Le conflit se poursuit en Ukraine. Le pays entre dans son 79e jour de conflit. Aujourd'hui, Moscou est accusée de toute part. D'une part pour crimes de guerre, et de l'autre pour le transfert "de force" d'Ukrainiens en Russie comme l'affirme Washington. Kiev a avancé le nombre de 1,2 million de personnes déportées par Moscou en Russie. Les autorités ukrainiennes dénoncent aussi l'existence de "camp de filtration" russes, souvent dans les territoires contrôlés par la Russie dans l'est de l'Ukraine, par où passent ces "déportés".
Les principales informations à retenir :
- Les forces russes sont font l'objet d'accusations de crimes de guerre
- La production de maïs en Ukraine va diminuer de 53%
- La possible adhésion de la Suède et la Finlande à l'Otan
- Aide européenne de 500 millions d'euros pour l'Ukraine
Une aide de l'UE de 500 millions d'euros
L'Union européenne s'est engagée vendredi à apporter une aide supplémentaire d'un demi-milliard d'euros pour soutenir le combat de l'Ukraine face à l'invasion russe, tandis qu'en Géorgie, une région séparatiste prorusse faisait à son tour un pas vers le rattachement à la Russie.
Les autorités de cette "république" séparatiste autoproclamée, indépendante de fait de la Géorgie pro-occidentale et occupée par des forces de Moscou depuis une intervention militaire russe en 2008, ont annoncé vendredi organiser le 17 juillet un référendum sur son intégration à la Russie.
"Le moment est venu de s'unir une fois pour toutes". "L'Ossétie du Sud et la Russie seront ensemble, c'est le début d'une grande nouvelle histoire", a déclaré le "président" d'Ossétie du Sud Anatoli Bibilov, laissant craindre l'apparition d'un autre foyer de tension, cette fois au flanc de la Géorgie, qui a fait vœu de longue date, comme l'Ukraine, de rejoindre l'Union européenne et l'Otan.
Pour l'heure, en Ukraine, les combats continuaient dans l'est entre forces russes et armée ukrainienne, notamment à Marioupol, la grande ville portuaire du sud-est où résistent encore un millier de soldats ukrainiens retranchés dans les entrailles de l'usine sidérurgique Azovstal. "Il y a près de 600 blessés sur Azovstal, les Russes continuent de bombarder l'hôpital militaire", a témoigné depuis l'usine Sviatoslav Palamar, le commandant adjoint du régiment Azov, une des formations ukrainiennes qui s'y trouvent, lors d'une conférence en ligne.
"Nous allons résister"
"Nous allons résister tant que nous pourrons (...), si on ne l'avait pas fait, cette horde irait plus loin", a-t-il ajouté. "Je voudrais que les États-Unis aident à évacuer nos blessés et mobilisent tous les efforts pour aider à l'extraction de notre régiment" de cet encerclement, a-t-il encore dit. Les efforts internationaux, jusqu'à ceux du pape François, se sont révélés infructueux jusqu'à présent pour sauver les soldats ukrainiens retranchés dans cette ville à 90% détruite par les bombardements russes.
Sans préciser si cette question avait été évoquée, le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a constaté vendredi que son entretien avec son homologue russe Sergueï Choïgou n'avait permis aucun progrès. Selon un haut responsable du Pentagone, "l'appel en lui-même n'a résolu aucun problème aigu ou mené à des changements directs dans ce que les Russes font ou disent". Iryna Verechtchouk, vice-Première ministre ukrainienne, a fait le même constat après l'appel à l'aide du régiment Azov.
"Il ne faut pas exagérer le pouvoir des dirigeants mondiaux" face à la détermination de Moscou, a-t-elle relevé sur Telegram, ajoutant que les "négociations avec l'ennemi sont très difficiles". Face à la poursuite des bombardements et de l'offensive russe contre l'Ukraine, l'Union européenne a annoncé vendredi qu'elle allait ajouter 500 millions d'euros à son financement de l'effort militaire ukrainien, en le portant "à 2 milliards d'euros au total".
La recette est "claire", a déclaré le chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell à l'occasion d'une réunion du G7 à Wangels, dans l'extrême nord de l'Allemagne : il faut "plus de la même chose", à savoir plus de sanctions économiques contre la Russie, plus de soutien à Kiev, et aussi "continuer de travailler à isoler la Russie".
Sur le sujet des sanctions, les 27 membres de l'UE n'ont cependant toujours pas réussi à se mettre d'accord pour arrêter progressivement leurs achats de pétrole russe, la Hongrie ayant jugé insuffisante la dérogation obtenue. Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a assuré Kiev du soutien du G7 "jusqu'à la victoire de l'Ukraine".
"Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie, c'est la Russie qui est en guerre contre l'Ukraine : il y a un agresseur et un agressé et nous soutenons l'agressé", a-t-il souligné. Les ministres des Affaires étrangères du G7 (Allemagne, France, Italie, Canada, États-Unis, Japon et Royaume-Uni), rejoints par leurs homologues ukrainien Dmytro Kouleba et moldave Nicu Popescu, sont réunis jusqu'à samedi.
La Suède et la Finlande aux portes de l'Otan
Vendredi, un rapport officiel suédois a ouvert la voie à une adhésion du pays à l'Otan, en multipliant les conclusions favorables avant la décision de ce pays nordique et de son voisin finlandais dans les prochains jours. "Une adhésion de la Suède à l'Otan relèverait le seuil (de déclenchement) de conflits militaires et aurait ainsi un effet dissuasif en Europe du Nord", conclut le rapport préparé ces dernières semaines par le gouvernement et les partis au Parlement.
Conséquence directe de l'invasion russe de l'Ukraine, Suède et Finlande, deux membres de l'UE restés des décennies hors des alliances militaires, doivent annoncer d'ici le début de la semaine prochaine leur candidature à l'Otan. La Russie avait mis en garde en particulier la Finlande, pays voisin. Et vendredi, la filiale locale du fournisseur russe d'électricité InterRAO a annoncé suspendre à partir de samedi ses livraisons à ce pays, invoquant des problèmes de paiement. L'opérateur finlandais a cependant assuré qu'il pourrait se passer de l'électricité russe, qui représente "moins de 10%" de ses besoins.
Quant au président turc Recep Tayyip Erdogan, il a exprimé vendredi son hostilité à l'adhésion de ces deux pays à l'Otan, au risque de bloquer l'ensemble du processus qui requiert l'unanimité des membres de l'Alliance atlantique. Il a expliqué reprocher à Stockholm et Helsinki de servir "d'auberge aux terroristes du PKK", le Parti des Travailleurs du Kurdistan. Washington "travaille à clarifier la position de la Turquie", a commenté la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki vendredi.
La production de maïs en Ukraine va chuter de plus de moitié
La production de maïs en Ukraine va diminuer de 53% durant la campagne en cours, estime le ministère américain de l'Agriculture (USDA), qui voit également la quantité de blé produite par le pays en guerre reculer de plus d'un tiers. Dans le même temps, la production de blé devrait augmenter de plus de 6% en Russie, qui conforterait ainsi sa place de premier exportateur mondial devant l'Union européenne, avec 19% des volumes échangés contre 16,5% l'année précédente.
"La tendance nette" de ce rapport mensuel baptisé Wasde, "c'est toujours des tensions sur le marché des céréales et notamment du blé", a réagi Gautier Le Molgat, du cabinet Agritel. L'USDA voit ainsi les stocks mondiaux atteindre la fin de la campagne qui s'achève (l'année du blé démarre le 1er juin aux États-Unis) en baisse de 3,9%, et les voit encore se replier de 4,5% à l'issue de la prochaine saison.
Washington accuse Moscou du transfert "de force" en Russie d'Ukrainiens
Les États-Unis ont accusé jeudi l'armée russe d'avoir transféré "de force" en Russie "plusieurs milliers" d'Ukrainiens depuis le début de la guerre fin février, souvent en passant par des "camps de filtration" où ils sont soumis à un traitement "brutal".
"Les États-Unis estiment que les forces russes ont transféré au moins plusieurs milliers d'Ukrainiens dans ces 'camps de filtration', et évacué au moins plusieurs dizaines de milliers d'autres en Russie ou dans des territoires contrôlés par la Russie, parfois sans dire aux évacués quelle était leur destination finale", a déclaré jeudi l'ambassadeur américain auprès de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), Michael Carpenter.
Réponse de Zelensky à Macron
Sur cette question de l'attitude envers le Kremlin, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que le président français Emmanuel Macron essayait "en vain" de dialoguer avec son homologue russe Vladimir Poutine. "Il ne faut pas chercher une porte de sortie pour la Russie, et Macron le fait en vain", a regretté Volodymyr Zelensky jeudi soir sur la chaîne de télévision italienne RAI 1, selon une vidéo diffusée vendredi sur sa chaîne Telegram. Emmanuel Macron avait affirmé lundi que, pour mettre fin à la guerre menée en Ukraine par l'armée russe, la paix devrait se construire sans "humilier" la Russie.
"Le président de la République n'a jamais rien discuté avec Vladimir Poutine sans l'accord du président Zelensky. Il a toujours dit que c'était aux Ukrainiens de décider des termes de leur négociation avec les Russes", s'est défendu de son côté la présidence française vendredi.
Les forces russes accusées de crimes de guerre dans la région de Kharkiv
Les autorités ukrainiennes et des témoins interrogés par l'AFP ont accusé jeudi les forces russes d'avoir tiré au char sur une maison dans un village près de Kharkiv, dans l'est du pays, tuant plusieurs civils. La chaîne américaine CNN a pour sa part publié jeudi ce qu'elle présente comme des images de vidéosurveillance montrant deux civils ukrainiens abattus dans le dos par des soldats russes.
La scène, qui se déroule près d'un concessionnaire automobile le 17 mars, dans la banlieue de Kiev, montre un groupe de cinq soldats fouiller les deux hommes avant de les laisser partir. Lorsqu'ils s'en vont, deux soldats leur tirent dans le dos. Selon CNN, le Parquet ukrainien enquête sur ces faits sur la base d'accusations de crimes de guerre. Dans la région de Kharkiv, le Parquet régional a lui fait état jeudi de l'exhumation de trois cadavres de civils tués le 27 mars dans le village de Stepanki, alors occupé par les forces de Moscou et depuis revenu sous contrôle de Kiev.