens. Lui et ses hommes sont depuis neuf mois sans interruption au cœur des combats.
"Nous croyons en notre force"
L’officier a accepté de raconter cette vie à Europe 1, entre courage affiché du combattant et humanité d’un jeune homme plongé dans l’horreur. Dans la nuit noire du Donbass, sur le front de l’est, Mykyta et ses hommes veillent ou dorment. Seul le bruit lancinant du générateur se fait entendre. Puis plus personne ne dort : des rafales de Grad, les roquettes lancées par les fameux orgues de Staline, s’abattent sur les tranchées et le village voisin. Cadeau surprise des russes, certaines contiennent des munitions au phosphore. Pour les soldats, il faut surtout éviter d’être touché par le gaz qui provoque des brûlures terribles.
Une vie difficile pour le jeune, qui raconte son expérience à Europe 1. "Je suis le lieutenant-chef Ivanov. Il est 1h54 du matin, et c’est le seul moment que j’ai pour me poser et vous parler", commence-t-il dans son récit.
Crédits photos : Mykyta
"Je suis dans une zone légèrement en retrait, la situation devient de plus en plus compliquée avec l’arrivée de l’hiver. L’ennemi a mobilisé et est déjà en train d’utiliser des troupes fraiches. Il y a trop d’adversaires sur le champs de bataille. On tient nos positions, mais c’est très dur. Le froid ne fait qu’empirer les choses. Malgré toutes ces difficultés, mes hommes, les guerriers de l’armée ukrainienne, gardent un bon niveau", tempère Mykyta.
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"Chacun d’entre nous le sait : si nous ne restons pas ici, alors demain, l’ennemi sera aux portes de nos maisons. Nous croyons en notre force, et nous voulons aussi croire à la force et au soutien de nos frères et sœurs à l’Ouest de l’Europe. Comme le dit le dicton : c’est dans le besoin que l’on reconnait ses vrais amis. Je n’arrive toujours pas à croire que je suis en train de vivre tout cela", explique-t-il dans son long enregistrement audio.
Neuf mois de guerre à l'âge de 22 ans
"Je n’ai que 22 ans, j’ai vécu neuf mois de guerre, et avant cela, je n’avais vu la guerre que dans les films. Mais maintenant je comprends que les films ne montrent pas toute cette réalité. À 22 ans, vous voulez profiter de la vie, voyager rencontrer des personnes intéressantes, mais vous ne voulez pas avoir à survivre", poursuit Mykyta.
"Essayer de survivre pendant les bombardements d’artillerie, le froid terrible quand vous êtes assis dans les tranchées, ou lorsque vous vous battez avec les rats et les souris pour de la nourriture dans les tranchées…", lâche-t-il avant de conclure : "Merci beaucoup pour toute votre attention. J’espère que je serai encore là pour être diffusé encore sur votre antenne, dans le futur. Le lieutenant-chef Ivanov était avec vous, pendant que nous faisons face à un ennemi commun. Gloire à l'Ukraine".
Mykyta redoute les semaines à venir. Lors d’un bombardement pécédent il y a quelques jours, l’antenne "Starlink" de son unité a été détruite par un éclat d’obus, impactant durablement les communications par satellite. "la guerre est très compliquée sans cela" écrit-il dans l'un de ses messages. 22 ans fêtés au front, 9 mois sans être tué, le jeune lieutenant-chef est déjà un survivant.