Manifestations anti France anti Macron Yémen monde musulman STR / AFP 5:20
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Des manifestations contre la France et Emmanuel Macron ont éclaté dans plusieurs pays du monde musulman ces derniers jours. Le géopolitologue Frédéric Encel, invité samedi sur Europe 1, appelle à leur "donner une importance très faible". "On est en train de survaloriser le phénomène", a-t-il analysé.
INTERVIEW

Des effigies d’Emmanuel Macron brûlées, des appels au boycott des produits français et des violences. Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté ces derniers jours dans le monde musulman pour protester contre la France, après les déclarations du président de la République défendant les caricatures de Mahomet. Si ces images ont fait le tour du monde, le géopolitologue Frédéric Encel a appelé à relativiser leur importance, samedi midi sur Europe 1.

"Il faut donner (à ces manifestations) une importance très faible. On fonctionne sur un effet loupe. On est tous, à tort, en train de survaloriser un phénomène qui existe et qui avait existé lors de la publication des caricatures par Charlie Hebdo", a jugé le professeur, auteur du livre Les 100 mots de la guerre (PUF).

Des manifestations "limitées en nombre" organisées par "des islamistes"

Vendredi, les principales manifestations ont eu lieu au Bangladesh et au Pakistan. D'autres moins importantes se sont déroulées en Inde, au Moyen-Orient, au Maghreb et au Mali. "Le monde musulman est composé de 57 États, là on parle de manifestations dans cinq-six pays qui sont parmi les plus petits comme le Qatar. Il y a plus d’un milliard 300 millions de musulmans dans le monde. Les manifestations existent, oui, mais elles ont été extrêmement limitées en nombre", a estimé Frédéric Encel.

"Pour l'essentiel c'était des organisations elles-mêmes islamistes, dont on peut très bien comprendre qu'elles voulaient appeler à manifester à commencer par les Frères musulmans et les salafistes. Mais à ma connaissance, sauf le président turc Erdogan, aucun État musulman n'a appelé officiellement au boycott des produits français", a ajouté le géopolitologue.

Plus largement, Frédéric Encel a expliqué ces manifestations à la fois par "une méconnaissance profonde" du Coran de la part de "beaucoup de gens d’origine ou de culture musulmane" et par une instrumentalisation des pouvoirs en place dans le monde musulman. "Je me permets de rappeler avec beaucoup de respect que dans le Coran, il n'y a que trois réelles apparitions du Prophète. Il y a une méconnaissance qui malheureusement est instrumentalisée par des islamistes radicaux qui ont un projet politique", a expliqué le géopolitologue, qui pointe également du doigt le rôle des gouvernements.

Une instrumentalisation par les pouvoirs en place

"Une bonne majorité des gouvernements dans les États musulmans ont échoué gravement sur le plan social et économique. Il est intéressant pour ces régimes politiques de pointer le doigt ou de laisser pointer le doigt sur l'ennemi extérieur. C'est très commode et très pratique, notamment sur la figure d'Emmanuel Macron, pour faire oublier à leur opinion publique que la gestion de leur pays est calamiteuse", a estimé Frédéric Encel.

"On a un double effet de méconnaissance instrumentalisée dans la rue ou dans la mosquée, et à la tête de l’État une instrumentalisation cynique à des fins politiques", a-t-il résumé. Outre Erdogan, le président indonésien Joko Widodo et le Premier ministre pakistanais, à la tête de deux des pays les plus peuplés du monde musulman, ont également vivement critiqué les propos d’Emmanuel Macron. Face à cette colère, le président français a joué l'apaisement dans une interview à Al-Jazeera, assurant comprendre que des musulmans puissent être "choqués" par les caricatures de Mahomet mais qu'elles ne justifiaient pas la violence.