La Chine a averti jeudi que les quatre pays occidentaux qui ont choisi de boycotter diplomatiquement les Jeux olympiques d'hiver de Pékin en paieraient "le prix", au moment où la France temporise, après avoir d'abord annoncé qu'elle enverrait sa ministre des Sports. Le Royaume-Uni et le Canada ont rejoint mercredi les Etats-Unis et l'Australie dans le "boycott diplomatique" des Jeux de Pékin, nouveau revers pour le régime chinois accusé par les Occidentaux de fouler au pied les droits de l'homme, notamment dans sa région à majorité musulmane du Xinjiang (Nord-Ouest).
Un "recours impopulaire" qui "revient à s'isoler soi-même", lance la Chine
Ces pays enverront bien des athlètes aux Jeux mais pas de responsables officiels. "Le recours des Etats-Unis, de l'Australie, du Royaume-Uni et du Canada à la scène des Jeux olympiques à des fins de manipulation politique est impopulaire et revient à s'isoler soi-même", a estimé devant la presse le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin. "Ils paieront inévitablement le prix de ce mauvais coup", a-t-il déclaré, en réponse à la question de savoir si Pékin envisageait des mesures de représailles spécifiques.
Le porte-parole a affirmé que son pays n'avait pas adressé d'invitations aux pays en question. "Que leurs représentants officiels viennent ou non, les Jeux d'hiver de Pékin seront une réussite", a-t-il assuré. Les JO sont prévus du 4 au 20 février, mais du fait des restrictions imposées par la Chine à l'entrée des étrangers au nom de la lutte contre le Covid-19, peu de responsables politiques mondiaux devraient faire le déplacement de Pékin. A l'exception notable du président russe Vladimir Poutine qui a accepté l'invitation de son homologue chinois Xi Jinping.
Pas de boycott diplomatique pour la France
De son côté, la France devrait envoyer sa ministre déléguée aux Sports, Roxana Maracineanu, a déclaré jeudi le ministre de l'Education et des Sports Jean-Michel Blanquer. Mais la position de Paris sur le volet diplomatique du boycott n'est toutefois pas encore définitivement tranchée, a corrigé par la suite l'entourage du ministre. "Nous sommes pour qu'il y ait une position commune (...) mais cette question doit être traitée en Européens", a pour sa part déclaré Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères lors d'une conférence de presse commune avec son homologue allemand.
Paris avait dans un premier temps indiqué qu'il "se coordonnerait" avec les autres pays de l'Union européenne sur l'attitude à adopter. "Nous sommes profondément troublés par les violations des droits humains du gouvernement chinois", a déclaré mercredi le Premier ministre canadien Justin Trudeau lors d'une conférence de presse.
Des sources de tensions nombreuses entre Pékin et Londres
Quelques heures plus tôt à Londres, lors de la séance hebdomadaire de questions devant le Parlement, le Premier ministre britannique Boris Johnson avait annoncé qu'il y aurait "effectivement un boycott diplomatique des Jeux olympiques d'hiver de Pékin". Les sources de tensions sont nombreuses entre Londres et Pékin, entre respect des droits de l'homme au Xinjiang, recul des libertés à Hong Kong et exclusion du géant chinois Huawei des infrastructures 5G britanniques.
Avant les annonces britannique et canadienne, la décision des Etats-Unis avait suscité la colère de Pékin, et celle de Canberra le mépris. "Tout le monde se fiche de savoir s'ils viennent ou non", avait lancé mercredi M. Wang en direction de l'Australie.
Le CIO évoque sa "neutralité" pour ne pas commenter ces boycotts
Interrogé sur le risque que ces décisions en cascade font peser sur les JO, le Comité international olympique a de nouveau invoqué sa "neutralité" pour s'abstenir de commenter ces "décisions purement politiques", se réjouissant surtout de l'absence de boycott sportif. "L'intégrité des Jeux, c'est l'intégrité des compétitions sportives, c'est pourquoi notre attention se concentre pleinement sur les athlètes", a martelé mercredi face à la presse Thomas Bach, le patron de l'instance.
Selon des organisations de défense des droits de l'homme, au moins un million de Ouïghours et d'autres minorités turcophones, principalement musulmanes, sont incarcérés dans des camps au Xinjiang. La Chine est accusée d'y stériliser de force les femmes et d'imposer un travail forcé. Les Etats-Unis dénoncent "un génocide" à ce sujet. Pékin affirme que les camps sont en fait des "centres de formation professionnelle" pour lutter contre la radicalisation.