Le flot de désinformation autour des élections américaines de mi-mandat, loin de se tarir, risque au contraire de gonfler à mesure que l'attente des résultats finaux de certains duels très serrés se prolonge. Il faudra sans doute attendre plusieurs jours, voire même semaines, pour connaître certains résultats. Ce délai pourrait déclencher un déluge de contestations et d'accusations infondées de fraudes électorales, craignent des observateurs. Des candidats républicains très à droite, qui, comme l'ancien président Donald Trump, affirment que les élections de 2020 lui ont été volées, n'ont pas attendu les résultats. Certains ont dénoncé des problèmes sur des machines à voter, ce qui, selon de nombreux observateurs, vise à pouvoir discréditer les résultats quand ils seront publiés.
En effet, lorsque les Américains se réveilleront mercredi, certaines batailles seront encore en jeu. Mais certains candidats auront alors perdu, de manière inattendue. "Les militants porteront leur attention sur les rumeurs (de fraudes) les plus fortes (...), cherchant à les amplifier et à les transformer en des histoires plus vastes", estime le groupe de recherche non partisan Election Integrity Partnership (EIP), dans un rapport.
Au cœur de l'attention : certains États dans lesquels les candidats sont au coude-à-coude, et qui pourraient faire basculer le Sénat d'un côté ou de l'autre, comme la Géorgie, le Nevada ou encore l'Arizona. Dans le cas d'"élections serrées, en particulier si elles impliquent le contrôle d'un parti sur le Sénat américain, la désinformation va s'aggraver", a estimé auprès de l'AFP Rick Hasen, professeur et directeur du "Safeguarding Democracy Project" à la faculté de droit de l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA). "Il est devenu courant désormais parmi les partisans de Trump de croire que le vol d'élections aux États-Unis est fréquent, malgré toutes les preuves fiables du contraire", a-t-il averti.
Menaces de violence
Ces différents pourraient ouvrir la voie à de longues périodes d'incertitude, alors que plus de la moitié des candidats républicains à ces élections de mi-mandat répètent les allégations de fraude lancées par Donald Trump en 2020. "Si les candidats ne cèdent pas ou décident de contester l'élection, cette période se prolongera, avec chaque jour" de nouvelles allégations, prédisait encore le rapport de l'EIP. Les experts alertent également sur le fait que les "observateurs", des partisans mobilisés par Donald Trump pour faire la chasse aux fraudes électorales, pourraient affirmer sans fondement que des freins juridiques les ont empêchés de repérer de telles irrégularités.
Cela pourrait favoriser la possibilité d'une confrontation violente, alors que de tels appels lancés par des théoriciens du complot électoral ne sont pas inédits. Le groupe de renseignements SITE, qui surveille les extrémistes en ligne, explique que des ultranationalistes ont encouragé une "intervention armée et violente" dans les centres de dépouillement en Géorgie.
"Flux" de désinformation
La désinformation a tendance "non seulement à se poursuivre, mais aussi à changer et à s'aggraver dans l'environnement post-électoral", selon le Center for American Progress, un groupe de réflexion. Ceux qui contestent les résultats électoraux "peuvent lancer bruyamment des contestations judiciaires sans fondement. Des responsables électoraux partisans peuvent refuser de certifier des résultats électoraux solides", a déclaré le groupe de réflexion dans un rapport. Et Donald Trump "pourrait déclarer son intention d'être candidat à l'élection présidentielle en 2024, (...) lui donnant, ainsi qu'à son flux constant de désinformation, une attention médiatique accrue", est-il encore indiqué.
Les responsables républicains, dont Donald Trump, avaient déjà mardi commencé à jeter des doutes sur l'intégrité de l'élection de mi-mandat après le signalement de problèmes techniques avec les machines à voter dans l'Arizona. "C'est reparti ? Le peuple ne le supportera pas !!!", a dénoncé Donald Trump sur son réseau social Truth. Blake Masters, candidat au Sénat dans l'Arizona soutenu par l'ancien président, a également estimé sur Twitter qu'il est "difficile de savoir si ce que nous voyons est de l'incompétence ou quelque chose de pire".
Environ 20% des bureaux de vote du comté de Maricopa, en Arizona, ont rencontré des difficultés mardi, selon des responsables locaux, assurant que cela n'affecterait pas le vote. C'est là déjà qu'en 2020, le comptage du résultat avait été très serré entre Donald Trump et le vainqueur Joe Biden, concentrant une grande partie des accusations de fraude électorale.