"Si une fenêtre de tir se présentait, elle serait saisie par le gouvernement". En une phrase, François Baroin a déterré, lundi soir sur i-Télé, la possibilité d’un vote sur la règle d’or* avant la présidentielle de 2012.
Dossier "piège" pour la gauche, cette fameuse "règle" sur le retour à l’équilibre budgétaire avait longuement occupé l’agenda politique l’été dernier, avant d’être repoussée à l’après-présidentielle. Le gouvernement avait ainsi renoncé à convoquer, en septembre, le Congrès (Assemblée nationale et Sénat), ne disposant pas de la majorité des 3/5e requise en cas de modification de la Constitution.
Mais voilà, la mise sous surveillance, lundi, de la France et de plusieurs pays européens, par l’agence de notation Standard and Poor’s, a changé la donne. Plus que jamais menacée de perdre son AAA, la France doit trouver "une union nationale" pour adopter cette règle d’or, a martelé le ministre de l’Economie.
Une opportunité politique pour la droite
Peu avant lui, Nicolas Sarkozy avait également réaffirmé, à l’issue d’un mini-sommet franco-allemand à l'Elysée, sa volonté de faire inscrire cette règle dans les traités européens.
En somme, "ce qu'il n'a pas été en capacité d’obtenir au niveau national, il cherche à l'obtenir au niveau européen", a alors commenté Michel Sapin, chargé du projet présidentiel de François Hollande, relevant qu’Angela Merkel et Nicolas Sarkozy avaient prévu une signature du traité en mars mais une ratification "après la présidentielle et les législatives
"Je vois bien qu'il fait de tout cela une question électorale, ça ne le grandit pas", a encore fustigé l’élu socialiste.
Le gouvernement tend-il un piège au PS ?
Si les socialistes enragent ainsi, c’est que le dossier est politiquement miné pour eux. Si le PS inflige un camouflet au gouvernement lors du vote du Congrès, Nicolas Sarkozy pourra toujours affirmer à une opinion publique française de plus en plus consciente de la gravité de la crise de la dette dans la zone euro, que l'opposition socialiste est "irresponsable".
"La règle d’or est un des rares sujets où Sarkozy puisse pousser un avantage face à Hollande", analyse ainsi le politologue Gaël Sliman de l’agence BVA, avant d’ajouter : "Les Français, à chaque fois qu'on les sonde, sont - à une très nette majorité - favorables (à environ 70%) à cette règle d’or. Nicolas Sarkozy va avancer l'argument selon lequel les socialistes ne seraient pas respectueux des finances publiques".
Un argument que n’a pas manqué d’invoquer Jean-François Copé, invité mardi de la matinale d’Europe 1 : "Aujourd'hui, voilà les socialistes à nouveau invités à la table des responsabilités (…) François Hollande est-il prêt à dire, compte tenu que l'intérêt supérieur de la France et l'Europe l'exige : nous allons voter cette règle d'or parce que dans ces moments, le consensus grandit chacun et chacun qui y participe ?" Et le match ne fait que commencer.
*Derrière ce nom métaphorique se cache un projet de loi de réforme constitutionnelle. Son but est clair :maintenir dans la durée l'effort de lutte contre les déficits (Lire le texte de la réforme). Comment ? Le texte prévoit d'inscrire dans la Constitution des "lois cadres d'équilibre des finances publiques". Ce qui signifie qu'elle s'appliquerait à la fois au budget de l'Etat et à celui de la Sécurité sociale. En savoir plus en cliquant ici.