L'UE veut se doter d'une «liste noire» sanctionnant la corruption partout dans le monde

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La Commission européenne a présenté ses propositions pour ajouter à la "liste noire" des sanctions européennes les auteurs d'actes de corruption où que ce soit dans le monde. Les personnes sur cette liste pourraient voir geler leurs avoirs dans l'UE et être interdites de séjour sur le sol européen.

La Commission européenne a présenté mercredi ses propositions pour harmoniser les dispositions pénales anticorruption à travers l'UE, mais également pour ajouter à la "liste noire" des sanctions européennes les auteurs d'actes de corruption où que ce soit dans le monde. "Nous envoyons un message clair : l'UE n'est pas ouverte à ceux qui se livrent à la corruption, où qu'elle se produise", a souligné le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell.

Avoirs gelés, interdit de séjour

"La corruption peut menacer la paix et la sécurité internationale, alimenter le crime organisé, le terrorisme et d'autres crimes. C'est pourquoi nous élargissons notre champ d'action pour lutter contre la corruption dans le monde entier", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Selon le cadre législatif proposé par Bruxelles, qui doit encore être approuvé par les Vingt-Sept, ces personnes considérées comme impliquées dans "des activités graves de corruption", quelle que soit leur nationalité, pourraient voir geler leurs avoirs dans l'UE et être interdites de séjour sur le sol européen.

De même, ils se verraient privés d'accès aux ressources financières d'individus ou entités dans l'UE. 

Ce mécanisme vise la corruption passive ou active, le détournement de fonds par un agent public, en particulier dans les pays jugés non-coopératifs en matière fiscale ou défaillants dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ce serait un "système similaire" aux régimes de sanctions adoptés, par exemple, contre les personnalités russes impliquées dans l'invasion de l'Ukraine et placées sur la "liste noire" de l'UE, mais la différence est qu'"il ne s'agit plus de cibler un État tiers spécifique" mais des individus quels qu'ils soient, a observé la vice-présidente de la Commission Vera Jourova.

Unanimité des 27 avant d'être sur la liste

Ce dispositif s'apparente à la "loi Magnistki" des États-Unis, d'abord adoptée en 2012 pour sanctionner des Russes accusés d'être impliqués dans la mort en détention à Moscou d'un avocat dénonçant la corruption, puis élargie en 2016 à tous les suspects de violation des droits humains ou d'actes importants de corruption à travers le monde. Fin 2020, l'UE s'était déjà dotée de la capacité de sanctionner les auteurs de "graves violations des droits de l'homme" partout dans le monde.

En pratique, le placement d'une personne sur cette nouvelle liste noire anticorruption serait formellement proposé par le chef de la diplomatie de l'UE, et devrait être avalisé à l'unanimité des Vingt-Sept.

"Nous ne pouvons pas cibler tous ceux qui sont corrompus dans les pays tiers. Il y a toujours un certain degré d'appréciation politique", mais pour lister quelqu'un, "il faudra des informations montrant que cette personne s'est livrée à un acte grave de corruption", qu'il s'agisse de sources ouvertes (médias, déclarations publiques...), de rapports d'universitaires ou d'ONG, d'informations recueillies par les services de renseignements des Etats membres, précise-t-on à la Commission. La personne visée pourra contester la décision devant la justice européenne.