Depuis trois mois, le Venezuela se déchire entre fidèles du chef de l’État Nicolas Maduro et partisans de l’opposant Juan Guaido, autoproclamé président par intérim. Ces derniers jours, la tension entre les deux camps est encore montée d’un cran. Juan Guaido a revendiqué mardi le soutien d’un groupe de militaires, sans pour autant parvenir à rallier le haut commandement de l’armée, toujours fidèle à Nicolas Maduro. Le bras de fer s’est poursuivi dans la rue, avec la mort de plusieurs manifestants lors de violents heurts entre des partisans de Juan Guaido et les forces de l’ordre. Le régime chaviste, acculé de toutes parts et étranglé par une grave crise économique, s’accroche pourtant au pouvoir.
L’échec d’un soulèvement militaire
Engagé dans un bras de fer avec Nicolas Maduro depuis la mi-janvier, Juan Guaido a tenté ces derniers jours d’accentuer la pression autour du régime chaviste en lançant une opération baptisée "Liberté". Le député de centre droit, reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays (dont les États-Unis et une grande partie de l’UE), a revendiqué mardi le soutien d’un groupe de militaires, dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Le chef de file de la contestation anti-Maduro est également apparu au côté d'une autre figure de l'opposition, Leopoldo Lopez, "libéré" par des militaires pro-Guaido alors qu'il se trouvait assigné à résidence depuis 2017.
Mais son appel au soulèvement de l’armée est, lui, resté lettre morte. Cette tentative d’insurrection s’est rapidement dégonflée, les principaux chefs militaires réaffirmant les uns après les autres leur soutien à Nicolas Maduro, qui a dénoncé un coup d’État. "Nous sommes en plein combat, le moral doit être au maximum dans cette lutte pour désarmer tous les traîtres, tous les putschistes", a déclaré, d’un ton martial, le successeur d’Hugo Chavez, jeudi matin devant plusieurs milliers de soldats.
Plusieurs morts lors des manifestations anti-Maduro
L'appel au soulèvement militaire de Juan Guaido a déclenché d'immenses manifestations de soutien, à Caracas et dans plusieurs grandes villes du pays, notamment lors du 1er-Mai. Depuis le début de la mobilisation, mardi, quatre manifestants anti-Maduro sont morts dans des affrontements avec les forces de l’ordre, dont une femme de 27 ans tuée d’une balle dans la tête dans l’est de la capitale.
"On va continuer dans la rue jusqu'à obtenir la liberté", a assuré mercredi Juan Guaido, chemise blanche aux manches retroussées, juché sur un véhicule équipé d'enceintes, avant d’appeler à la grève générale et à poursuivre les manifestations. Mais pour Michael Shifter, président de l'Inter-American Dialogue, qui défend la démocratie en Amérique Latine, ces derniers événements rappellent la tentative ratée de Juan Guaido de faire entrer l'aide internationale au Venezuela en février. "Il est clair que les forces de l'opposition ont sous-estimé l'aptitude de Maduro à conserver le pouvoir et sa capacité à résister à la pression de la rue", a-t-il commenté à l’AFP.
Vénézuéla : des militaires écrasent des manifestants qui manifestent contre Maduro à Caracas https://t.co/EiYY9LF1Jp@T13pic.twitter.com/QwhKQIOxAS
— L'important (@Limportant_fr) 30 avril 2019
Maduro s’accroche, malgré la pression des États-Unis
En coulisses, les soutiens des deux camps continuent de s’affairer. Les États-Unis, pourfendeurs du régime chaviste, mènent depuis trois mois une offensive tous azimuts pour forcer le départ de Nicolas Maduro, soutenu par la Russie, la Chine et l’Iran. L’administration de Donald Trump a imposé des sanctions très sévères à l’encontre du régime chaviste, dont un embargo sur le pétrole, afin d’étrangler un peu plus une économie déjà à genoux. Les États-Unis ont même brandi la menace d’une intervention militaire, mercredi par la voix du secrétaire d’État Mike Pompeo.
Mais la plupart des experts ne croient pas à une intervention américaine. "On peut nous répéter que l'option militaire est sur la table, mais comme elle n'a pas encore été utilisée et que rien n'indique qu'elle résolve les problèmes, je pense que le gouvernement Maduro peut considérer ça comme du bluff", a estimé auprès de l’AFP Ivan Briscoe, directeur du programme Amérique latine pour l'International Crisis Group. Au pouvoir depuis 2013, le successeur d’Hugo Chavez est loin d’avoir abdiqué.