Au 106e jour du conflit en Ukraine, les autorités séparatistes prorusses ont annoncé jeudi la condamnation à mort de deux Britanniques et un Marocain ayant combattu aux cotés des Ukrainiens. "La Cour suprême de la République populaire de Donetsk a condamné à mort les Britanniques Aiden Aslin et Shaun Pinner et le Marocain Brahim Saadoun, accusés d'avoir participé aux combats comme mercenaires", a annoncé l'agence de presse officielle russe TASS. Même si les trois hommes - faits prisonniers dans la région de Marioupol, selon les Russes - vont faire appel, selon TASS, le Royaume-Uni s'est dit "gravement préoccupé" par cette annonce.
Cette condamnation est intervenue sur fond de bataille de plus en plus sanglante pour la ville-clé de Severodonetsk, dans l'est de l'Ukraine.
Les principales informations :
- Deux Britanniques et un Marocain condamnés à mort
- Les Russes peinent à prendre le contrôle de Severodonetsk
- Pas de proposition concrète sur les céréales
- Au moins 4.200 civils tués depuis le début du conflit
La Russie affirme avoir tué "des centaines" de combattants étrangers
"Nous sommes évidemment gravement préoccupés. Nous répétons que les prisonniers de guerre ne devraient pas être exploités pour des raisons politiques", a affirmé un porte-parole du Premier ministre Boris Johnson. Quatre militaires volontaires étrangers dont un Français ont été tués en combattant l'invasion russe en Ukraine, selon la Légion internationale pour la défense de l'Ukraine (LIDU), organisme officiel des combattants volontaires étrangers.
La Russie, qui dénonce fréquemment la présence de ces mercenaires, a elle affirmé cette semaine avoir tué "des centaines" de combattants étrangers depuis le début de son invasion le 24 février, et endigué le flux de nouveaux arrivants. Le nombre exact de ces étrangers n'est pas connu. Début mars, peu après le début de l'invasion russe le 24 février, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait affirmé que 16.000 étrangers s'étaient portés volontaires, un chiffre invérifiable de source indépendante.
Russes et séparatistes peinent à prendre Severodonetsk
Cette annonce survient alors que les Russes et les séparatistes peinent à prendre le contrôle total de la ville de Severodonetsk, pilonnée depuis plusieurs semaines. C'est l'une des "batailles les plus difficiles" depuis le début de la guerre, a indiqué mercredi soir le président Volodymyr Zelensky. "A bien des égards, le sort de notre Donbass se décide là", a-t-il ajouté.
Prendre cette ville ouvrirait à Moscou la route d'une autre grande ville du Donbass, Kramatorsk, et marquerait une étape importante pour conquérir l'intégralité de cette région frontalière de la Russie, en partie tenue par des séparatistes prorusses depuis 2014.
L'Ukraine demande une livraison d'armes pour défendre Severodonetsk
L'Ukraine pourrait toutefois reprendre Severodonetsk "en deux, trois jours", dès qu'elle disposera d'armes d'artillerie occidentales "de longue portée", a assuré jeudi Serguiï Gaïdaï, gouverneur de Lougansk, l'une des deux régions du Donbass. Les Ukrainiens ne cessent de réclamer à leurs alliés occidentaux des armes plus puissantes que celles de moindre portée dont ils disposent.
La livraison de systèmes de lance-roquettes multiples, d'une portée d'environ 80 km, soit légèrement supérieure aux systèmes russes, a été annoncée par Washington et par Londres, mais on ignore quand les Ukrainiens pourront commencer à les utiliser.
Kiev déplore chaque jour "jusqu'à 100 soldats" tués
En attendant ces armes, Kiev déplore chaque jour "jusqu'à 100 soldats" tués et "500 blessés" dans les combats avec l'armée russe, a déclaré jeudi le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov. La semaine dernière, Severodonetsk semblait sur le point de tomber aux mains de l'armée russe, mais les troupes ukrainiennes ont contre-attaqué, malgré leur infériorité numérique. Les forces russes ont regagné du terrain depuis, et contrôlaient mercredi soir "une majeure partie" de la ville, selon le gouverneur ukrainien.
Lyssytchansk, ville voisine de Severodonetsk, reste entièrement contrôlée par l'armée ukrainienne mais subit elle aussi des bombardements "puissants", a encore déclaré le gouverneur Gaïdaï, accusant les forces russes de viser "délibérément" les hôpitaux et les centres de distribution d'aide humanitaire.
Les Russes bombardent aussi intensément la région de Donetsk, l'autre partie du Donbass, "sur tout le long de la ligne de front", avec notamment des attaques sur les villes de Sloviansk et Bakhmout, selon Kiev, qui a recensé quatre morts et 11 blessés au cours des dernières 24 heures. Selon un expert militaire occidental, même s'il est "probable" que les Russes finiront par prendre Severodonetsk, "il est clair que l'offensive russe continue à rencontrer beaucoup de problèmes à tous les niveaux".
Le risque d'une "vague sans précédent de faim et de misère"
Plus de 100 jours après le début l'offensive russe, les conséquences négatives de la guerre continuent de s'aggraver dans le monde, a alerté mercredi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. "Pour les populations du monde entier, la guerre menace de déclencher une vague sans précédent de faim et de misère, laissant dans son sillage le chaos social et économique", a averti Antonio Guterres. "Il n'y a qu'un seul moyen d'arrêter cette tempête qui se prépare: l'invasion russe de l'Ukraine doit cesser".
Le blocage des ports ukrainiens par la flotte russe de la mer Noire, à commencer par le principal port, Odessa, paralyse ses exportations de céréales, notamment de blé, dont elle était avant la guerre en passe de devenir le troisième exportateur mondial. Des pays africains et moyen-orientaux sont les premiers touchés et craignent de graves crises alimentaires.
Zelensky demande l'exclusion de la Russie de la FAO
Le président Zelensky a demandé jeudi l'exclusion de la Russie de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). "Quelle y serait la place de la Russie si elle provoque la famine pour au moins 400 millions de personnes, voire plus d'un milliard?", a-t-il lancé dans un discours en visioconférence lors d'une réunion ministérielle de l'OCDE.
Interrogée, la FAO n'a pas immédiatement réagi à cet appel. Sous l'effet de la guerre, les crises alimentaires se sont aggravées, avec pour conséquence attendue en 2022 une hausse de la facture pour les pays importateurs, due à la flambée des prix des céréales et des engrais, a-t-elle cependant averti dans un rapport publié jeudi.
Pas de proposition concrète pour les céréales
Alors que Moscou accuse les sanctions occidentales d'avoir déclenché cette crise qui fait flamber les prix alimentaires, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a rencontré mercredi son homologue turc Mevlut Cavusoglu à Ankara pour discuter de "corridors maritimes sécurisés" qui permettraient de reprendre les transports de céréales en mer Noire. Aucune proposition concrète n'a cependant été annoncée après leurs discussions.
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Une inflation de 17,1% en Russie sur un an
La hausse des prix touche aussi de plein fouet la Russie, où l'inflation avait connu en avril une hausse vertigineuse jusqu'à battre un record de 20 ans. Malgré un recul en mai, elle atteint 17,1% sur un an, selon des données officielles. L'Institut de la Finance internationale (IFF) prévoit une contraction de l'économie russe de 15% cette année et de 3% supplémentaires en 2023. Pour l'Ukraine, le Produit intérieur brut a déjà chuté de 15,1% au premier trimestre 2022 par rapport à la même période l'année dernière, selon des données publiées jeudi par le service ukrainien des statistiques.
Au moins 4.200 civils tués depuis le début de l'invasion
La guerre a fait des milliers de morts : au moins 4.200 civils, selon le dernier bilan de l'ONU, qui estime les chiffres réels "considérablement plus élevés", et des milliers de militaires, même si les belligérants communiquent très rarement sur leurs pertes. Le conflit a conduit quelque 6,5 millions d'Ukrainiens à fuir leur pays. Près de 5 millions ont été enregistrés comme réfugiés à travers l'Europe depuis le 24 février, a indiqué jeudi le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) de l'ONU.