Cinq jours après son apparition surprise à Beyrouth, les circonstances de l'évasion de Carlos Ghosn du Japon commencent à se préciser. Assigné à résidence au Japon après 130 jours en prison, il devait être jugé à partir d'avril 2020 pour malversations financières. Jeudi matin, après plusieurs jours de stupéfaction, les procureurs de Tokyo ont perquisitionné l'ex-domicile de Carlos Ghosn pour tenter de comprendre comment l'homme le plus surveillé du pays avait pu passer entre leurs griffes.
Un passeport français enveloppé dans un sac fermé
Faux passeport, vrai passeport, avion 'rerouté', toutes les hypothèses sont désormais explorées puis analysées à Tokyo. Première découverte : selon la chaîne de télévision publique japonaise NHK, Carlos Ghosn disposait depuis mai dernier, à la connaissance de son juge, d'un second passeport français enveloppé dans un sac fermé dont son avocat détenait la clé. Lui a-t-il servi à passer l'immigration japonaise ? L'immigration turque ? L'immigration libanaise ?
Le ministère des transports a par ailleurs confirmé qu'un jet privé était parti d'Osaka le weekend du 28-29 décembre pour atterrir à Istanbul, sans indiquer qui était à bord. D'après le quotidien turc Hürriyet, l'homme de 65 ans est soupçonné d'avoir atterri à l'aéroport Atatürk, aujourd'hui fermé aux vols commerciaux mais encore utilisé par des appareils privés, et d'en être reparti vers le Liban peu de temps après à bord d'un autre jet privé. Une source dans son entourage a démenti qu'il se serait enfui caché dans une caisse d'instrument de musique, comme l'avait affirmé un média libanais.
Perquisitions au Liban
La fuite de Carlos Ghosn du Japon constitue un spectaculaire rebondissement dans une affaire hors normes qui a vu la chute de l'un des plus puissants patrons de l'automobile. Il fait l'objet de quatre inculpations, deux pour des revenus différés non déclarés aux autorités boursières par Nissan (qui est aussi poursuivi sur ce volet) et deux autres pour abus de confiance aggravé. L'homme d'affaires, détenteur des nationalités libanaise, française et brésilienne, a toujours nié toutes ces accusations, assurant avoir fui un "système judiciaire japonais partial".
Des enquêtes ont été ouvertes au Japon et en Turquie sur les circonstances de sa fuite. Des perquisitions ont également eu lieu jeudi matin au Liban, qui a ensuite reçu une demande d'arrestation d'Interpol. Tandis qu'en France, la Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Economie, Agnès Pannier-Runacher, a affirmé que "Carlos Ghosn ne sera pas extradé s'il revient en France".