L'Ukraine songe à dépénaliser la pornographie pour financer son effort de guerre

Cherchant encore et toujours à maintenir son économie à flot après trois années de guerre sur son sol, l'Ukraine pourrait prochainement dépénaliser la pornographie. De quoi soutenir l'effort militaire en générant plus d'une dizaine de millions de dollars d'impôts supplémentaires.
Plus de trois ans après l'invasion russe, et face à la position toujours plus ambiguë de Washington concernant les pourparlers de paix, l'Ukraine continue de chercher de nouvelles ressources pour financer les coûts de la guerre. Plusieurs députés ont ainsi proposé l'idée, pour le moins surprenante, de dépénaliser la pornographie.
Augmenter les recettes fiscales
Pays parmi les plus stricts dans ce domaine, l'Ukraine stipule dans l'article 301 de son Code pénal que toute personne produisant, distribuant ou possédant du contenu pornographique s'expose à une peine allant de trois à cinq ans de prison. Cela n'empêche cependant pas l'État de percevoir des impôts sur ces derniers, à hauteur par exemple d'1,6 million de dollars en 2024.
C'est autour de ce flou juridique que Yaroslav Zhelezniak, vice-président de la commission des finances du Parlement, a initié, avec d'autres, un projet de loi visant à modifier cet article du Code pénal, "pour garantir que les adultes ne soient pas envoyés en prison pour avoir créé et distribué des vidéos intimes", comme notifié sur le site d'informations The New Voice of Ukraine. Selon lui, ces individus ne représentent "aucune menace publique", et mieux, la dépénalisation en inciterait davantage à déclarer leurs revenus, ce qui permettrait d'augmenter les recettes fiscales du pays.
Une position sur laquelle s'aligne Lesya Mykhailenko, avocate fiscaliste de plusieurs femmes ayant vendu du contenu sur OnlyFans, et contraintes de payer des centaines de milliers d'euros d'impôts. "Le gouvernement ne peut pas tout avoir. Soit, on déclare que cette industrie est immorale et on l’interdit complètement, soit on reconnaît qu’elle ne l’est pas et on la dépénalise", s'insurge cette dernière au New York Times.
Soutenir l'effort militaire
Le projet de loi, soutenu par une vingtaine de députés dont plusieurs du parti présidentiel, a obtenu en décembre dernier l’approbation de la commission parlementaire chargée de l’application des lois et attend désormais un vote à la chambre unique du Parlement, la Rada (composée de 450 députés, NDLR). 226 voix seront donc nécessaires pour son approbation, Yaroslav Zhelezniak affirmant avoir déjà recueilli l'accord de la plupart d'entre eux, malgré les critiques de figures de l'opposition.
Les créateurs ukrainiens travaillant sur OnlyFans ont gagné 123 millions de dollars entre 2020 et 2022 (soit 8 millions de dollars en 2020, 35 millions en 2021 et 80 millions en 2022). Et si cette pratique venait à être dépénalisée, elle pourrait en effet rapporter gros. Un groupe de réflexion financé par l’Union européenne estime qu'elle pourrait générer 12,3 millions de dollars (11 millions d’euros) par an en impôts. De quoi soutenir l’effort de guerre et renforcer les institutions.