Le choix de Donald Trump de faire son meeting à Tulsa a fortement choqué. 2:41
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Séverine Mermilliod avec AFP
Le président américain Donald Trump a décidé d'organiser son premier meeting de campagne depuis mars samedi à Tulsa, ville où au moins 300 Afro-américains ont été massacrés par la population blanche en 1921. Pour l'historienne et politologue Nicole Bacharan, soit il ne savait pas, soit cela ne lui a pas semblé important.
DÉCRYPTAGE

Donald Trump a choisi une ville forte de symboles pour son premier meeting post-covid-19 samedi 20 juin : Tulsa, en Oklahoma, théâtre en 1921 de l'un des pires massacres raciaux aux Etats-Unis, avec 300 afro-américains tués par la population blanche. Une décision qui a fortement choqué outre-atlantique. Nicole Bacharan historienne et politologue, spécialiste des Etats-Unis, auteure de Le monde selon Trump (septembre 2019, Tallandier), revient au micro d'Europe 1 sur les raisons et conséquences possibles de ce choix.

Ignorance ou provocation ?

"Il peut y avoir de l’ignorance; il peut y avoir aussi de la provocation", analyse Nicole Bacharan. "Parmi les conseillers de Donald Trump, je ne vois pas qui est sensible à ces questions-là, ni même qui a une connaissance de l’histoire", ajoute l'historienne, qui rappelle quand même que ce massacre d'au moins 300 personnes à Tulsa "n’est pas un secret".

D'autant que le président américain avait à l'origine prévu son meeting à Tulsa le 19 juin, "Juneteenth" ou jour de commémoration de la fin de l'esclavage. Devant les critiques, il a finalement fait machine arrière et décidé de reporter son meeting d'une journée. Sa venue est malgré tout considérée dans la ville "comme une gifle en pleine figure et un manque de respect", a assuré à l'AFP le révérend Mareo Johnson, leader du mouvement Black Lives Matter à Tulsa. 

"Soit le président n'était pas au courant, soit il l’était mais ça ne lui a pas semblé fondamental et il a seulement vu dans Tulsa, Oklahoma, une ville et un État où il a eu un très fort succès électoral en 2016", poursuit Nicole Bacharan. "Mais il persiste à ignorer les revendications de justice raciale qui ont enflammé le pays" dernièrement, après la mort de George Floyd.

Trump en baisse dans les sondages pour la présidentielle

Selon elle, ce choix délibéré est une facteur d'explication de la baisse de popularité du président dans les sondages. "Il est très mal placé dans les sondages, avec 10, 12, 14 points de retard parfois sur Joe Biden (le candidat démocrate à la présidentielle NDLR). Certes à la même époque en 2016 Hillary Clinton avait autant de points d’avance, donc ça n’augure pas du résultat, mais ça ne se passe pas bien du tout pour lui", souligne la politologue.

Il est notamment reproché à Donald Trump "d’avoir mal géré l’épidémie de Covid-19", sans compter qu'il est désormais aux prises "avec une crise économique fondamentale alors que la prospérité économique était son meilleur argument de campagne", rappelle Nicole Bacharan. "Après le meurtre de George Floyd et toutes les revendications pour demander la justice pour les noirs et le contrôle des violences policières, il a réagi avec tant de rigidité, de brutalité, et au fond n’a rien proposé, que tout cela a été très mal compris et désapprouvé par une majorité d’américains", conclut l'historienne et politologue, pour qui le président sort donc fragilisé de cette nouvelle séquence polémique.