Pour paraphraser Lionel Jospin au soir du 21 avril 2002, les résultats des élections européennes de dimanche ont sonné comme un coup de tonnerre. Comme redouté - ou espéré - le scrutin a été marqué par une vague eurosceptique, dont l’illustration la plus spectaculaire est sans conteste le résultat du FN, arrivé en tête en France. Dans l’Hexagone d’ailleurs, cette élection laissera sans aucun doute des traces en termes de politique nationale. Car le Parti socialiste a pris une nouvelle claque qui met une fois de plus dans l’embarras le couple exécutif. Et que dire de l’UMP, désormais plongée dans une crise ouverte. Europe1.fr tire les cinq enseignements majeurs d’un scrutin d’ores et déjà historique.
• Le FN premier parti de France
Il y avait le 21 avril 2002, il y aura désormais le 25 mai 2014. Il y a douze ans, Jean-Marie Le Pen parvenait à se qualifier au second tour de l’élection présidentielle, créant une onde de choc dans la politique française. Celle ressentie dimanche soir à l’annonce des résultats est autrement plus importante. Avec 25% des suffrages exprimés, le FN a tout bonnement écrasé le scrutin. Jamais, dans son histoire, le parti présidé par Marine Le Pen n’avait dépassé les 20% de voix à une élection nationale. Jamais non plus il ne s’était porté en tête à l’issue d’une telle consultation. C’est désormais une réalité : le FN est actuellement le premier parti de France. Une sentence qu’il faudra s’habituer à entendre de la bouche des leaders frontistes. Incontestables grands gagnants de la soirée.
• L’UMP en lambeaux
La perspective des élections européennes avait permis à l’UMP de garder un semblant d’unité. La digue a sauté dès dimanche soir, juste après la proclamation des résultats. En tête, Jean-François Copé aurait eu une chance de sauver les meubles. Deuxième et largement distancé par le FN, le président de l’UMP est au mieux fragilisé, au pire condamné. Laurent Wauquiez, Alain Juppé, Nathalie Kosciusko-Morizet ont tour à tour réclamé en place publique que leur parti, et implicitement son dirigeant, tire les conséquences de cette défaite.
Et François Fillon, le meilleur ennemi de Jean-François Copé, s’est également fendu d’une déclaration emplie de solennité. "L'UMP (...) est atteinte dans sa crédibilité et doit s'interroger sur les raisons de son échec. Elle n'a pas été en mesure de rassembler et son honneur est mis en cause", a lancé l’ancien Premier ministre. L’UMP doit tenir mardi matin un bureau politique, durant lequel le patron de l’UMP devra s’expliquer sur l’affaire Bygmalion. C’est ni plus ni moins que la survie même de la formation de droite qui sera en jeu.
• Une majorité à la dérive
L’UMP n’est pas la seule à avoir été ébranlée par le scrutin. Le Parti socialiste en a été quitte pour une nouvelle déroute historique, deux mois après des élections municipales catastrophiques. Les listes PS-PRG recueillent, selon le dernier décompte officiel, 13,98% des voix, soit 0,5 point de moins que le score enregistré en 1994 par la liste socialiste menée par Michel Rocard (14,48%). "Ce scrutin est plus qu'une nouvelle alerte, c'est un choc, un séisme", a reconnu Manuel Valls. Et ce n’est pas le score des écologistes (8,92%), en très nette baisse par rapport à 2009 (16,5 %), qui consolera l’exécutif.
Dans l'entourage de François Hollande, on reconnaît que "des leçons doivent être tirées" de ce qui constitue un "événement majeur". Au point que dès 8h30, se tient une réunion de crise à l’Elysée en présence du président de la République, du Premier ministre, ainsi que de plusieurs ministres. Même si Manuel Valls a répété que le gouvernement ne changerait pas de politique, des annonces pourraient subvenir à l’issue de cette réunion.
• Une abstention moins forte que prévue
En la matière, on s’attendait à pire. L’abstention était annoncée à un niveau record, elle est finalement en légère baisse par rapport à 2009. A l’époque, 57% des quelque 400 millions d’électeurs européens avaient boudé les urnes. Cette fois, ils ne sont que "56,89%" à s’être abstenus. Même phénomène en France. L’abstention a certes été massive, de l’ordre de 58% selon les estimations, mais moins qu’en 2009 (59,5%)
• Une vague d’eurosceptiques dans l’Union
La victoire du FN en France n’est finalement que la partie, certes imposante, de l’iceberg eurosceptique. Un bloc certes difficiles à quantifier, car loin d’être homogène, mais en incontestable augmentation. Au total, les eurosceptiques ou europhobes disposent potentiellement de 143 députés, selon des résultats provisoires du Parlement européen. Des élus qui devraient au final être largement morcelés, mais qui auront le même souci de bloquer l’institution.
A côté de cela, la victoire des conservateurs, qui conservent la majorité au Parlement et réclament désormais que leur candidat, Jean-Claude Juncker, soit élu à la présidence de la Commission européenne, paraît presque dérisoire.
PROJECTION - Voilà à quoi va rassembler le Parlement européen
TOUR D'HORIZON - Européennes 2014 : comment ont voté nos voisins ?
ESSENTIEL - Tendances et résultats du scrutin
PARTICIPATION - En hausse par rapport à 2009