Pour ou contre Erdoğan ? J-6 avant l’élection présidentielle du 14 mai, l'actuel dirigeant turc affronte pour la première fois une opposition unie après vingt ans de pouvoir. Le scrutin s'annonce extrêmement serré. Face à lui : trois prétendants dont son principal adversaire, Kemal Kiliçdaroglu, à la tête depuis 2010 du parti républicain du peuple, le CHP, fondé en 1923 par le père de la Turquie moderne. Il est le candidat d’une alliance de six partis d’opposition et certains sondages le donnent même déjà vainqueur de l’élection. Son principal argument : rompre catégoriquement avec l’ère Recep Tayyip Erdoğan.
Une force tranquille
Kemal Kiliçdaroglu se pose par exemple en laïc face au président islamo-conservateur. Il promet la liberté d'expression après la dérive autocratique et l'instauration d'un système parlementaire à la place du régime présidentiel. Silhouette menue et moustache blanche, Kemal Kiliçdaroglu est né dans une famille modeste. L'économiste est diplômé de l'équivalent turc de l'ENA. Il est longtemps jugé sans charisme, mais incarne aujourd'hui la force tranquille et a su imprimer son style.
Monsieur Tout le monde, quand il publie des vidéos filmées dans sa cuisine, Monsieur Propre quand il dénonce la corruption. En 2017, il a marché 420 kilomètres pour soutenir un membre de son parti incarcéré. L'opposant tente dorénavant d'éviter deux écueils : l'hostilité des femmes conservatrices autorisées à porter le foulard dans la fonction publique et son appartenance à l'alévisme, une branche minoritaire de l'islam, alors que la Turquie est principalement sunnite. Mais Kemal Kiliçdaroglu a su séduire l'électorat jeune, lui qui signe chacun de ses meetings en adressant à la foule un cœur avec les doigts.