Les chiffres sont exorbitants et pourraient continuer à grimper dans les années à venir. En 2021, les cyberattaques vont coûter 6.000 milliards de dollars à l’économie mondiale, constate un rapport du Club des juristes, dévoilé en exclusivité par Europe 1. Plus concrètement, précise ce rapport, si le piratage informatique était un pays, il représenterait autant que la troisième économie mondiale derrière les Etats-Unis et la Chine. Et face à ce phénomène, personne n’est épargné. 90% des entreprises ont été touchées en 2019, dont près de la moitié sont des PME. Le télétravail, rendu indispensable en période d'épidémie de coronavirus, a accentué le phénomène et est devenu la source de 20% de la cybercriminalité.
Car le prix moyen d'un virus informatique est de 5 dollars et cela rapporte très gros. Si le risque cyber poursuit sa croissance annuelle de l’ordre de 15%, il pèsera plus de 10.000 milliards de dollars d'ici à quatre ans.
"Une pandémie sanitaire et une pandémie numérique"
Le numérique est donc le terrain de chasse du crime organisé, responsable de plus de la moitié des cyberattaques, rappelle Myriam Quémener, avocate générale à la cour d’appel de Paris. "Les réseaux mafieux se mettent en contact avec des informaticiens, en particulier dans l'ancien bloc soviétique, où il y a des compétences en mathématiques et en informatique mais peu d'emploi", explique-t-elle, estimant qu'il y a "actuellement une pandémie sanitaire et une pandémie numérique".
Face à cette situation, Myriam Quémener appelle à "renforcer très rapidement les effectifs et la politique pénale". Et d'alerter : "Il y a véritablement une urgence."
"Il faut plus de moyens"
Dans son rapport, le Club des juristes enjoint le gouvernement à faire de la cybersécurité une cause nationale dès l’an prochain, pour notamment améliorer l'entraide internationale et lutter contre les pays sanctuaires qui sont aujourd'hui les paradis fiscaux des cybercriminels. "La France dispose de spécialistes dans tous ces domaines", rappelle Bernard Spitz, président du pôle international et Europe du Medef, et président de la Commission "Cyber risk" au Club des juristes, invité d'Europe 1.
Mais face à la croissance exponentielle de ces piratages, "il faut plus de moyens", réclame-t-il, alors qu'Emmanuel Macron a annoncé en février un plan d'un milliard d'euros. Car aujourd'hui, "on a des gens très performants, mais pas encore les moyens humains et matériels d'aller au bout". Le Club des juristes préconise donc par exemple la mise en place d'une filière de "cyber magistrats". "Il y a aujourd'hui une filière composée de peu de gens. Il faut en augmenter les moyens et la capacité", conclut Bernard Spitz.
"Un enjeu de souveraineté majeur"
Mais la réponse ne peut pas être uniquement française. "Il faut qu'on travaille beaucoup sur le plan européen, à travers le partage des compétences, des données et des moyens entre les différents pays", estime encore Bernard Spitz, qui insiste aussi sur le rôle de la prévention.
Se prémunir contre ces risques est "un enjeu de souveraineté et de sécurité majeur", martèle l'invité d'Europe 1.