La Chine veut tout faire pour éviter la propagation du coronavirus. Alors que l’épidémie a fait plus de 300 morts, les autorités ont mis en place des mesures drastiques, avec des contrôles de température omniprésents. À Pékin, les habitants évitent de sortir, sauf pour se ravitailler, par peur d’être contaminés mais également en réaction aux nombreux SMS et mails envoyés par le gouvernement, demandant à la population d’éviter de se déplacer ou encore de bien se laver les mains. Notre correspondant sur place décrit une ambiance quasi apocalyptique dans la capitale chinoise et ses provinces environnantes.
Tout le pays placé en état d’alerte sanitaire
L’hôpital de Ditan est l’un des 20 centres médicaux autorisés à prendre en charge les patients atteints du coronavirus à Pékin. A l’entrée, contrôle de température systématique et port du masque obligatoires. Des dizaines de médecins et d’infirmières en tenue intégrale de protection s’affairent dans les couloirs. L’ambiance est tendue mais le personnel reste calme. "Les patients que nous recevons ne sont pas les plus atteints. Ils n’ont pas de gros problèmes respiratoires. Quand ils arrivent dans mon service on commence par leur administrer un traitement combiné de médecine chinoise et occidentale. En général ça les soulage rapidement", raconte Wang Ling, médecin attaché au service des urgences.
Il n’existe encore aucun vaccin pour éliminer le coronavirus mais certains malades ont pu être guéris après une quinzaine de jours de traitement et une mise en quarantaine très stricte. Ces hôpitaux spécialisés à Pékin comme dans toute la Chine fonctionnent 24h / 24. L’ensemble du pays est désormais placé en état d’alerte sanitaire de niveau 1, le seuil maximum.
La première des urgences, c’est de protéger le personnel soignant. "Il faut d’abord évidemment protéger nos équipes médicales des infections. Nous avons fait un inventaire précis de nos combinaisons et des masques de protection, et le stock pour l’instant est suffisant mais il faudra être réapprovisionnés régulièrement", prévient le médecin Chen, l’un des responsables de l’hôpital de Ditan.
>> A LIRE – Suspension des vols d’Air France vers la Chine : "La priorité est la sécurité de nos clients"
Des appels à la délation dans certaines régions
Si à Pékin, la capitale, la situation semble sous contrôle, à Wuhan, où se trouve le foyer de l’épidémie, le nombre de malades dépasse très largement le nombre de lits dans les hôpitaux. Dans cette province étendue comme la Grande-Bretagne, des dizaines de millions de personnes sont coupées du monde, placées de fait en quarantaine. L’armée a été appelée à la rescousse, avec à la fois des médecins militaires et des forces de sécurité qui contrôlent strictement tous les véhicules. La tension est à son comble.
On y passe en revue chaque véhicule, on regarde s’il y a des animaux vivants qui sont transportés et on vérifie les papiers de tout le monde. On assure aussi la sécurité publique pour être sûrs que tout est calme. Des check points, il y en a des centaines autour de Wuhan. Le gouvernement chinois cherche surtout à éviter la propagation du virus en empêchant des mouvements importants de population.
Des mesures encore plus drastiques ont été prises dans certains villages un peu reculés autour de Pékin, où les étrangers ont carrément interdiction de rentrer et les routes sont bloquées. Dans le Hebei, une province au sud de Pékin, certaines municipalités appellent même à la délation : 2.000 yuans, soit plus de 250€, sont proposés à qui dénoncera un visiteur du Hubei qui ne se sera pas fait connaître...
Dans le Hebei prés de Pékin, une prime de 2000Rmb à ceux qui dénoncent des gens passés par Wuhan et qui ne se sont pas déclarés à la police. Puis ils sont enfermés chez eux. La haine peut-être plus dangereuse encore que la maladie ! pic.twitter.com/BP6MOtyPHA
— Sébastien Le Belzic (@slebelzic) January 28, 2020
Des contrôles de température jusqu’à l’entrée des immeubles d’habitation
A Wuhan, les transports publics sont tous fermés. A Pékin ce n’est pas encore le cas mais il faut passer plusieurs contrôles de température avant de prendre le métro, le bus ou l’avion. Certaines stations de métros autour de la place Tiananmen ont même été fermées. "Nous prenons la température des passagers avec un capteur et s’il a de la fièvre alors il est tout de suite emmené dans une zone de quarantaine. On en trouve à toutes les issues à moins de 30 mètres du point de contrôle", explique cette inspectrice équipée d’un thermomètre frontal.
Même à l’entrée des immeubles d’habitation, des bureaux et des magasins des gardiens en tenue bleue, les visages masqués sont chargés de prendre les températures. Tous les voyages organisés, en Chine et vers l’étranger, sont désormais interdits. Plusieurs compagnies aériennes ont annulé tous leurs vols vers la Chine.
La Chine se referme peu à peu et l’angoisse monte. A Pékin le nombre de touristes a chuté de 80%, alors que la cité interdite est fermée depuis une semaine. Les écoles, les universités, la plupart des usines, des bureaux et des administrations sont fermés jusqu’à nouvel ordre. Comme si le pays entier avait appuyé sur le bouton "pause".