Guerre en Ukraine : pourquoi les Nations unies ne sont pas à la hauteur

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Vincent Hervouët
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, se rend à Kiev ce mercredi, au lendemain de sa visite à Moscou. Une tournée diplomatique sur l'invasion russe de l'Ukraine qui a tardé à se faire, estime l'éditorialiste d'Europe 1 Vincent Hervouët. Pour lui, ce conflit met en exergue l'inefficacité de l'Organisation des Nations unies.
EDITO

Cela fait deux mois qu’Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU, se cachait dans son bureau de verre en plein ciel, comme les combattants de Marioupol dans les sous-sols, en Ukraine. Comme s’il craignait une exécution sommaire. Antonio Guterres est secrétaire général, mais beaucoup plus secrétaire que général. Parfait par temps de paix. En PLS depuis que la guerre a éclaté, le représentant des Nations unies est un fantôme et avec lui, on se demande si l’ONU n’est pas morte le 24 février 2022, le jour du début de l'invasion russe de l'Ukraine.

C’est la question : peut-être que cette agression décidée par un des membres permanents du Conseil de sécurité, sans que celui-ci puisse le condamner ou l’exclure, sans que l’Assemblée générale votant à une écrasante majorité ne puisse le démettre, peut-être que cela signe la fin des Nations unies. Ce n’est pas sa faute, mais au premier jour, quand l’ambassadeur de Russie a refusé de regarder les images des blindés enfonçant la frontière, sur le téléphone que lui tendait l’ambassadeur d’Ukraine et que les autres membres permanents ont détourné les yeux, on a su que le Conseil de sécurité faisait partie des victimes.

Guterres face à Poutine : trop tôt ou trop tard ?

Antonio Guterres a donc engagé une tournée diplomatique. Il n’a aucun moyen d’imposer un cessez-le-feu, mais son devoir est d’essayer par tous les moyens, de plaider sans relâche pour des négociations. L’Europe a voté des sanctions pour dissuader Moscou, en vain. Les dirigeants européens défilent depuis à Kiev pour prendre les commandes de matériel militaire ou à Moscou pour tenter de comprendre s’il y a quelque chose à comprendre. Et pendant ce temps, Antonio Guterres à New York, sortait de sa léthargie seulement pour discuter gravement avec Greta Thunberg du désordre climatique.

Ce mardi, enfin, le secrétaire général des Nations unies s’est attablé avec Vladimir Poutine pour un de ces tête-à-tête à sept mètres de distance. De part et d’autre de cette table blanche qui ressemble à une interminable meringue, et qui semble conçue pour décourager tout dialogue sérieux ou empêcher un coupable de se mettre à table, on regarde et on se dit : "Trop tard !", si on est pessimiste, ou "Trop tôt !" si on est optimiste.

Une tournée diplomatique modeste et trop prudente

Dans cette tournée diplomatique, Antonio Guterres a plaidé pour des corridors humanitaires. Plus précisément, pour qu’un "groupe de contact recherche les possibilités d’ouverture de corridors humanitaires". C’est modeste, comme ambition. C’est prudent. C’est court. Surtout quand on compare avec les dernières déclarations de Moscou mettant en garde contre le risque réel de troisième guerre mondiale.

D’un côté, la distribution de pansements. De l’autre, l’apocalypse. Et pendant ce temps, en Allemagne, le chef du Pentagone réunit 40 pays et jure de remuer ciel et terre pour faire gagner l’Ukraine.

Seuls les avantages fiscaux de Guterres sont à la hauteur

Faut-il alors une défaite de la Russie pour pouvoir discuter avec Vladimir Poutine ? On sait quand on commence la guerre, jamais quand et dans quel état on la finira. La guerre d’Ukraine est déjà mondiale, parce que le monde entier en souffre. L’ONU est bien placée pour le savoir : ses agences aident les réfugiés en Europe et se préparent à aider les pays les plus pauvres à affronter la hausse des prix du blé, de l’énergie, des semailles.

Mais l’humanitaire ne suffit pas. Il est urgent de trouver une sortie par le haut, de dégager la porte étroite d’une paix juste, de faire de la politique. C’est la raison d’être de l’ONU. Son devoir moral. Elle ne peut pas compter sur la Chine ou la Turquie pour le faire à sa place. Pour le moment, l’ONU n’est pas à la hauteur. Seuls le salaire et les avantages fiscaux d’Antonio Guterres sont à la hauteur.