Joe Biden entame dimanche sa première visite officielle au Mexique avec à l'agenda la lancinante question de la migration record et les overdoses par milliers aux Etats-Unis dues au Fentanyl, une drogue de synthèse produite par les cartels mexicains. Le président américain entamera sa visite au Mexique, partenaire fondamental de Washington, par un arrêt à la ville frontalière d'El Paso, au sud du Texas, pour faire taire les reproches de ses adversaires de n'avoir jamais mis les pieds sur les 3.100 km de frontière commune en deux ans de mandat.
Un sommet tripartite États-Unis, Mexique et Canada
Il se rendra à Mexico lundi rencontrer son homologue mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador avec qui il participera mardi à un sommet tripartite avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau. "Le Mexique est extrêmement pertinent pour traiter ces deux problèmes aigus, qui sont devenus des vulnérabilités politiques pour Biden", juge auprès de l'AFP Michael Shifter, président de l'institut Dialogue inter-américain.
A l'heure où quelque 2,3 millions arrestations et mesures d'éloignement de sans-papiers ont été prises en 2022, Biden doit montrer sa fermeté s'il décide de se représenter pour un second mandat. Avant de se rendre à El Paso, il a déjà annoncé un programme qui permettra à un maximum de 30.000 personnes originaires de Cuba, d'Haïti, du Nicaragua et du Venezuela d'entrer légalement aux Etats-Unis chaque mois. Ce nouveau quota s'applique aux travailleurs légaux qui ont un parrain sur le territoire américain, ceux entrant de manière illégale s'exposant toujours à une expulsion.
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Face au plus de 230.000 arrestations de candidats illégaux enregistrées en novembre à la frontière sud des Etats-Unis, un niveau record, Joe Biden sait les limites de son programme et reproche aux Républicains de bloquer un plan plus ambitieux.
La tragédie du Fentanyl, une drogue de synthèse
La rencontre bilatérale sera également marquée par la tragédie du Fentanyl, une drogue de synthèse 50 fois plus puissante que l'héroïne, dont la production et le trafic sont contrôlés par les cartels mexicains avec des précurseurs chimiques provenant de Chine, selon la Drug Enforcement Administration (DEA). Près des deux tiers des 108.000 décès par overdose enregistrés aux Etats-Unis en 2021 concernaient des opioïdes de synthèse. Et la quantité de fentanyl saisie pour la seule année 2022 est supérieure à celle qui serait nécessaire pour tuer l'ensemble de la population américaine, selon la DEA.
Les Etats-Unis cherchent à "étendre le partage d'informations" avec le Mexique sur les précurseurs et à "renforcer la prévention", a déclaré le chef de la diplomatie américaine pour l'Amérique latine, Brian Nichols. Et avant l'arrivée de Biden, le Mexique a procédé à la capture jeudi d'Ovidio Guzman, l'un des plus gros trafiquants de méthamphétamine au cours d'une opération qui a fait 10 morts parmi les forces de l'ordre et 19 parmi les membres du gang de Sinaloa.
Changement d'approche dans la politique anti-drogue
"Lorsqu'il y a ce genre de réunions, une constante est que les autorités mexicaines ont toujours quelque chose à offrir, tôt ou tard", estime l'expert en sécurité Ricardo Marquez, selon lequel cette arrestation n'affecte pas la structure du cartel de Sinaloa, dont les réseaux s'étendent à 50 pays. Pourtant, Etats-Unis et Mexique ont annoncé en 2021 un changement d'approche dans leur politique anti-drogue, se concentrant sur les causes du trafic après 15 années de stratégie uniquement militaire. Depuis 2006, 340.000 personnes sont mortes de mort violente au Mexique et des milliers d'autres sont portées disparues, sans que les cartels aient été affaiblis.
Au milieu de ce bain de sang, le gouvernement mexicain a intenté deux procès contre l'industrie des armes aux Etats-Unis, qu'il accuse d'alimenter la violence des narcotrafiquants sur son territoire.
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Un projet d'énergie renouvelable à 48 milliards de dollars
Le changement climatique sera également au menu des discussions, les deux pays ayant annoncé à la COP 27 un projet d'énergie renouvelable de 48 milliards de dollars d'investissement dans lequel le Mexique s'est engagé à étendre ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre d'ici 2030.
Exploitation de lithium, relocalisation d'usines d'assemblage de véhicules électriques, construction de six usines d'énergie solaire côté mexicain entendent s'articuler au cluster de semi-conducteurs en cours de construction en Arizona, dans le cadre de la stratégie de Washington visant à réduire sa dépendance vis-à-vis de l'Asie pour la fabrication de composants électroniques.