"Où t’es, grand frère ? Là où je t’ai dit ?". Des échanges téléphoniques entre un membre important de l’organisation Etat islamique et des policiers turcs ont été publiés par un grand quotidien national d’Ankara. Ces bribes de conversation constituent une nouvelle preuve de la collaboration entre le groupe djihadiste et la police turque à la frontière entre la Syrie et la Turquie.
De l’argent de contrebandiers. Les documents publiés dans l’édition de lundi du journal Cumhuriyet sont issus d’une enquête en cours, à Ankara, sur des citoyens turcs qui ont rejoint les rangs de Daech. Les documents contiennent la retranscription de conversations téléphoniques entre des soldats turcs et un certain Mustafa Demir, présenté comme un membre de Daech chargé de l’acheminement de bombes depuis la Syrie vers la Turquie.
Lors de l’un de ces échanges, Demir s’adresse à un officier turc qui lui dit être, avec ses camarades policiers, "dans le champ de mines" et l’appelle à le rejoindre immédiatement. "On en a, viens ici, de ce côté, les hommes sont ici", indique le policier. "OK grand frère, j’arrive. C’est cet endroit où j’ai donné une voiture au lieutenant Burak ?", répond Demir.
Selon le quotidien turc, ces transcriptions et ces documents de l’enquête "ont révélé que Demir avait reçu de l’argent de contrebandiers à la frontière et coopéré avec des officiers dans le cas de passages" de la frontière.
Des livraisons d’armes depuis la Turquie. Ces cas de collaboration entre Daech et la police turque ne sont pas nouveaux. Juste avant l’été 2015, Cumhuriyet avait révélé que des camions appartenant aux services de renseignements turcs avaient transporté des armes vers la Syrie, destinées aux groupes djihadistes.
A la suite de ces révélations pour lesquelles le rédacteur en chef du journal, Can Dündar, a été arrêté en novembre 2015. Erdem Gül, chef de bureau de Cumhuriyet à Ankara, est lui aussi emprisonné. Les deux journalistes sont poursuivis pour espionnage et divulgation de secret d’Etat. Malgré les risques auxquels s’exposent les journalistes de Cumhuriyet, le quotidien turc a visiblement décidé de poursuivre son travail d’investigation.