Dix-huit mois après l'accord historique sur le climat signé à Paris, Donald Trump a annoncé jeudi sa décision de retirer les États-Unis de cet accord. Ce retrait pourrait sérieusement compliquer l’objectif de réduire à moins de 2°C le réchauffement mondial et pourrait créer un effet "boule de neige" auprès d’autres pays. La question a d'ailleurs profondément divisé le G7 qui vient de s'achever en Sicile, lors duquel tous les participants, à l'exception du président américain, ont réaffirmé leur engagement envers cet accord sans précédent.
- À quoi s'étaient engagés les États-Unis ?
Les États-Unis, deuxième pollueur mondial, avaient signé et ratifié l’accord sur le climat sous l'égide de l’ancien président Barack Obama. Ce dernier s’était engagé à ce que le pays réduise ses émissions de gaz à effet de serre de 26 à 28% d’ici 2025 par rapport à 2005. Mais le président Donald Trump s’est attaqué au bilan de son prédécesseur sur le climat, en promettant notamment un renouveau de l’industrie du charbon, une politique en contradiction avec la transition énergétique.
La position de Donald Trump sur le changement climatique était jusqu'ici plus que floue. Interrogé mardi dernier sur ce thème, son porte-parole Sean Spicer était resté extrêmement évasif. Le président croit-il à l'impact des activités humaines sur le changement climatique ? "Je ne peux le dire, je ne lui ai pas demandé", avait répondu ce dernier. Une formule prémonitoire…
- Quels effets sur le réchauffement climatique ?
En signant et ratifiant cet accord sur le climat, 147 pays s'étaient engagés pour réduire à moins de 2°C le réchauffement mondial par rapport au niveau de la révolution industrielle. Mais même avec les engagements pris par chacun - l’accord est non contraignant et chaque pays se fixe des objectifs -, la planète reste pour l’instant sur une trajectoire de + 3°C.
Des chercheurs ont essayé de réaliser des simulations pour mesurer les effets d'un retrait des États-Unis sur le réchauffement climatique. Selon les projections de l’équipe de chercheurs Climate interactive relayées par l'agence Associated Press, si les États-Unis ne respectent pas leurs engagements, la quantité de gaz à effet de serre augmentera de 3 milliards de tonnes d’équivalent C02 par an d’ici 2030. D’ici la fin du siècle, le pays pourrait alors être responsable d’une hausse de 0,3° C sur celle de 2° à 3°C qui se profile. Selon un deuxième modèle cité par AP et réalisé par Climate action tracker, le réchauffement provoqué par les États-Unis pourrait être un peu moindre, de l'ordre de 0,1 à 0,2 °C.
- Y a-t-il eu des précédents ?
Il n’y a pas eu de précédent similaire dans l’histoire, c’est-à-dire d’un pays qui aurait signé et ratifié un accord sur le climat et qui finalement s’en serait retiré. En revanche, on peut rappeler que les États-Unis avaient signé le protocole de Kyoto mais qu’ils ne l’ont jamais ratifié par la suite.
"L’accord de Paris devait d’ailleurs prendre le relais du protocole de Kyoto et donner une dimension universelle à la lutte contre le changement climatique", décrypte Célia Gautier, responsable des politiques européennes et internationales au sein du Réseau Action Climat, un réseau français d’associations spécialistes des questions climatiques.
En décidant le retrait américain, Donald Trump pourra faire jouer l’article 28 de l’accord sur le climat : cette disposition permet aux signataires de sortir de l'accord, trois ans après son entrée en vigueur, effective le 4 novembre 2016. Les États-Unis devraient donc sortir officiellement de l’accord à l’horizon 2020.
- Quelles conséquences sur les autres pays ?
"Dans cette hypothèse, il pourrait y avoir un effet 'boule de neige' : d’autres pays qui ont ratifié l’accord pourraient être tentés de faire pareil", avertit Célia Gautier. "Il faudrait qu’une coalition de pays, dont la France et des pays du G20 fassent un effort diplomatique pour éviter que le Japon, l’Australie ou l’Arabie saoudite ne soient tentés de revenir sur leurs engagements de 2015. Auquel cas l’accord serait détricoté", décrypte-t-elle.
L’Union européenne et la Chine, principaux émetteurs de CO2, ont rappelé mercredi qu’elles soutiendraient l’accord de Paris sur le climat, quelle que soit la décision du président américain.
Enfin, la position de la Russie sera suivie de près. Le pays a signé l’accord sur le climat mais ne l’a toujours pas ratifié. "La décision de Donald Trump pourrait donner des idées à la Russie. Dans ce cas, on ne tiendrait pas l’objectif des 2°C", conclut Célia Gautier. La Russie est elle le cinquième pollueur mondial.