Après les kalachnikovs ou les camions piégés, les djihadistes de l'Etat islamique (EI) ont mis la main sur une arme moins conventionnelle : l'eau. A Ramadi, à l'ouest de la capitale irakienne Bagdad, le groupe Etat islamique a pris le contrôle d'un barrage. Les combattants se sont empressés d'en fermer les vannes sur l'Euphrate, le fleuve qui contourne la capitale mais irrigue une grande partie du sud du pays.
Mettre la pression sur les populations. La baisse du niveau du fleuve en aval provoque des coupures dans l'approvisionnement de Khaldiyah et Habbaniyah, deux zones encore sous contrôle gouvernemental en aval de Ramadi. "Daech (acronyme arabe de l'EI) mène désormais une sale guerre de l'eau", a dénoncé Sabah Karhout, le chef du conseil provincial d'Al-Anbar, où se trouvent les trois villes. "Il espère déstabiliser Khaldiyah et Habbaniya (...) Fermer l'eau est le pire crime qu'il puisse commettre. Cela va forcer les enfants, les femmes et les personnes âgées à fuir, ce qui lui permettra de lancer des attaques", a continué ce responsable. "Il utilise donc l'eau comme une arme pour affaiblir les régions où se trouvent des bases militaires", estime un autre élu.
Faire baisser le niveau du fleuve permettrait aussi aux djihadistes de le traverser plus facilement pour étendre leur emprise dans la province d'Al-Anbar, limitrophe avec la Syrie.
Force ou faiblesse ? Malgré la contre-offensive lancée par les forces pro-Bagdad, l'EI garde l'initiative, comme l'a prouvé sa prise en main du barrage. Les responsables locaux veulent pourtant croire à un signe de faiblesse. L'EI a choisi cette stratégie car il "n'a probablement pas assez de combattants à nous opposer dans le cadre d'une guerre conventionnelle", souligne le second élu provincial.
L'eau dans le viseur. Depuis qu'ils ont lancé leur offensive il y a un an, les djihadistes gardent dans leur viseur les infrastructures de l'eau. "Dans les terres arides sur lesquelles combat l'EI, le contrôle de l'eau est l'arme ultime", a souligné mercredi l'institut Soufan Group. Avec des barrages sous leur contrôle, ils peuvent au choix assoiffer des zones ou les inonder, selon leurs intérêts militaires.
L'été dernier, l'organisation extrémiste avait tenté de s'emparer du barrage de Mossoul, sur le Tigre dans le nord du pays. Mais l'offensive des peshmergas kurdes soutenus par la coalition internationale avait permis de conserver le barrage hors de leurs mains.