C'est un record absolu. Pour l'année 2015, l'Allemagne dit attendre "jusqu'à 800.000 demandeurs d'asile", soit quatre fois plus que les 202.000 demandes enregistrées en 2014. Berlin double ainsi ses prévisions précédentes, qui faisaient état de 400.000 à 450.000 demandeurs d'asile.
88.000 demandes en moins de deux mois. Le pays, qui est déjà la première destination des demandeurs d'asile dans l'Union européenne, devant la Suède, doit faire face à "un vrai défi", a souligné mercredi le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière. Depuis le début de l'été, la hausse qui était déjà spectaculaire depuis janvier, a pris un tournant "dramatique". Pour le mois de juillet, quelque 38.000 personnes ont en effet déposé une demande d'asile. Et pour les seuls 17 premiers jours d'août, elles sont déjà 50.000. Au total, sur les sept premiers mois de l'année, l'Allemagne a enregistré 218.221 demandes, soit plus du double que l'an dernier sur la même période.
"Les flux migratoires via la mer Égée et les Balkans ont considérablement augmenté", a-t-il dit, soulignant également que la "situation en Grèce s'est détériorée" avec des arrivées massives de migrants, venus des zones de conflit comme la Syrie ou l'Irak et arrivant sur des îles grecques complètement dépassées.
Des migrants venus des Balkans et de Syrie. Dans le détail, ce bond a été porté par une énorme augmentation des migrants venus du Kosovo, d'Albanie et de Serbie. Une nouvelle fois, Thomas de Maizière a jugé "inacceptable et honteux pour l'Europe" le nombre considérable de demandeurs venus de pays des Balkans et dont la requête n'a aucune chance d'aboutir. "Ils vont devoir quitter notre pays", a-t-il martelé.
Le nombre de Syriens cherchant refuge en Allemagne a aussi considérablement augmenté, passant de 16.616 sur les sept premiers mois de 2014 à 44.417 sur la même période cette année.
Face à cet afflux massif de migrants, les autorités allemandes sont débordées. Certains réfugiés sont hébergés dans des tentes, des containers, ou des casernes de l'armée. A l'Office pour les migrations et les réfugiés, 250.000 demandes sont actuellement en attente.
L'UE sommée d'agir. Tout en détaillant ces chiffres, Thomas de Maizière a exhorté l'Union européenne à agir. Sans les nommer, il a pointé du doigt certains partenaires européens qui "n'accomplissent pas leurs devoirs" et ne respectent pas le droit européen en matière d'asile. Il doit aborder le sujet jeudi soir à Berlin avec son homologue français, Bernard Cazeneuve.
"Nous ne dédouanerons pas nos partenaires et la Commission (européenne) de leurs responsabilités", a-t-il jugé, ajoutant que "la Commission européenne doit agir contre les pays-membres qui n'assument pas leurs devoirs". Sur la durée, l'Allemagne ne peut "à elle seule assumer comme c'est le cas actuellement la prise en charge d'environ 40% des réfugiés et demandeurs d'asile qui arrivent en Europe". Berlin, qui réclame une "véritable politique européenne en matière d'asile", plaide pour l'instauration dans l'UE de quotas de répartition. L'Allemagne le pratique déjà sur son territoire, où chaque Etat régional se voit attribuer la prise en charge d'un certain pourcentage de demandeurs d'asile. Mais plusieurs Etats-membres, dont la France, sont opposés à cette idée.