La Turquie ne fera "aucune concession" pour défendre ses intérêts gaziers en Méditerranée : en haussant encore le ton, le président Recep Tayyip Erdogan participe à l'escalade des tensions dans le sud-est de l'Europe. Le président turc menace même de recourir à la force face à Athènes. Ses navires poursuivent leurs forages illégaux dans les eaux territoriales de la Grèce. Paris met en garde : "Cette zone ne doit pas être le terrain de jeu des ambitions de certains." La France a entamé une nouvelle manœuvre dans la zone avec l'Italie, la Grèce et Chypre.
Cette déclaration provocatrice, anti-occidentale et anti-européenne, est aujourd'hui le fondement de la politique de Recep Erdogan. C’est une façon de chercher à mobiliser sa base électorale islamo-conservatrice, à travers l’exaltation du passé grandiose de l’empire ottoman, dont il serait le fidèle héritier.
La confrontation systématique d'Erdogan
Il s'agit là d'une de ses uniques chances de se maintenir au pouvoir après 17 ans de règne sans partage et des résultats économiques plutôt moyens, voire navrants. Ce n’est absolument pas un hasard si cette déclaration a été faite mercredi matin. C'est l’anniversaire d’une bataille qui a eu lieu en Anatolie, en 1071, il y a bientôt 950 ans. Elle marque la victoire du sultan seldjoukide, donc des Turcs, sur l’empereur de Byzance, donc les Grecs.
À nos yeux, cela peut paraître totalement ridicule mais Erdogan construit pièce par pièce une diplomatie de confrontation systématique avec l’Europe. Que ce soit au niveau symbolique, avec la reconversion de l’église Sainte-Sophie en mosquée ou sur le terrain stratégique avec cette campagne navale d’intimidation qui vise à transformer la Méditerranée en mer intérieure turque.
Une déclaration problématique de Berlin ?
L'Allemagne appelle à une reprise immédiate du dialogue, car elle estime que le Turquie et la Grèce sont "au bord du précipice et pourraient y tomber". Cela pose un problème : on a l’impression que par peur de la confrontation, Berlin renvoie Ankara et Athènes dos-à-dos, alors qu’il y a quand même un agresseur et un agressé.
Or, c’est le type de réaction qui fait complètement le jeu d’Erdogan. La Turquie s’en prend tout particulièrement à l’Europe, car elle la sait politiquement faible, voire craintive. Le seul moyen de mettre un coup d’arrêt aux rodomontades ottomanes d’Erdogan est de montrer une solidarité européenne sans faille. C'est le sens des manœuvres navales que la France et l’Italie organisent en ce moment même avec la Grèce et Chypre.