Il était réapparu lundi, en tenue militaire, dans une vidéo diffusée par le groupe russe Wagner pour déclarer mener "des activités de reconnaissances et de recherches pour rendre la Russie encore plus grande et l’Afrique encore plus libre". Deux jours plus tard, il figurait parmi la liste des passagers présents dans le crash de son avion, à destination de Saint-Pétersbourg. Que s’est-il passé ? Si les circonstances de sa mort soulèvent de nombreux doutes parmi les observateurs, Evgueni Prigojine, figure emblématique du groupe Wagner, laisse un vide colossal derrière lui. Le groupe russe voit sa marque considérablement affaiblie et la mort de son chef, ainsi que celle de son bras droit Dmitri Outkine, ouvrent une porte vers l’inconnu concernant ses activités dans la région du Sahel.
Redistribuer les cartes
Implanté depuis plusieurs années, le businessman a réussi à tisser un immense réseau en Afrique : dans le domaine de la défense d’abord, avec le renforcement de la présence russe sur l’ensemble du continent et la conclusion d’une vingtaine d’accords depuis 2015 entre Moscou et divers pays africains ; mais aussi dans le financier, le BTP, l’influence ou encore l’exploitation minière et forestière. Il y avait Wagner, certes, mais c’est toute la "galaxie Prigojine" qui est devenue orpheline.
Par ailleurs, dans une étude publiée en septembre 2022 de l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (Inserm), les chercheurs Maxime Audinet et Emmanuel Dreyfus rappellent que la Russie a depuis très longtemps été présente par des canaux plus officiels que ceux de Wagner, les deux entités étant complémentaires. Il n’est donc pas impossible que Vladimir Poutine cherche à redistribuer les rôles, et donc les compétences des acteurs déjà présents sur place.
Déjà un remplaçant ?
Et selon les informations du journal Le Figaro, c’est ce qu’il a déjà commencé à faire. Lors du sommet Russie-Afrique, fin juillet, le président russe "a présenté le général Averianov, homme fort du GRU (direction générale des renseignements, ndlr) aux Maliens", indique au quotidien Arnaud Dubien, directeur de l’Observatoire franco-russe à Moscou, en précisant qu’aucun membre de Wagner n’était convié à cette réunion. Un indice de la volonté du Kremlin à faire bouger les lignes en Afrique avant la mort de Prigojine ?
Toujours est-il que la Russie "trouvera nécessairement un montage pour maintenir sa présence là-bas", ajoute le directeur de l’Observatoire franco-russe. L’influence russe a considérablement développé son assise dans la région du Sahel, et son rôle dans les différents coups d’État au Mali, au Burkina Faso et plus récemment au Niger semble indéniable. Il paraît donc assez peu probable que Wagner disparaisse complètement, même si une refonte de ses activités est inévitable.