L'Ukraine a déploré samedi "l'indécision" des Occidentaux sur les livraisons de chars lourds, tandis que certains de ses alliés européens ont directement pointé du doigt l'Allemagne, après son refus de fournir ses tanks Leopard à Kiev, au moment où les Russes sont à l'offensive. "L'indécision de ces jours tue encore plus de nos concitoyens", a critiqué sur Twitter Mykhaïlo Podoliak, un conseiller de la présidence ukrainienne, appelant les alliés de Kiev, réunis la veille à Ramstein (Allemagne), à "réfléchir plus vite". "Vous aiderez l'Ukraine avec les armes nécessaires de toute façon et réaliserez qu'il n'y a pas d'autre option pour mettre fin à la guerre", a-t-il plaidé, faisant écho à des propos similaires la veille du président Volodymyr Zelensky.
Dans une rare critique publique, les trois ministres des Affaires étrangères des pays baltes ont de leur côté exhorté samedi matin Berlin "à fournir dès maintenant des chars Leopard à l'Ukraine", plaidant "la responsabilité particulière" de l'Allemagne, "première puissance européenne". Les critiques directes envers Berlin sont également venues d'un sénateur républicain américain, Lindsey Graham, à l'issue d'une visite à Kiev vendredi. "J'en ai assez du 'show merdique' autour de qui va envoyer des chars et quand", a-t-il fustigé sur Twitter. "Aux Allemands: envoyez des chars en Ukraine car ils en ont besoin. (...) À l'administration Biden: envoyez des chars américains pour que d'autres suivent notre exemple".
Les informations à retenir :
- Washington s'attend à une contre-offensive de l'Ukraine au printemps.
- Les États-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni vont envoyer des blindés et des chars lourds à l'Ukraine.
- 500 soldats ukrainiens vont être formés par les États-Unis par mois.
La chaîne RT France a annoncé sa "fermeture"
RT France, branche française de la chaîne russe RT suspendue dans l'Union européenne, a annoncé samedi sa "fermeture" au lendemain du gel de ses comptes bancaires. "Après 5 années d'acharnement, les autorités au pouvoir sont donc parvenues à leurs fins: la fermeture de RT France (...) La Direction générale du trésor a décidé de geler les comptes bancaires de RT France rendant impossible la poursuite de notre activité", a annoncé sur Twitter Xenia Fedorova, présidente et directrice de la chaîne.
Dénonçant une "mesure arbitraire", elle affirme que 123 salariés français, dont 77 titulaires de la carte de presse, "risquent aujourd'hui ne pas être payés de leur salaire du mois de janvier et vont perdre leur emploi par le fait du prince". Interrogé par l'AFP, le ministère français de l'Economie avait expliqué vendredi que les avoirs de la chaîne avaient été gelés en application des sanctions européennes les plus récentes et non à l'initiative directe de l'Etat français.
Contrairement aux sanctions initiales décidées après l'intervention militaire russe en Ukraine en février 2022, celles prises en décembre prévoient un "gel des avoirs" des entités visées, a précisé cette source. La situation française est particulière car la France était le seul Etat membre de l'UE à héberger une filiale de RT sur son sol.
Accusés d'être des instruments de "désinformation" du Kremlin, les médias Sputnik et RT (y compris sa version francophone RT France) ont été interdits de diffusion dans l'UE à partir du 2 mars, à la télévision comme sur Internet, à la suite d'un accord des Vingt-Sept peu après le début du conflit en Ukraine.
Washington s'attend à une contre-offensive de l'Ukraine au printemps
Les avancées sur le champ de bataille se mesurent selon lui désormais en centaines de mètres et l'objectif est de permettre à l'Ukraine "de changer cette dynamique de défenses statiques en lui donnant la capacité de faire feu et de manœuvrer grâce à l'utilisation de forces plus mécanisées".
Le ministre américain de la Défense, Lloyd Austin, a fait savoir vendredi que Washington s'attendait à une contre-offensive de l'Ukraine au printemps. Les Etats-Unis ainsi que d'autres pays ont récemment assuré qu'ils donneraient au pays un grand nombre de blindés qui pourraient jouer un rôle important dans d'éventuelles avancées.
Les États-Unis et l'Allemagne promettent de fournir de nouveaux blindés
Washington a promis jeudi de fournir 90 blindés de transport de troupes Stryker et 59 véhicules blindés légers Bradley, dans le cadre d'une nouvelle tranche d'aide, après avoir déjà annoncé la livraison de 50 autres Bradley une semaine plus tôt. L'Allemagne a quant à elle promis 40 blindés Marder, la France des chars de combat légers AMX-10 RC. Le Royaume-Unis a lui accédé aux requêtes de Kiev en faveur de chars lourds en acceptant d'envoyer 14 tanks Challenger.
Ces véhicules pourraient donner à l'armée ukrainienne "une importante force de frappe blindée" susceptible de permettre à Kiev "d'essayer de mener une offensive (...) semblable aux gains (territoriaux) réalisés à Kharkiv à l'automne dernier", a estimé Gian Gentile, un ancien officier américain et actuellement historien auprès du cercle de réflexion RAND Corporation, proche du ministère américain de la Défense.
Le rôle que jouent les différents blindés varie sur le champ de bataille : les tanks lourds peuvent mener la charge et éventuellement encaisser les tirs d'autres chars, tandis que les véhicules de transports blindés sont mieux à même de déposer l'infanterie pour prendre possession d'une ville.
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Si ces véhicules blindés ont une valeur défensive, c'est bien vers l'offensive qu'ils seront tournés, selon Mark Cancian, ancien officier des Marines et analyste du groupe de réflexion américain CSIS (Center for Strategic and International Studies). "Je pense que (ces dons des pays occidentaux) sont particulièrement focalisés sur une offensive ukrainienne que chacun attend (...) plus tard cet hiver", a-t-il dit.
Bien que les promesses de livraisons se soient accumulées, les Etats-Unis se sont montrés réticents à fournir leurs tanks lourds Abrams, avançant des difficultés de maintenance et de formation, tandis que l'Allemagne n'a jusqu'ici pas donné son feu vert pour la livraison de chars Leopard 2. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a salué les récentes donations mais prévenu qu'il n'y aurait "pas d'alternative" à ce que l'Occident fournisse des tanks lourds.
Pour Mark Cancian, il faudrait de nombreux chars pour faire une réelle différence, mais l'addition de plusieurs livraisons de moindre calibre pourrait tout de même avoir un impact significatif, en plus d'une valeur symbolique pour Volodymyr Zelensky.
Les forces ukrainiennes vont être formées par les États-Unis
S'ajoute à l'aide matérielle américaine un récent programme de formation des forces ukrainiennes, qui entraînera 500 soldats par mois. Le chef d'état major américain, le général Mark Milley, a estimé vendredi que l'armée ukrainienne devrait être extrêmement bien formée au maniement des équipement pour qu'une offensive soit couronnée de succès. "Si on prend compte de la météo et du terrain, on voit qu'on a une fenêtre relativement étroite" pour y parvenir, a-t-il dit, notant que ce serait une tâche "très, très difficile".
La Russie a mené des exercices de défense antiaérienne dans la région de Moscou
La Russie a annoncé samedi avoir mené des exercices de défense antiaérienne dans la région de Moscou, pour protéger ses infrastructures essentielles en cas d'"attaques aériennes", sur fond de conflit avec l'Ukraine. "Des exercices ont été organisés dans la région de Moscou, avec le personnel de la brigade de missiles antiaériens du district militaire occidental, pour repousser les attaques aériennes contre d'importantes infrastructures militaires, industrielles et administratives", a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué.
Selon le ministère, les soldats russes qui ont participé à ces entraînements se sont formés à l'utilisation de "missiles antiaériens S-300". Au total, "plus de 150 soldats et plus de 30 pièces d'armes, d'équipements militaires et spéciaux ont participé" à ces exercices, a indiqué la même source. La Défense russe n'a toutefois pas précisé quand ces exercices avaient eu lieu.
À la question de savoir si la Russie craignait que Moscou ne soit une cible, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avait refusé vendredi de répondre, renvoyant la question au ministère de la Défense. La Russie a connu ces derniers mois plusieurs attaques imputées à l'Ukraine, qu'il s'agisse de sabotage ou de frappes aux drones et de tirs d'artillerie sur des régions frontalières.