Après un "Super Tuesday" réussi pour Hillary Clinton et Donald Trump, leur duel en novembre prochain s'annonce de plus en plus certain. Sur le papier, selon les sondages et face à un personnage aussi clivant que Donald Trump, Hillary Clinton part favorite. Mais les démocrates ne veulent pas sous-estimer un homme qui a humilié tous les pronostiqueurs. "Nous avons toujours pris Donald Trump au sérieux", a prévenu, sur CNN, le directeur de campagne d’Hillary Clinton, John Podesta.
Des tentatives de déstabilisation. Populiste sans idéologie bien définie, au verbe incendiaire, le républicain pourrait surprendre une femme d'Etat rodée mais dont la discipline tourne parfois à la rigidité. Sans compter les affaires qui la poursuivent : les attaques meurtrières contre la mission diplomatique de Benghazi, en Libye, en 2012 , et la controverse sur sa messagerie privée quand elle dirigeait la diplomatie entre 2009 et 2013.
Bill ferait le sale boulot. "Ça va être assez rude, je ne vais pas lâcher l'histoire des emails", a annoncé, de son côté, Donald Trump mardi soir sur Fox News. Selon le New York Times, les stratèges de l'équipe Clinton envisagent de confier à Bill Clinton le sale boulot de répliquer à Donald Trump, épargnant autant que possible à la candidate le combat de boue.
Mais Donald Trump a un avantage : sa flexibilité idéologique, qui pourra lui permettre d'aller chercher les voix des électeurs indépendants, au centre. "Nous allons rassembler le parti et nous allons agrandir le parti", a-t-il promis dans son discours de victoire.
Donald Trump au gré du vent. Dans le passé, il a fait preuve d'un remarquable opportunisme, passant de la gauche à la droite en fonction de ses intérêts d'homme d'affaires, que ce soit sur le droit à l'avortement ou les armes à feu. Aujourd'hui encore, il n'épouse pas complètement l'orthodoxie républicaine, envoyant des signaux mitigés sur l'immigration, la santé, le libre-échange et la relation avec Israël. Il a même défendu mardi le rôle du réseau de planning familial et de cliniques d'avortement Planned Parenthood, que les républicains attaquent avec une extrême virulence.
" Plus les élites du parti protestent contre Donald Trump, plus ça l'aide "
Donald Trump répète qu'il pourrait gagner en novembre dans des Etats démocrates comme le Michigan, où la population blanche ouvrière pourrait être sensible à son discours antisystème et protectionniste. Son rejet de plus en plus public par des élus conservateurs ne ferait que renforcer sa cote. "Plus les élites du parti protestent contre Donald Trump, plus ça l'aide, car ce ne sont pas des gens que la base respecte", estime Norman Ornstein, de l'American Enterprise Institute.
Une campagne qui tourne au référendum. Mais Hillary Clinton a déjà commencé à transformer la campagne en référendum sur l'intolérance supposée du parti républicain et de son favori. Elle dépeint Donald Trump comme un homme xénophobe et sexiste qui déchirera l'Amérique. Comme avec Barack Obama en 2008 et 2012, sa stratégie repose sur la mobilisation des minorités noires et hispaniques.
"Je vais continuer à dénoncer l'intolérance et le harcèlement", a-t-elle lâché à des journalistes mardi à Minneapolis. Dans ses discours, elle parle désormais "amour" et "gentillesse". Mais l'ex-Première dame, ex-sénatrice et ex-secrétaire d'Etat représente l'establishment par excellence, dans une année marquée par la colère anti-élites.
"Il y a énormément de gens qui veulent mettre leur poing dans la tête du système, et Donald Trump est ce poing", a dit David Axelrod, ancien stratège de Barack Obama, au site Vox. Un consultant républicain du Massachusetts, Brad Marston, abonde. Il admet s'être trompé l'été dernier sur les chances de Donald Trump et prévient que l'homme pourrait être redoutable. "Il est très probable qu'il soit sous-estimé", prévient-il.