Une responsable des droits de l'Homme de l'ONU, Agnès Callamard, a déclaré vouloir se rendre aux Philippines afin d'enquêter sur les exécutions extrajudiciaires présumées, mais le gouvernement du pays a affirmé samedi qu'elle n'était pas la bienvenue. Le président Rodrigo Duterte mène une campagne sanglante contre le trafic de drogue dans l'archipel et a donné carte blanche aux forces de sécurité pour "tirer afin de tuer" les trafiquants. Selon la police, 665 trafiquants présumés ont ainsi été tués par la police et 889 par des miliciens depuis son accession au pouvoir en juin.
Jeudi, cette Française, rapporteur des droits de l'Homme de l'ONU, avait pointé du doigt "l'incitation à la violence et au meurtre" des autorités. Rejetant ses critiques, un haut conseiller du président, Salvador Panelo, l'a mise au défi, vendredi, de venir aux Philippines et de mener une enquête.
"Je salue l'invitation du gouvernement", a réagi dans un mail Agnès Callamard, exprimant l'espoir d'obtenir au cours de sa mission "un engagement total de la part des autorités, des acteurs clés et des parties prenantes préoccupées par la récente vague d'exécutions extrajudiciaires présumées". Elle a précisé qu'elle demanderait à Manille des garanties pour sa liberté de mouvement et d'enquête, tout comme l'assurance de sa sécurité et de celle de son équipe.
Manille dénonce une "ingérence". Le porte-parole de la présidence, Ernesto Abella, a toutefois répondu samedi que l'ONU avait estimé à tort que les commentaires de Salvador Panelo relevaient d'une réelle invitation. "Les Philippines n'ont envoyé aucune invitation à qui que ce soit, et pas non plus à l'ONU pour qu'elle se mêle de ses affaires intérieures", a-t-il justifié. "Les soi-disant enquêtes menées par des tiers constituent une ingérence dans les affaires intérieures d'une nation dont les citoyens ont salué le changement apporté par le président et sa politique", a t-il ajouté.
Déterminé à poursuivre par tous les moyens sa campagne contre la drogue, Rodrigo Duterte avait pour sa part balayé mercredi les critiques de l'ONU les qualifiant de "stupides". "N'enquêtez pas comme si nous étions des criminels", a t-il prévenu, ajoutant que si un représentant de l'ONU était envoyé il "aimerait le frapper à la tête".