La Finlande a annoncé dimanche sa candidature "historique" à l'Otan, avant une réunion décisive en Suède en vue d'une probable demande d'adhésion simultanée des deux pays, conséquence directe de l'invasion russe de l'Ukraine. Le président finlandais et un conseil gouvernemental "ont conjointement décidé que la Finlande allait demander à devenir membre de l'Otan", a déclaré le chef de l'Etat Sauli Niinistö. "C'est un jour historique. Une nouvelle ère s'ouvre", a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse.
Malgré une hostilité de dernière minute de la Turquie, les pays membres de l'Otan sont "sur la bonne voie" pour trouver un consensus sur l'intégration de la Finlande et la Suède, a jugé le chef de la diplomatie croate Gordan Grlic Radman, dimanche en marge d'une réunion des ministres de l'alliance à Berlin. "Je suis prêt à avoir une nouvelle discussion avec le président (turc) Erdogan sur les problèmes qu'il a soulevés", a affirmé Sauli Niinistö. La Turquie reproche aux deux pays, et à Stockholm particulièrement, de faire preuve d'une trop grande mansuétude vis-à-vis du Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK, bien qu'il soit sur la liste de l'UE des organisations terroristes.
Majorité fleuve
Après l'annonce de l'exécutif, le Parlement finlandais doit désormais examiner lundi le projet d'adhésion, avec un vote prévu selon le président de la chambre. Avec le soutien acquis samedi du parti social-démocrate de la Première ministre Sanna Marin, ce dernier doit se traduire par une majorité fleuve d'au moins 169 oui parmi les 200 parlementaires finlandais, selon les dernières projections. "Nous espérons que le Parlement confirmera la décision de candidature à l'Otan durant les prochains jours. Elle sera basée sur un mandat clair", a affirmé Sanna Marin.
En Suède, qui s'apprête également à annoncer sa décision, la direction du parti social-démocrate a entamé samedi matin une réunion décisive, où la formation dominante de la politique suédoise devrait abandonner sa ligne hostile à une adhésion. Une conférence de presse est prévue vers 18H00 locales (16H00 GMT). En cas de feu vert du parti de la Première ministre Magdalena Andersson, la voie serait libre pour une annonce de candidature suédoise, après près de deux siècles de neutralité puis, depuis les années 1990, de non-alignement militaire.
Après avoir rompu avec leur neutralité dans les années 1990 avec la fin de la Guerre froide, en devenant partenaires de l'Otan et membres de l'Union européenne, les deux nations s'amarreraient ainsi un peu plus aux blocs occidentaux. Formellement, les deux pays doivent ensuite transmettre leur candidature au siège de l'Otan en vue de l'ouverture de négociations d'adhésion, qui nécessitent une unanimité des 30 membres actuels.
Vers une adhésion rapide ?
Malgré le risque de blocage turc, "je suis convaincu que les alliés que nous sommes verront d'un oeil constructif et positif leur adhésion à cette alliance", a déclaré dimanche à Berlin le secrétaire général délégué de l'Otan, Mircea Geoana. La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a même assuré que ces deux adhésions pourraient intervenir "très rapidement". Après les négociations d'adhésion qui peuvent être brèves, le processus de ratification parlementaire par les pays membres prend lui plusieurs mois.
Face au risque de représailles russes, la Suède et la Finlande ont cherché ces dernières semaines à multiplier les assurances sur leur protection pendant le processus d'adhésion. Seuls les membres de l'Otan bénéficient du célèbre article 5 de protection mutuelle, pas les candidats. Samedi, le président finlandais avait appelé son homologue russe Vladimir Poutine pour l'informer de la demande d'adhésion imminente de son pays, qui suscite l'hostilité de Moscou.
Le président russe lui a signifié qu'adhérer à l'Otan "serait une erreur", jugeant qu'il "n'y a aucune menace à la sécurité de la Finlande", selon le Kremlin. Helsinki anticipe des mesures de représailles russes, mais ne croit pas à une opération militaire. "Après mon appel avec Poutine, je le pense d'autant plus", a affirmé Sauli Niinistö, indiquant que la conversation n'avait donné lieu à aucune "menace".
Selon les derniers sondages, la part des Finlandais voulant rejoindre l'alliance à dépassé les trois quarts, soit le triple du niveau d'avant la guerre en Ukraine. En Suède, le soutien a également bondi, mais autour des 50% - pour environ 20% d'avis défavorables.