Les séparatistes soutenus par l'armée russe ont affirmé samedi avoir "totalement" encerclé Lyssytchansk, dans l'est de l'Ukraine, un ville clé au coeur d'intenses combats ces derniers jours. "Aujourd'hui, la milice populaire de Lougansk (l'armée séparatiste, ndlr) et les forces armées russes ont occupé les dernières hauteurs stratégiques, ce qui nous permet d'affirmer que la localité de Lyssytchansk est totalement encerclée", a indiqué un représentant de l'armée séparatiste de Lougansk, Andreï Marotchko, cité par l'agence de presse russe TASS.
Lyssytchansk est la dernière grande ville de la région de Lougansk contrôlée par l'armée ukrainienne. Elle est jumelle de celle de Severodonetsk, conquise la semaine dernière par Moscou après le retrait des forces ukrainiennes à l'issue d'une bataille de plusieurs semaines. Les deux villes sont séparées par la rivière Donets.
La prise de Lyssytchansk permettrait à l'armée russe d'avancer ensuite vers Sloviansk et Kramatorsk, deux autres grandes villes de la région industrielle du Donbass, que Moscou cherche à conquérir.
Au moins 21 morts dans des frappes aériennes à Odessa
Au moins 21 personnes ont été tuées dans des frappes de bombardiers stratégiques en pleine nuit sur des immeubles de la région d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, a affirmé Kiev vendredi, un nouvel acte de "terreur" russe selon le président Volodymyr Zelensky.
D'après le commandement ukrainien du front sud, ce sont des Tupolev Tu-22, des avions datant de la Guerre froide et conçus pour emporter des charges nucléaires, qui ont lâché de la mer Noire des missiles Kh-22 contre des bâtiments civils d'une petite ville côtière au sud d'Odessa. "L'ennemi a frappé de trois missiles le village de Serguiïvka, dans le district Belgorod Dnistrovsky. Un grand immeuble a été détruit ainsi qu'un complexe touristique", a expliqué sur Telegram le gouverneur régional, Maksym Martchenko.
"Vingt-et-une personnes ont été tuées, dont un garçon de 12 ans. Trente-huit sont à l'hôpital, dont cinq enfants. Deux enfants sont dans un état grave", a-t-il précisé. "Il n'y avait pas la moindre cible militaire" à cet endroit, a-t-il souligné.
Les informations à retenir :
- Au moins 21 personnes tuées lors de frappes dans la région d'Odessa
- L'Otan promet un soutien indéfectible à l'Ukraine en clôture du sommet de Madrid
- Kiev exporte de l'électricité vers l'UE
Soutien indéfectible de l'Otan
Cette frappe est intervenue alors que l'Otan a promis son soutien indéfectible à l'Ukraine en clôturant jeudi son sommet à Madrid. "Nous allons rester aux côtés de l'Ukraine et toute l'Alliance restera aux côtés de l'Ukraine aussi longtemps qu'il le faudra pour assurer qu'elle ne soit pas battue par la Russie", a déclaré Joe Biden. "Je ne sais pas comment ou quand cela va finir", a ajouté le président américain, affirmant toutefois : "Cela ne se finira pas par une défaite de l'Ukraine."
Plusieurs États membres de l'Otan ont annoncé de nouvelles aides militaires à l'Ukraine : le Premier ministre britannique Boris Johnson s'est engagé sur une rallonge d'un milliard de livres (1,16 milliard d'euros), Joe Biden sur 800 millions de dollars supplémentaires. Pour sa part, le président français, Emmanuel Macron, a prévu la révision de la programmation militaire de son pays, soulignant que "nous devons maintenant, entrant dans une période de guerre, savoir produire plus vite, plus fort certains types d'équipements".
Moscou a rétorqué par la voix de son ministre des Affaires étrangères : "Le rideau de fer, de fait, il est déjà en train de s'abattre", a-t-il dit, reprenant cette image née avec la Guerre froide et qui était rapidement tombée en désuétude après la chute du mur de Berlin en 1989.
Il réagissait à la feuille de route stratégique que venait d'adopter l'Alliance atlantique et qui désigne désormais la Russie comme étant "la menace la plus significative et directe pour la sécurité des alliés". Et ce, tout en dénonçant les tentatives de Moscou et de Pékin d'unir leurs efforts pour "déstabiliser l'ordre international".
Les Russes quittent l'île aux Serpents
Sur le front, l'Ukraine s'est félicité du départ des forces russes de l'île aux Serpents, qu'elles avaient prise dès les premières heures de leur offensive, une victoire hautement symbolique pour Kiev. Moscou a affirmé retirer ses troupes "en signe de bonne volonté", ses objectifs ayant été "atteints" et pour faciliter les exportations de céréales ukrainiennes d'Ukraine par la mer Noire. Cet îlot militarisé est situé au sud-ouest d'Odessa, le plus grand port ukrainien où ont été amassées des millions de tonnes de grains, et face à l'embouchure du Danube.
La version des militaires ukrainiens est radicalement différente : les Russes ont abandonné l'île aux Serpents parce qu'ils se sont retrouvés "dans l'incapacité de résister au feu de notre artillerie, de nos missiles et de nos frappes aériennes". "L'ennemi s'est enfui dans deux vedettes", laissant "en feu" cet îlot où "des explosions se font toujours entendre", ont-ils encore dit, précisant qu'ils allaient maintenant y rétablir un "contrôle physique direct". "Les Russes eux-mêmes, durant leur retraite, ont fait exploser" leurs propres équipements militaires "et perdu un hélicoptère en mer", a indiqué l'armée ukrainienne.
"L'île aux Serpents est un point stratégique et cela change considérablement la situation en mer Noire (...). Cela ne garantit pas encore que l'ennemi ne reviendra pas. Mais cela limite déjà considérablement les actions des occupants", a martelé dans la soirée le président Voldymyr Zelensky. En revanche, le président a admis que la situation demeurait "extrêmement difficile" à Lyssytchansk, ville du bassin industriel du Donbass, une région de l'est de l'Ukraine où se concentrent la majeure partie des combats.
Lyssytchansk est la dernière grande cité à ne pas être encore aux mains des Russes dans la région de Lougansk, l'une des deux provinces du Donbass, que Moscou entend entièrement contrôler. À Kherson, dans le sud, des hélicoptères ukrainiens ont frappé "une concentration de troupes et équipement militaires de l'ennemi", près de la commune de Bilozerka, a indiqué vendredi l'armée ukrainienne. Cette attaque a fait "35 morts" parmi les soldats russe et détruit deux chars et plusieurs autres véhicules blindés, selon la même source.
Kiev exporte de l'électricité vers l'UE
Sur le front de l'énergie, l'Ukraine a annoncé avoir commencé à exporter de l'électricité de manière "significative" vers l'Union européenne, via la Roumanie. "Une étape importante de notre rapprochement avec l'Union européenne a été franchie" jeudi, a déclaré le président de l'Ukraine, dont la candidature à l'UE a été entérinée la semaine dernière par les Vingt-Sept. Kiev "a commencé à exporter de manière significative de l'électricité vers le territoire de l'UE, vers la Roumanie", a-t-il affirmé dans une allocution vidéo, et "ce n'est qu'une première étape".
"Nous nous préparons à augmenter les livraisons", a-t-il ajouté, en soulignant que "l'électricité ukrainienne peut remplacer une part considérable du gaz russe consommé par les Européens. "Ce n'est pas seulement une question de revenus d'exportation pour nous, c'est une question de sécurité pour l'Europe entière", a-t-il insisté. Le réseau électrique ukrainien avait été connecté au réseau européen mi-mars, ce qui devait aider le pays à préserver son fonctionnement malgré la guerre.
L'Ukraine était synchronisée avec le réseau électrique russe jusqu'à son invasion le 24 février et avait ensuite fonctionné de manière autonome. "À partir d'aujourd'hui, l'Ukraine peut exporter de l'électricité vers le marché de l'UE", a tweeté de son côté jeudi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. "Cela apportera une source supplémentaire d'électricité pour l'UE. Et des revenus indispensables à l'Ukraine. Nous sommes donc tous deux gagnants", a-t-elle fait valoir.