Depuis plusieurs semaines, Twitter se montrerait bien plus permissif avec les propagateurs de contenus haineux et de fausses informations. C'est en tout cas la conclusion qu'en a tirée Marianna Spring, journaliste pour la BBC. Comme le rapporte BFMTV, le média britannique a publié ce lundi une grande enquête sur les difficultés rencontrées par les salariés de la plateforme pour modérer les publications. En conséquence, les utilisateurs peu scrupuleux auraient quasiment carte blanche pour publier tout ce qui leur passe par la tête, y compris des messages nuisibles.
Une impression confirmée par l'université de Sheffield qui a épluché les propos haineux tenus sur Twitter à l'encontre de Marianna Spring en personne. Et le constat est sans appel. Les abus dont a été victime la journaliste auraient plus que triplé depuis que le milliardaire Elon Musk a pris les commandes du réseau social en octobre dernier.
Une vague de licenciements
L'action menée par le propriétaire de Tesla au sein de Twitter pourrait en effet expliquer en partie cette prolifération des contenus problématiques sur le réseau. Le fondateur de SpaceX n'a jamais caché son désir de "rétablir" la liberté d'expression sur Twitter. "Le roc sur lequel on bâtit une démocratie", selon lui. Un leitmotiv qui l'a d'ailleurs poussé à réactiver le compte de l'ancien président américain Donald Trump qui avait été banni du réseau après l'assaut du Capitole à Washington en janvier 2021.
Pour ce faire, le fantasque milliardaire a procédé à une vague spectaculaire de licenciement dans les bureaux de Twitter. En janvier dernier, BFMTV indiquait que le grand ménage avait notamment visé le personnel en charge de la désinformation et du harcèlement en ligne. Une réduction drastique des effectifs, également constatée par la BBC qui a rencontré plusieurs salariés de la plateforme à San Francisco en Californie.
Sous couvert d'anonymat, un ingénieur fait appel à une métaphore pour décrire une forme de chaos. "Twitter, c'est comme un bâtiment où toutes les pièces sont en feu. Quand on le regarde de l'extérieur, la façade a l'air impeccable. Mais en réalité, rien ne fonctionne. Toute la plomberie est cassée, les robinets, tout", assure-t-il. Et de déplorer une dégradation des conditions de travail. "Une personne totalement nouvelle, sans l'expertise, fait ce que faisaient auparavant plus de 20 personnes. Cela laisse beaucoup plus de risques, beaucoup plus de possibilités pour que des choses puissent mal tourner", regrette-t-il.
Une fonctionnalité permettant de limiter les contenus haineux, supprimée
La BBC a également pu échanger avec Lisa Jennings Young, l'une des employés mis à la porte par Elon Musk. La développeuse était spécialisée dans l'introduction de fonctionnalités conçues pour protéger les internautes de la haine en ligne. Un poste désormais vacant selon elle. "Il n'y a personne pour travailler là-dessus en ce moment". Pis, la fonctionnalité permettant de signaler à un utilisateur la présence de termes haineux dans le tweet qu'il s'apprête à publier, a été purement et simplement supprimée selon elle. Cette option avait été lancée par ses équipes juste avant le plan de licenciement massif.
Les quelques digues permettant de limiter ces messages indésirables semblent donc céder les unes après les autres. Dans son enquête, la BBC révèle que les créations de comptes à vocation misogynes ou abusives ont bondi de 69%. Contacté par le média britannique, Twitter n'a pas donné suite.