Le média d'Etat syrien a annoncé dimanche l'envoi de troupes dans le nord de la Syrie pour "affronter l'agression" turque. La Turquie mène depuis cinq jours une offensive contre les Kurdes afin de conquérir un territoire destiné à accueillir plus de 2 millions de réfugiés syriens, et à éloigner certaines milices kurdes, qu'Ankara considère comme des terroristes. Frédéric Encel, géopolitologue et directeur de l'Institut français de géopolitique, décrypte sur Europe 1 une situation qui devient plus qu'explosive.
La France a un rôle "fondamental" à jouer
Emmanuel Macron, dans la foulée de l'annonce syrienne d'envoyer des troupes, s'est exprimé. Le chef d'Etat français estime que cette situation risque de créer "une situation humanitaire insoutenable". Il a convoqué un conseil restreint de défense dimanche soir. "C’est très bien de la part de Macron. Il y a un risque de déstabilisation de l’ensemble de la région or nous avons une centaine d’hommes et du matériel dans cette zone. Il y a ensuite la menace du retour de centaines d’islamistes radicaux qui ont été capturés par les forces kurdes. Ces gens-là peuvent être tentés de revenir dans leur pays d’origine et pour certains, ils sont Français", commente Frédéric Encel.
Pour le géopolitologue, la France a un rôle "fondamental" à jouer. "Cela peut passer par l'envoi de centaines de soldats supplémentaires pour signifier à la Turquie qu'elle ne pourra pas faire ce qu'elle veut mais cela peut aussi passer par des rétorsions économiques et commerciales".
"Une épuration ethnique est en train de se jouer"
L'envoi de troupes syriennes dans le nord du pays crée une situation explosive. Frédéric Encel estime que "ce n'est que le début, il y a un risque que cela frappe davantage encore dans les prochaines semaines". Il détaille : "Les Kurdes résistent et on a là une visée expansionniste extrêmement claire de la Turquie, au-delà de sa frontière qui elle est légale. Le gouvernement turc craint comme la peste la création d'une grande entité kurde".
Enfin, pour le géopolitologue, "une épuration ethnique est en train de se jouer". "Si les Turcs cherchent à chasser les Kurdes de ces territoires pour y placer 2 à 3 millions de réfugiés syriens donc, pour l’essentiel, des Arabes, c’est très exactement ce qu’on appellera une épuration ethnique en droit international. C’est extrêmement grave, il s’agit de crimes de guerre et potentiellement de crimes contre l’humanité".