Frappes sur Gaza : Washington menace de freiner l'aide militaire à Israël

Gaza - Frappes israéliennes
Benjamin Netanyahu, menace de lancer une offensive terrestre sur Rafah, où se cachent selon Israël les derniers bataillons du mouvement terroriste du Hamas mais où s'entassent aussi 1,4 million de Palestiniens. © AFP
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avec AFP / Crédit photo : AFP , modifié à
Ce jeudi, alors que les Etats-Unis menacent pour la première fois de cesser des transferts d'armements à Israël en cas d'offensive majeure dans la ville surpeuplée de Rafah, l'armée israélienne a bombardé la bande de Gaza. De plus, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens a indiqué qu'environ 80.000 personnes ont fui Rafah depuis le 6 mai.
L'ESSENTIEL

L'armée israélienne a bombardé jeudi la bande de Gaza, au moment où les Etats-Unis menacent pour la première fois de cesser des transferts d'armements à Israël en cas d'offensive majeure dans la ville surpeuplée de Rafah, près de la frontière égyptienne. Il s'agit de l'avertissement le plus sévère des Etats-Unis, un proche allié d'Israël et son principal fournisseur d'armements, concernant la conduite de sa guerre déclenchée le 7 octobre par une attaque sanglante du mouvement terroriste du Hamas sur le sol israélien.

Les principales informations : 

  • L'armée israélienne a bombardé jeudi la bande de Gaza
  • Les Etats-Unis menacent pour la première fois de cesser des transferts d'armements à Israël en cas d'offensive majeure dans la ville surpeuplée de Rafah
  • L'ambassadeur d'Israël à l'ONU a estimé jeudi "difficile à entendre et très décevante" la menace du président américain Joe Biden de cesser la livraison de certaines armes à Israël 
  • L'armée israélienne a indiqué avoir frappé des infrastructures militaires du Hamas, notamment des postes de tireurs d'élite, à Zeitoun (centre)
  • L'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens a indiqué qu'environ 80.000 personnes ont fui Rafah depuis le 6 mai
  • Un haut responsable américain a confirmé sous couvert d'anonymat la suspension la semaine dernière d'un transfert vers Israël "de 1.800 bombes de 2.000 livres (907 kg) et de 1.700 bombes de 500 livres (226 kg)"

Infrastructures militaires visées par Tsahal

Cette mise en garde intervient en pleine médiation au Caire où les négociations indirectes entre Israël et le Hamas via le Qatar, l'Egypte et les Etats-Unis ont repris mercredi pour tenter de parvenir à un compromis sur une trêve et éviter un assaut à Rafah. Aux yeux du Hamas, les opérations israéliennes à Rafah et à son point de passage "visent à entraver les efforts des médiateurs", a déclaré jeudi un membre du bureau politique du mouvement, Ezzat al-Rishq.

Sur le terrain, une équipe de l'AFP a fait état jeudi de nombreux tirs d'artillerie à Rafah, à la pointe sud de la bande de Gaza. "Les chars et les avions à réaction tirent", a déclaré Tarek Bahloul, un habitant dans une rue déserte de Rafah : "Toutes les minutes, on entend une roquette et on ne sait pas où elle va atterrir". L'armée israélienne a indiqué avoir frappé des infrastructures militaires du Hamas, notamment des postes de tireurs d'élite, à Zeitoun (centre).

Israël estime "très décevante" la menace de Joe Biden

L'ambassadeur d'Israël à l'ONU a estimé jeudi "difficile à entendre et très décevante" la menace du président américain Joe Biden de cesser la livraison de certaines armes à Israël en cas d'offensive d'ampleur à Rafah dans le sud de la bande de Gaza.

"C'est une déclaration très dure à entendre et décevante de la part d'un président à qui nous avons été reconnaissants depuis le début de la guerre" entre Israël et le Hamas palestinien, a déclaré Gilad Erdan à la radio publique israélienne. "Il est assez clair que n'importe quelle pression sur Israël, n'importe quelle restriction qui lui est imposée, même de la part d'alliés proches soucieux de nos intérêts (...) donnent espoir" à "nos ennemis", a-t-il ajouté, citant le Hamas, le Hezbollah libanais et l'Iran.

"Bain de sang"

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, menace de lancer une offensive terrestre sur Rafah, où se cachent selon Israël les derniers bataillons du mouvement terroriste du Hamas mais où s'entassent aussi 1,4 million de Palestiniens, en majorité déplacés par la guerre. "Des civils ont été tués à Gaza à cause" de bombes américaines, a reconnu le président Joe Biden, dans un entretien à CNN, au cours duquel il a pour la première fois posé des conditions à l'aide militaire à Israël, proche allié des Etats-Unis.

"S'ils entrent à Rafah, je ne leur livrerai pas les armes qui ont toujours été utilisées (...) contre des villes", a déclaré Joe Biden alors que l'armée israélienne a dit préparer une offensive "limitée" à Rafah, faisant craindre à l'ONU un "bain de sang". Réagissant à ces propos, l'ambassadeur d'Israël à l'ONU a déclaré jeudi à la radio publique israélienne que cette menace était "difficile à entendre et très décevante". De son côté, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens a indiqué qu'environ 80.000 personnes ont fui Rafah depuis le 6 mai, quand Israël a enjoint les Palestiniens vivant dans l'est de la ville à évacuer.

Un haut responsable américain a confirmé sous couvert d'anonymat la suspension la semaine dernière d'un transfert vers Israël "de 1.800 bombes de 2.000 livres (907 kg) et de 1.700 bombes de 500 livres (226 kg)", utilisées pendant la guerre. Plus tôt cette semaine, l'armée israélienne a pris le contrôle du passage frontalier avec l'Egypte, coupant la principale porte d'entrée pour les convois d'aide humanitaire vers le territoire palestinien assiégé. L'autre point de passage proche de Rafah, Kerem Shalom côté israélien, fermé dimanche après des tirs revendiqués par le Hamas, a été visé mercredi par des tirs de roquettes peu après sa réouverture, selon l'armée.

"Tirs d'obus à l'aveugle"

Les soldats israéliens ont poursuivi mercredi leurs "opérations ciblées" du côté gazaoui du point de passage, dans l'est de Rafah, sur la base d'informations faisant état de "terroristes opérant dans le secteur". "Nous avons très peur. L'armée d'occupation continue de tirer à l'aveugle des obus sur des quartiers de l'est de Rafah, en plus d'une intensification des frappes aériennes", a raconté à l'AFP un habitant de la ville, Mouhanad Ahmad Qishta. "Même les zones présentées comme sûres par l'armée israélienne sont bombardées", a-t-il ajouté.

La fermeture des points de passage et les opérations militaires à Rafah font craindre une aggravation de la crise humanitaire dans le territoire palestinien. Il ne restait mercredi que "trois jours de carburant" aux hôpitaux du sud de Gaza, "ce qui signifie qu'ils pourraient bientôt cesser de fonctionner", a averti le directeur général de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Cette guerre a éclaté le 7 octobre quand des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque contre Israël, sans précédent dans l'histoire du pays, qui a fait plus de 1.170 morts, majoritairement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Plus de 250 personnes ont été enlevées et 128 restent captives à Gaza, dont 36 seraient mortes, selon l'armée. En riposte, l'armée israélienne a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait jusqu'à présent 34.904 morts, selon le ministère de la Santé du Hamas.

"Convergence" de vues

Concernant les pourparlers de médiation au Caire, le média Al-Qahera News, proche du renseignement égyptien, a fait état d'une "convergence" de vues sur certains points. A Jérusalem, Benjamin Netanyahu a rencontré mercredi le directeur de la CIA, William Burns, pour discuter d'une possible "pause" dans les opérations militaires dans le sud de la bande de Gaza en échange de libérations d'otages, selon un responsable israélien.

Lundi, quelques heures avant le déploiement de troupes israéliennes à Rafah, le Hamas avait donné son feu vert à une proposition présentée par les médiateurs. Israël a répondu que cette proposition était "loin de ses exigences" et répété son opposition à un cessez-le-feu définitif tant que le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007 et qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne, ne serait pas vaincu.