Il y a huit ans, avant même d’être élu président, Donald Trump déclarait lors d’une prise de parole dans l’Iowa : "Je pourrais être au milieu de la 5e Avenue et tirer sur quelqu'un que je ne perdrais pas d'électeurs". Des termes qui résonnent toujours autant à quelques jours de l’élection, alors que le candidat, inculpé à diverses reprises pour son implication dans l’assaut du Capitole en 2021 ou des paiements dissimulés à une star de films pornographiques, est en course pour accéder une seconde fois à la Maison-Blanche.
Si ses positions très critiques l’égard des populations immigrées, son discours ambigu sur le droit à l’avortement ou ses relations à l’international suscitent l’inquiétude de ses détracteurs, ce dernier conserve une certaine crédibilité aux yeux de l’opinion. Le symptôme d’une société qui n’a presque jamais semblé aussi polarisée.
Une figure presque christique
Pour Lauric Henneton, maître de conférences à l'Université de Versailles Saint-Quentin et spécialiste de l'histoire et de la civilisation américaine, préfacier de Taylor Swift : Histoire d'un Phénomène (Hors Collection, 2024), une part de l’électorat de Donald Trump lui exprime "un soutien inconditionnel, ne voit pas les mensonges comme des mensonges, et considère toute attaque contre lui comme de la persécution".
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Il n’est ainsi pas rare, comme observé lors de son meeting au Madison Square Garden en fin de semaine dernière, d’entendre plusieurs de ses supporters assurer qu’après tout, "personne n’est parfait", ou même supposer que les juges auxquels il doit faire face n’ont pas toutes les informations nécessaires, voire sont uniquement "des marionnettes" du gouvernement fédéral.
Phénomène unique en son genre, le milliardaire voit chaque accusation ou procédure judiciaire lancée à son encontre renforcer sa côte de popularité, auprès d’une frange convaincue selon laquelle il est la victime d’une chasse aux sorcières. Des facteurs qui expliquent par exemple pourquoi, même après son inculpation dans l’affaire Stormy Daniels, où il a été reconnu coupable d’une trentaine de chefs d’accusation, les intentions de vote en sa faveur au sein du camp républicain ont continué d’augmenter.
Prospérité, sécurité
En complément, existe "un groupe hétérogène de soutiens nettement moins fervents, qui ne sont pas dupes, mais peuvent s'accommoder de ses travers", poursuit Lauric Henneton. Une partie importante des électeurs pense l’ex-président capable d’améliorer leur situation personnelle ou de prendre des décisions qui serviront leurs intérêts, davantage que le Parti démocrate.
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C’est le cas, entre autres, des évangéliques conservateurs, qui sont "convaincus que Donald Trump mettra en place des politiques qui iront dans leur sens", avance Mathieu Gallard, directeur d’études chez Ipsos, rappelant "qu’au cours de son premier mandat, le candidat républicain avait nommé des juges conservateurs à la Cour suprême qui étaient revenus sur le droit à l’avortement au niveau fédéral".
Même sans tout réussir au cours de ses quatre années à la tête du pays, à l’image de la construction du mur à la frontière avec le Mexique, Donald Trump est parvenu à mobiliser autour des sujets qui préoccupent le plus la population américaine, entre prospérité économique (avec notamment la promesse d’une baisse d’impôts) et sécurité. Une stratégie payante qui lui permet, malgré ses frasques, de croire en un deuxième mandat qui ferait de lui le 47e président de l’histoire des États-Unis.