Le directeur de la publication de l'hebdomadaire satirique, Charlie Hebdo, Charb, est mort dans l'attaque des locaux de l'hebdomadaire satirique, mercredi matin, dans le XIe arrondissement de Paris. Depuis mai 2009 et son arrivée au poste de directeur de la publication, Charb était l'incarnation et le porte-voix de l'hebdo satirique.
Ses dessins, à l'humour corrosif et à l'irrévérence marquée, ont fait sa renommée. Son ironie n'avait aucune limite. En novembre 2011, à la veille de la publication d'un numéro spécial retitré pour l'occasion Charia Hebdo, le siège de l'hebdomadaire avait été visé par un cocktail molotov et le site Internet piraté. A la suite de cet incident, la rédaction avait été hébergée pendant deux mois à Libération. L'enquête n'avait jamais permis d'identifier les coupables. "Je crains qu’il n’y ait aucune autre piste que celle qui paraît la plus évidente, c’est-à-dire l’œuvre vengeresse d’extrémistes musulmans", avait considéré Charb dans un entretien à La Revue civique. En septembre 2012, l'hebdo avait publié à nouveau des caricatures de Mahomet, comme il l'avait déjà fait en 2006 à l'époque de Philippe Val. Un mois plus tard, Charb était revenu au micro d'Europe 1 sur ses incidents, justifiant sa position.
Après ces incidents, Charb avait conservé son ton satirique et jusqu'au-boutiste, qui marquait déjà les débuts de l'hebdo sous la houlette du professeur Choron. Dans le Charlie Hebdo de cette semaine, le caricaturiste avait ainsi signé un nouveau dessin qui prend évidemment une toute autre résonance après les terribles événements de mercredi.
Charb dans le Charlie Hebdo de la semaine. pic.twitter.com/jb2rcR5W8H— Alexandre Hervaud (@AlexHervaud) January 7, 2015
Les extrémistes musulmans n'étaient pas la seule cible de l'humour de Charb. Ainsi, le dernier numéro hors-série de Charlie Hebdo abordait "la véritable histoire de Petit Jésus"...
Né en 1967 à Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines, Charb, de son vrai nom Stéphane Charbonnier, avait débuté sa carrière en participant à différentes publications, dont L'Echo des savanes, Télérama, Fluide Glacial ou L'Humanité. Il avait notamment recours au strips, courtes bandes dessinées le plus souvent horizontales, dans lesquelles il dessinait régulièrement Maurice et Patapon, chien et chat anticapitalistes. Car Charb ne s'attaquait pas seulement frontalement aux religions, il était également un militant de gauche. Il a longtemps été un soutien du parti communiste français puis du Front de gauche, pour lequel il s'était même engagé lors d'élections. Il a également participé à des campagnes pour des associations antiracistes, comme le montre cette affiche du Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap).
En 2007 et 2008, Charb avait apporté son humour sans concession sur le plateau de l'émission de France 3 présentée par Marc-Olivier Fogiel, T'empêches tout le monde de dormir. Charb a également publié plusieurs bandes dessinées en librairie, dont certaines reprenaient le titre de sa rubrique dans Charlie Hebdo (Charb n'aime pas les gens), comme J'aime pas les fumeurs ou J'aime pas la retraite. Quels que soient ses projets, Charb a toujours revendiqué une liberté de ton totale. "La plupart du temps, on respecte la loi", expliquait-il en 2012 dans une interview à France 3. "On a l'impression qu'on va trop loin, mais on va jusqu'au bout de ce que nous permet la loi. Et, quand les journalistes ou nos confrères nous disent : 'quand même, vous êtes allés un peu loin'... Mais ce sont eux qui ne vont pas assez loin. Il y a une liberté de la presse totale ou quasiment totale en France (...), mais un journaliste qui fait son boulot normalement n'a aucune raison d'être poursuivi devant les tribunaux. (...) Et je vois avec tristesse qu'il y a énormément de confrères qui n'osent pas aller trop loin de peur du procès." Charb, lui, n'a jamais eu peur d'oser.
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