Guerre en Ukraine : ce qu'il faut retenir au 453e jour de l'invasion russe

La ville de Dnipro, dans le centre-est de l'Ukraine, a été visée dans la nuit de dimanche à lundi par 16 missiles et 20 drones explosifs russes
La ville de Dnipro, dans le centre-est de l'Ukraine, a été visée dans la nuit de dimanche à lundi par 16 missiles et 20 drones explosifs russes © VINCENZO CIRCOSTA / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP
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avec AFP// Crédits photo : VINCENZO CIRCOSTA / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP , modifié à
Au 453e jour de la guerre, la Russie a reconnu lundi combattre sur son territoire un groupe de "sabotage" venu d'Ukraine. Elle intervient alors que les forces russes ont revendiqué ce week-end la capture de la ville dévastée de Bakhmout, dans l'est de l'Ukraine.
L'ESSENTIEL

La région russe de Belgorod est la cible lundi d'une incursion de combattants armés venant d'Ukraine, qui a forcé la Russie à décréter un régime "antiterroriste" et à évacuer les civils pour tenter de repousser cette nouvelle attaque sur son sol. Si d'autres attaques ont eu lieu ces dernières semaines dans cette région frontalière, c'est la première à avoir pris une telle ampleur, avec plusieurs villages touchés par des obus. Cette offensive illustre aussi la perméabilité des défenses russes.

En réaction, le FSB (services de sécurité russes) a introduit dans l'après-midi le "régime légal de zone d'opération antiterroriste" dans la région, donnant des pouvoirs accrus aux autorités pour mener des opérations armées, contrôler les civils ou encore évacuer les populations. Il s'agit d'une première depuis le début de l'invasion de l'Ukraine en février 2022. Le gouverneur de Belgorod a indiqué que les civils quittaient la zone concernée. "Nous achevons un porte-à-porte (...) Une grande partie de la population a quitté le territoire concerné, nous aidons avec nos moyens de transport ceux qui n'en ont pas", a dit Viatchelsav Gladkov, sur Telegram. "J'espère que nos militaires accompliront leur mission bientôt et élimineront l'ennemi", a-t-il ajouté, portant le bilan de sept à huit blessés.

Lundi après-midi, les autorités russes avaient fait état de l'"entrée d'un groupe de sabotage et de reconnaissance de l'armée ukrainienne dans le district de Graïvoron". Kiev a démenti, comme à son habitude, toute implication dans des actions en territoire russe. Selon le gouverneur Gladkov, les localités de Zamostié et Glotovo ont été attaquées par des combattants ainsi que le chef-lieu de district, Graïvoron.

Les informations principales :

  • La ville de Dnipro a été visée dans la nuit par 16 missiles et 20 drones explosifs russes, a annoncé l'armée ukrainienne
  • La centrale de Zaporijia a été coupée du réseau électrique pendant plusieurs heures après une attaque nocturne de la Russie ; la liaison a été rétablie lundi en milieu de journée
  • Les autorités russes ont affirmé lundi qu'un groupe de "sabotage" ukrainien s'était introduit dans la région de Belgorod
  • Le groupe paramilitaire Wagner a annoncé lundi prévoir d'achever le transfert de ses positions à Bakhmout à l'armée russe le 1er juin

"Détourner l'attention" de la chute de Bakhmout

Le président russe Vladimir Poutine a été informé, a déclaré aux journalistes son porte-parole Dmitri Peskov, qui a estimé qu'il s'agissait d'une tentative de Kiev de "détourner l'attention" de la chute de Bakhmout. Les forces russes ont revendiqué ce week-end la capture de cette ville dévastée de l'est de l'Ukraine, théâtre de la bataille la plus longue et la plus meurtrière du conflit. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a démenti la perte de Bakhmout et son armée dit tenir encore une petite zone, tout en continuant une percée sur les flancs russes au nord et au sud de la ville.

Quant à l'incursion de lundi, "l'Ukraine suit avec intérêt les événements dans la région de Belgorod (...) mais elle n'a rien à voir avec cela", a assuré Mykhaïlo Podoliak, conseiller à la présidence ukrainienne. L'opération a été revendiquée sur une chaîne Telegram qui se présente comme appartenant à la "Légion Liberté pour la Russie", un groupe de Russes combattant côté ukrainien, qui avait déjà assuré être à l'origine d'autres attaques dans la même région. "Est venu le temps de mettre fin à la dictature du Kremlin", a affirmé dans une vidéo diffusée par cette chaîne un homme qui avait été présenté à l'AFP en décembre comme "Caesar", porte-parole du groupe, un homme identifié par des médias comme un ex-néonazi russe passé côté ukrainien en 2014.

Selon la chaîne, le groupe a "complètement libéré" le village de Kozinka et a attaqué une deuxième localité, le chef-lieu de Gaïvoron. Ces affirmations n'étaient pas vérifiables de source indépendante.

Le groupe Wagner dit se retirer de Bakhmout d'ici le 1er juin

Le groupe paramilitaire Wagner a annoncé lundi prévoir d'achever le transfert de ses positions à Bakhmout à l'armée russe le 1er juin, tandis que l'Ukraine soulignait que la bataille continuait malgré la revendication russe de conquête. Samedi, le chef des hommes de Wagner, Evguéni Prigojine, et l'armée russe avaient revendiqué la prise de Bakhmout dans l'Est de l'Ukraine aux termes de mois de combats sanglants. De leur côté, les autorités ukrainiennes, affirment contrôler encore quelques bâtiments dans la cité largement détruite, et surtout avancer dans sa banlieue en attaquant les flancs russes.

"Dans la périphérie ouest (de Bakhmout), les lignes de défense sont en place. Donc le groupe Wagner quittera Artiomovsk (nom soviétique de la ville, NDLR) entre le 25 mai et le 1er juin", a indiqué lundi Evguéni Prigojine dans un enregistrement audio publié par son service de presse. Puis, le patron de Wagner s'en est de nouveau pris à la hiérarchie militaire russes avec qui il est en conflit, accusant les responsables d'avoir privé ses hommes de munitions et d'être trop en retrait du terrain. "S'il n'y a pas assez d'unités du ministère de la Défense (pour occuper Bakhmout), il y a des milliers de généraux (pour le faire), il faut former un régiment de généraux, leur donner à tous des fusils, et tout ira bien", a-t-il raillé lundi. Kiev n'a pas confirmé la perte de Bakhmout.

Kiev dit avoir contré une attaque russe inédite visant la ville de Dnipro

L'Ukraine a affirmé lundi avoir contré dans la nuit une attaque russe d'une ampleur inédite visant la ville de Dnipro, dans le centre-est du pays, avec des missiles et des drones explosifs. Selon les autorités régionales, sept personnes ont été blessées. Au cours de cette "attaque nocturne", la Russie a lancé "16 missiles de différents types et 20 drones Shahed", a indiqué l'armée ukrainienne dans un communiqué publié sur Facebook.

Au total, quatre "missiles de croisière Kh-101/Kh-555" et l'ensemble des 20 drones "ont été détruits par la défense antiaérienne", a-t-elle affirmé. L'armée ukrainienne n'a toutefois pas donné de détails sur les conséquences engendrées par les 12 missiles qui sont passés à travers ses défenses. Plus tôt lundi matin, elle avait dit que les Russes avaient lancé "une attaque massive de missiles et de drones", sans dire où exactement et ajoutant que des "précisions seront publiées après clarification". Selon un message sur Telegram du maire de Dnipro, Borys Filatov, "il n'y a jamais eu de bombardements (sur la ville) d'une telle ampleur depuis le début de la guerre".

Dnipro, ville de près d'un million d'habitants avant l'invasion russe, se situe à 125 km de la ligne de front actuelle. "Les habitants de Dnipro n'ont pas dormi et ont prié pour leurs parents et leurs amis", a encore dit Borys Filatov.

De son côté, Serguï Lissak, le gouverneur de la région de Dnipropetrovsk, où se situe Dnipro, a affirmé que les troupes de Kiev avaient "abattu" dans la nuit "15 drones et 4 missiles de croisière au-dessus de la région". "Plusieurs bâtiments d'une unité de secours ont été endommagés", a-t-il dit. Avant de préciser : "Deux incendies se sont déclarés, qui ont déjà été éteints. Plus de 10 camions et voitures ont été détruits (et) 25 voitures et 2 bus ont également été endommagés". Selon Serguï Lissak, "sept personnes ont été blessées. Des femmes âgées de 52 et 70 ans sont hospitalisées".

Depuis le début du mois de mai, la Russie a multiplié les bombardements nocturnes, en particulier sur Kiev. L'Ukraine assure que sa défense anti-aérienne, renforcée par l'aide militaire occidentale, abat l'essentiel des drones et missiles.

Incident terminé à la centrale nucléaire de Zaporijjia après des frappes nocturnes

La centrale nucléaire de Zaporijjia en Ukraine, occupée par la Russie, était, selon les autorités ukrainiennes, de nouveau reliée au réseau électrique lundi midi, après une coupure entraînée par des frappes nocturnes russes. Ukrenergo "a rétabli l'alimentation de la centrale nucléaire à partir du système électrique ukrainien", a déclaré l'opérateur public ukrainien dans un nouveau communiqué publié sur Telegram.

Plus tôt lundi, l'agence atomique ukrainienne Energoatom avait elle affirmé qu'une "attaque" nocturne des forces russes avait coupé la liaison avec la dernière ligne électrique à haute tension reliant la centrale au réseau ukrainien. De son côté, l'administration d'occupation russe de la centrale de Zaporijjia avait simplement déclaré que le site "a perdu son alimentation extérieure en électricité" en "raison de la coupure de la ligne à haute tension Dnieprovskaïa (connectée à une centrale dans la région de Dnipro, NDLR)", sans donner plus de détails.

Si l'armée ukrainienne s'est félicitée d'avoir détruit dans la nuit quatre missiles et 20 drones explosifs russes au-dessus de Dnipro, Ukrenergo a annoncé que "des lignes à haute tension (...) ont été endommagées", entraînant notamment "l'arrêt de l'une des plus grandes centrales électriques de la région, ainsi que d'un certain nombre de sous-stations d'Ukrenergo". Ukrenergo a ainsi demandé lundi midi aux habitants de la zone de limiter leur consommation en électricité pour "réduire la charge sur le système électrique" local.

Le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, avait lui réagi lundi en affirmant que la sécurité nucléaire du site était "extrêmement vulnérable". "Nous devons nous entendre maintenant pour protéger la centrale, cette situation ne peut continuer", a-t-il lancé sur Twitter. Il s'agit de la septième fois que l'immense complexe de la centrale nucléaire de Zaporijjia est coupé du réseau électrique depuis sa prise par l'armée russe, le 4 mars 2022. La centrale est située sur les bords du fleuve Dniepr, qui, dans cette zone, sépare l'armée ukrainienne des troupes russes.

La précédente coupure remontait à début mars. L'alimentation avait là aussi été rétablie après quelques heures. Fin mars, le directeur de l'AIEA avait dit chercher un compromis entre les deux camps pour ne pas attaquer le site, alors que se profile une contre-offensive ukrainienne, et avait prié une fois encore Moscou de ne pas y entreposer des équipements militaires. La centrale, qui produisait auparavant 20% de l'électricité ukrainienne, a continué à fonctionner les premiers mois de l'invasion russe, malgré des périodes de bombardements, avant d'être mise à l'arrêt en septembre. Depuis, aucun de ses six réacteurs ne génère de courant, mais l'installation reste connectée au système énergétique ukrainien et consomme de l'électricité produite par celui-ci pour ses propres besoins.

Russie : un groupe ukrainien de "sabotage" signalé dans une région russe frontalière

 

Les autorités russes ont affirmé lundi qu'un groupe de "sabotage" ukrainien s'était introduit dans la région de Belgorod, frontalière de l'Ukraine, et que des actions étaient en cours pour le détruire, en pleine série d'attaques sur le territoire russe. "Un groupe de sabotage et de reconnaissance de l'armée ukrainienne est entré dans le district de Graïvoron", frontalier de l'Ukraine et situé à environ 65 kilomètres à l'ouest de la ville de Belgorod, a indiqué le gouverneur régional, Viatcheslav Gladkov.

"Les forces armées russes, aux côtés des gardes-frontières, de la Rosgvardia (garde nationale) et du FSB (services de sécurité) prennent toutes les mesures nécessaires pour éliminer l'ennemi", a ajouté Viatcheslav Gladkov, dans un message sur Telegram. L'AFP n'était pas en mesure de confirmer ces déclarations de source indépendante.

Ces dernières semaines, alors que se profile une vaste offensive ukrainienne, le territoire russe a été la cible d'un nombre croissant de sabotages, d'attentats et d'attaques de drones imputés à Kiev. Début mai, Moscou a notamment affirmé avoir intercepté deux drones ukrainiens qui visaient un bâtiment du Kremlin, le coeur du pouvoir, et accusé Washington d'avoir commandité cette attaque présumée. À chaque fois, l'Ukraine a nié toute responsabilité ou s'est abstenue de commenter.

Ce n'est pas la première fois qu'un groupe de "saboteurs" est signalé en Russie. En mars, l'incursion d'hommes armés dans la région frontalière de Briansk avait causé un choc, faisant voler en éclats le sentiment d'inviolabilité de la frontière. Selon les autorités russes, deux civils avaient alors été tués et un enfant de 11 ans blessé par des "saboteurs" ayant ouvert le feu sur une voiture dans un village. Kiev avait démenti toute implication.