La Grèce lutte depuis onze jours contre un feu dévastateur dans le département frontalier d'Evros (nord-est) et la forêt protégée de Dadia, le "plus grand incendie jamais enregistré dans l'UE" ayant tué 20 personnes et provoqué "un désastre écologique" et économique. Déclaré le 19 août et ayant déjà brûlé 81.000 hectares, selon l'observatoire européen Copernicus (EMS), ce feu est "le plus grand jamais enregistré dans l'UE", a indiqué mardi à Bruxelles Balazs Ujvari, un porte-parole de la Commission européenne.
Un important dispositif mobilisé
L'incendie continue de brûler mardi la forêt de Dadia, située dans le centre de l'Evros, une zone protégée par le réseau européen de Natura 2000 qui est mondialement connu comme un lieu d'habitat ou d'hibernation pour les rapaces. Selon les pompiers, trois foyers restent problématiques et doivent être encore éteints dans l'Evros, à la frontière gréco-turque, à 860 km d'Athènes. A proximité, le département de Rhodopes fait également face à des reprises de feu. Au total, 475 pompiers avec 100 véhicules, 6 avions et 4 hélicoptères sont mobilisés mardi sur ces deux fronts.
L'UE a envoyé ces derniers jours 11 avions et un hélicoptère de la flotte européenne pour aider la Grèce avec 407 pompiers, soit la moitié des moyens aériens européens communs, selon Balazs Ujvari. La végétation est si dense dans cette région que les flammes ne sont souvent pas visibles, et l'eau jetée par les pompiers n'atteint souvent pas les foyers qui brûlent au sol, estiment les garde-forestiers de la région. La semaine dernière, 20 personnes ont été retrouvées calcinées, en majorité des migrants dont deux enfants, près d'Alexandroupoli, chef-lieu de l'Evros, ainsi qu'un berger décédé en essayant de sauver son troupeau dans une région du centre de la Grèce.
"Tragique"
Composée principalement de pins noirs (Pinus nigra) et de pins sylvestres (Pinus brutia) mélangés à des chênes, le parc de Dadia est surtout connue pour ses rapaces. Trois des quatre espèces européennes de vautours sont présentes : le vautour moine (Aegypius monachus), le vautour fauve (Neophron percnopterus) et le vautour percnoptère (Gyps fulvus), selon l'association grecque des ornithologues.
Rappelant un grand incendie qui avait touché Dadia en 2011, la garde-forestière Dora Skartsis estime que "tout ce qui a été régénéré depuis a été perdu" ces derniers jours. "Si nous prenons en compte les zones forestières brûlées par l'incendie dans le sud de l'Evros, nous parlons d'un énorme désastre écologique. L'image est tragique", a affirmé cette experte qui dirige la Société de la protection de la biodiversité de Thrace. La forêt de Dadia est vitale pour l'économie locale, car elle soutient l'exploitation forestière, l'apiculture et les activités touristiques dans le département de l'Evros, l'un des plus pauvres du pays.
Rien que dans la municipalité d'Alexandroupoli, plus de 4.000 moutons et chèvres ont été brûlés, ainsi que 50 bergeries, selon les premières estimations, tandis que des entrepôts contenant des aliments pour animaux ont également été détruits, selon Kostas Dounakis, président de l'Association locale des éleveurs. "Tout le pâturage a été brûlé, toute la zone a été détruite et les bêtes n'ont nulle part où paître... Tout cela crée un coût très élevé pour les éleveurs', a-t-il déploré sur la chaîne de télévision publique Ert.
"L'été le plus difficile"
Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis s'est réuni mardi avec plusieurs ministres pour discuter du reboisement nécessaire après les incendies dans la région de l'Evros et sur le mont Parnès. Le ministre de l'Environnement, Theodoros Skylakakis, a annoncé que doivent commencer les travaux anti-inondations dans les régions concernées pour éviter des glissements de terrain avec les premières pluies de l'automne. Des dédommagements pour les éleveurs et les agriculteurs, ainsi que pour les habitants qui ont perdu leur logement sont prévus.
Comme les pays du pourtour méditerranéen, la Grèce est en proie cet été à de nombreux feux que le gouvernement impute au changement climatique. "Il s'agit de l'été le plus difficile en termes de conditions climatiques, ce qui rend le travail des autorités (...) beaucoup plus difficiles", a souligné lundi Pavlos Marinakis. Plus de 120.000 hectares ont été brûlés jusqu'ici à travers le pays, selon des estimations de l'Observatoire national grec - soit trois fois la moyenne annuelle depuis 2006, a de son côté relevé l'EMS.