L'un était chef pâtissier, l'autre fan du club londonien d'Arsenal et des salles de musculation, le troisième employé saisonnier d'un restaurant. L'identité des trois assaillants qui ont tué sept personnes et fait des dizaines de blessés à Londres a désormais été confirmée par la police britannique, lundi. Khuram B., Rachid R. et Youssef Z. ont été tués par les forces de l'ordre huit minutes après le début de leur épopée macabre dans le quartier de Borough market, samedi soir.
Une fausse identité. On sait pour l'instant peu de choses de Rachid R., 30 ans, pâtissier inconnu des services de renseignement britannique. D'après la chaîne RTE, l'homme avait vécu un temps dans le sud de Dublin, en Irlande. En 2011, il y avait épousé une Britannique, avant de rejoindre la Grande-Bretagne. Le couple était ensuite revenu quelques temps en Irlande, en 2016, avant de se séparer. Un flou demeure sur les origines du terroriste, qui aurait prétendu être de nationalité marocaine et libyenne. Il utilisait en outre une autre identité, se présentant parfois sous le nom de Rachid Elkhdar, et affirmant être âgé de 25 ans.
Le profil de Khuram B., Britannique de 27 ans né au Pakistan, se dessinait en revanche avec bien plus de précisions, avant même que son nom ne soit officialisé par la police. Comme Rachid R., l'homme vivait dans le quartier de Barking, dans l'est de Londres, où les enquêteurs ont procédé à plusieurs perquisitions et arrestations ces derniers jours. Auprès des journalistes, ses voisins ont décrit un habitué de la salle de fitness locale, où l'homme, qui portait une barbe mi-longue, aimait soulever de la fonte. Supporter d'Arsenal, il portait le maillot du club londonien lors de l'attaque de samedi.
Des signes de radicalisation. Khuram B. avait deux jeunes enfants, dont une petite fille née "il y a tout juste deux semaines", selon un riverain. "Il était sympathique, mais soudain, il a changé ses habitudes", a encore raconté ce témoin. "Il n'était pas agressif. Mais dernièrement, lui qui avait l'habitude de bavarder ne disait plus que bonjour-bonsoir." Selon la BBC et d'autres médias britanniques, l'homme avait travaillé ces dernières années au service consommateurs d'une chaîne de restauration rapide, ainsi qu'à la régie de transports publics londoniens TFL.
Contrairement à Rachid R., Khuram B. était connu des services antiterroristes britanniques. En 2015, une enquête à son sujet avait été ouverte après un signalement sur une hotline antidjihadiste. D'après le Guardian, l'homme, qui se faisait aussi appeler Abu Zaitun, avait rejoint le groupe islamiste britannique al-Muhajiroun, interdit au Royaume-Uni car soupçonné d'avoir servi de plateforme de recrutement pour une centaine de candidats au djihad. L'an passé, Khuram B. était en outre apparu dans un documentaire de la chaîne de télévision Channel 4 intitulé "Mes voisins les jihadistes", dans lequel on le voyait, en tenue de prière, se recueillir dans un jardin public avec un groupe d'hommes devant un drapeau noir évoquant celui de l'Etat islamique, l'organisation qui a revendiqué l'attentat de samedi.
Un suivi insuffisant ?Selon les informations d'Europe 1, Khuram B. fréquentait une mosquée de Barking et s'y transformait en prédicateur une fois la prière terminée. "On le voyait tout le temps ici. Il restait en bas des marches à parler aux gens", a témoigné un autre fidèle. "L'imam est venu voir ce qu'il se racontait et ensuite la mosquée l'a interdit d'entrée." Deux ans plus tôt, juste avant les dernières élections législatives, l'homme s'était déjà fait remarquer en s'opposant à l'imam pendant le sermon, lui reprochant d'appeler les musulmans à voter au lieu de se soumettre à Dieu.
Pourtant, aucun signe de préparation d'un passage à l'acte n'avait été décelé par les services antiterroristes et "la priorité des enquêtes" est allée à d'autres dossiers, a reconnu Scotland Yard, qui suit simultanément 3.000 personnes signalées pour radicalisation. Un aveu qui a provoqué l'incompréhension, voire la colère de certains Britanniques, mardi. "Pourquoi ils n'ont pas arrêté 'TV djihadi' (le djihadiste de la télé, ndlr)", titrait par exemple le tabloïd The Sun. Et le Telegraph de renchérir : "Il est stupéfiant que des gens qui constituent une telle menace puissent étaler leur idéologie nauséabonde à la télévision sans en subir les conséquences."
Un "foreign fighter". Le profil du troisième terroriste, dont le nom a été confirmé par les autorités un peu après les autres, mardi, devrait continuer de nourrir la polémique : Youssef Z., 22 ans, né à Fez d'un père marocain et d'une mère italienne, avait également été signalé pour sa radicalisation. En mars 2016, l'homme avait été arrêté à l'aéroport de Bologne alors qu'il s'apprêtait à embarquer pour la Turquie, avec un simple sac à dos et sans billet retour. Le soupçonnant de vouloir gagner la Syrie, les policiers avaient alors saisi son passeport et son téléphone portable, dans lequel ils avaient trouvé des images et des vidéos religieuses, mais "rien de significatif en ce qui concerne le fondamentalisme djihadiste" selon le Corriere della Sera, premier média à avoir révélé l'identité du terroriste.
Les services de renseignement italiens l'avaient tout de même signalé comme "foreign fighter" (combattant étranger) potentiel, et avaient signalé sa présence sur le sol italien et ses fréquents déplacements aux autorités marocaines et britanniques. Récemment, Youssef Z. avait trouvé un emploi saisonnier dans un restaurant de Londres.