Le Yémen, déjà ravagé par cinq ans de guerre civile, s'est davantage enfoncé dans le chaos samedi avec la prise du palais présidentiel à Aden par des combattants séparatistes, après plusieurs jours d'affrontements dans cette grande ville du sud.
"Nous avons pris le palais aux forces de la garde présidentielle"
Depuis mercredi, des affrontements opposent des combattants séparatistes aux soldats du gouvernement, et cela alors que tous sont alliés depuis 2015 au sein d'une coalition emmenée par le pouvoir saoudien à Ryad et le gouvernement émirati d'Abou Dhabi, pour lutter contre les rebelles Houthis soutenus par l'Iran. "Nous avons pris le palais aux forces de la garde présidentielle sans combat", a assuré un porte-parole d'une force militaire séparatiste appelée "Cordon de sécurité" et formée par les Emirats arabes unis.
Une prise surtout symbolique - le président Abd Rabbo Mansour Hadi et son Premier ministre se trouvent en Arabie Saoudite - mais qui marque un tournant.
Empêcher l'escalade
Les combats à Aden entre éléments séparatistes du "Cordon de sécurité" et troupes du gouvernement, ont fait au moins 18 morts - combattants et civils - selon des médecins et des sources de sécurité. Selon Médecins sans frontières (MSF), plus de 75 personnes blessées ont été soignées dans un hôpital relevant de cette ONG depuis vendredi. Avant même que le palais présidentiel ne tombe, le ministre émirati des Affaires étrangères Abdallah ben Zayed s'était pour sa part déclaré "très inquiet" et avait affirmé "mettre en oeuvre tous les efforts possibles pour calmer la situation et aboutir à une désescalade".
Hostilité Nord-Sud
Les affrontements à Aden rendent un peu plus inextricable encore la situation d'un pays où des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux civils, ont déjà trouvé la mort à la suite de la guerre civile. Environ 3,3 millions de personnes sont toujours déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d'assistance, selon l'ONU.
Le Yémen du sud était un état indépendant jusqu'en 1990. Dans le sud, le ressentiment est fort contre les Yéménites originaires du Nord accusés d'avoir imposé par la force l'unification du pays.
À cette hostilité Nord-Sud s'ajoute désormais le conflit au sein de la coalition hétéroclite formée au départ pour défendre le gouvernement. Le Yémen est à présent confronté au risque d'une "guerre civile dans la guerre civile", a estimé dans un rapport le centre de réflexion sur les conflits International Crisis Group (ICG).