"En Syrie, il y a urgence". Dans un discours devant l'Assemblée générale des Nations unies, mardi, François Hollande a, une nouvelle fois, demandé au Conseil de sécurité de l'ONU de voter une résolution incluant des "mesures coercitives" pour obliger le régime de Bachar al-Assad à renoncer à son arsenal chimique.
Alors que François Hollande a fait de la crise syrienne une priorité, Europe1.fr s'est intéressé à la garde rapprochée du président sur ce dossier. Des ministres, des diplomates, des militaires de haut rang et Valérie Trierweiler, Première dame révoltée après l'attaque chimique perpétrée le 21 août dans la banlieue de Damas.
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La politique de la France à l'égard de la Syrie se décide ici. Dans le bureau de François Hollande où le plus proche collaborateur du président Pierre-René Lemas passe une tête régulièrement. Lors des conseils de défense et conseils de défense restreints, c'est le salon vert, situé au premier étage de l'Elysée, qui est réquisitionné. Pendant ces réunions ultra-confidentielles, on déplie des cartes, on élabore des stratégies, on pose sur la table les différentes options militaires.
François Hollande. Le président suit la situation en Syrie de très près depuis l'été 2012. En novembre, il devient ainsi le premier chef d'Etat à reconnaître la Coalition nationale syrienne "comme le futur gouvernement de la Syrie démocratique, permettant d'en terminer avec le régime de Bachar Al-Assad". Le massacre chimique du 21 août 2013 renforce la détermination du président à agir militairement en Syrie. Ses collaborateurs s'en souviennent encore. En visionnant les images insoutenables des populations gazées, François Hollande, indigné, avait laissé éclater sa colère : "On ne peut pas laisser faire ça ! Un temps envisagé, l'option militaire avec les alliés américain et anglais a été suspendue après le refus du parlement britannique d'entrer en guerre et le revirement de Barack Obama. Aujourd'hui, après l'accord entre les Etats-Unis et la Russie sur le démantèlement de l'arsenal chimique syrien, la diplomatie a repris le dessus. Mais François Hollande entend maintenir la pression sur Bachar al-Assad en obtenant une résolution forte de l'ONU. Un objectif loin d'être garanti.
Pierre-René Lemas. Le secrétaire général de l'Elysée est le bras droit de François Hollande. Celui qui "voit tout" et par "qui tout passe". "Il ne peut y avoir une note ou une information qui lui échappe", résumait Le Monde dans un portrait qui lui était consacré, en octobre 2012. Pierre-René Lemas, 61 ans, fumeur invétéré, est un très proche du président - les deux hommes sont issus de la désormais célèbre promotion Voltaire de l'ENA. Signe de son importance dans la galaxie hollandaise, le secrétaire général de l'Elysée est assis à la droite du président, lors des conseils de défense et conseils de défense restreints. A l'issue de chacune de ces réunions, Pierre-René Lemas rédige une synthèse à l'attention de François Hollande.
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Ce sont les seuls à avoir participé au conseil de défense restreint qui s'est tenu, le 11 septembre, à l'Elysée. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian et le ministre de l'Intérieur Manuel Valls sont les quatre mousquetaires du président. Quatre ministres, "chacun dans son rôle, chacun dans sa compétence", prend soin de préciser une source diplomatique.
Jean-Marc Ayrault. L'opinion a peut être retenu cette image. Celle du Premier ministre défendant avec conviction le principe d'une intervention militaire en Syrie, devant les députés, le 4 septembre. Ce jour-là, François Hollande a jugé la prestation de son Premier ministre "de qualité". Reste que depuis le début de la crise syrienne, "Matignon est peu présent ", juge un observateur. Les ministres de la Défense et des Affaires étrangères étant tous deux en première ligne, "la latitude de Jean-Marc Ayrault est assez faible", ajoute cette source.
Laurent Fabius. "Il en a fait son dossier prioritaire depuis 2012", confie une source diplomatique. Dans l'entourage du président Hollande, le ministre des Affaires étrangères a été l'un des premiers à prôner une ligne interventionniste sur le dossier syrien, privilégiant une alliance avec les Etats-Unis. Après le massacre chimique du 21 août, Laurent Fabius a mis en place la Task Force Syrie au Quai d'Orsay. Un homme veille sur cette cellule de crise chargée de suivre en temps réel la situation dans le pays : Eric Chevallier, ambassadeur pour la Syrie, pour lequel le ministre a "une très grande confiance", souligne un haut-fonctionnaire du Quai d'Orsay.
Jean-Yves Le Drian. Comme Laurent Fabius, le ministre de la Défense joue un rôle essentiel dans la gestion de la crise syrienne. Il pilote le renseignement militaire - ce qui a, par exemple, conduit, le 2 septembre, à déclassifier des documents secret défense afin de prouver l'utilisation d'armes chimiques par le régime de Bachar al-Assad. Sur demande du président Hollande, Jean-Yves Le Drian prépare aussi des options militaires. "C'est en ayant une réponse à apporter sur notre 'capacité de feu' qu'on donne de la crédibilité au discours diplomatique", prend soin de souligner l'entourage du ministre.
Manuel Valls. Le ministre de l'Intérieur, en charge des questions de sécurité nationale, évalue la menace terroriste sur le territoire français. Dans une interview au Figaro début septembre, Bachar al-Assad avait menacé Paris de "répercussions négatives sur les intérêts de la France". Toutefois, les experts estiment que le régime de Damas n'a plus les moyens logistiques de commettre des attentats sur le sol français.
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Ces trois hommes apportent à François Hollande leur connaissance de la Syrie. Paul Jean-Ortiz, le "sherpa" du président et Emmanuel Bonne travaillent au sein de la cellule diplomatique de l'Elysée. Eric Chevallier, ambassadeur pour la Syrie, est, lui, rattaché au Quai d'Orsay.
Paul Jean-Ortiz. "PJO" est le "sherpa" du président, l'homme qui accompagne François Hollande dans tous ses déplacements à l'étranger. Au 2 rue de l'Elysée, dans l'une des annexes du palais, Paul Jean-Ortiz, 56 ans, dirige onze personnes au sein de la cellule diplomatique de l'Elysée. Cet amoureux de la Chine, qui écrit parfois en mandarin pendant les réunions, est "en contact permanent" avec le chef de l'Etat. Ce "gros bosseur" dixit un membre de son équipe, prépare des synthèses au président Hollande et le conseille sur les initiatives à prendre à partir des télégrammes et des notes produites par les ambassades.
Emmanuel Bonne. Ce diplomate, âgé de 43 ans, est le conseiller chargé de l'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et des Nations unies au sein de la cellule diplomatique de l'Elysée. "Il apporte au président son expertise et sa connaissance du monde arabe", souligne l'un de ses collègues Romain Nadal, conseiller et porte-parole diplomatique de François Hollande. Emmanuel Bonne a été en poste à l'ambassade de France en Iran et en Arabie Saoudite.
Eric Chevallier. C'est l'homme des réseaux. Eric Chevallier, 53 ans, ancien ambassadeur de France en Syrie, connaît très bien le pays pour avoir vécu à Damas entre mai 2009 et mars 2012, date à laquelle l'ambassade a été fermée pour des raisons de sécurité. Depuis son retour en France, ce proche de Bernard Kouchner est rattaché au Quai-d'Orsay, où il amène sa connaissance de la crise syrienne et fournit les contacts qu'il a pu établir avec les opposants de Bachar al-Assad. Eric Chevallier, qui coordonne la Task Force Syrie, reste optimiste sur une sortie de crise. "Malgré la menace des djihadistes financés de l'extérieur, l'idée démocratique de mars 2011 est toujours présente et peut triompher du régime", assure t-il au Nouvel Observateur.
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Ces deux militaires de haut rang font partie de la galaxie Hollande. L'amiral Edouard Guillaud est le chef d'état-major des armées. Le général Benoît Puga est, lui, le chef d'état-major particulier du président de la République. Revue des troupes.
Edouard Guillaud. En poste depuis février 2010, l'amiral Edouard Guillaud, 60 ans, commande l’ensemble des forces de l’armée française. Sous la présidence Hollande, il a coordonné l'opération Serval au Mali, lancée le 11 janvier 2013. Il est en contact permanent avec le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Benoît Puga. Il aime se définir comme "le traducteur de la chose militaire pour le chef de l'Etat". Conseiller militaire personnel du président, Benoît Puga, 60 ans, fait la liaison entre François Hollande et le chef d'état-major des armées Edouard Guillaud. "Il convertit un objectif politique en opération militaire", résume un membre du cabinet de Jean-Yves Le Drian. Nommé en 2010 par Nicolas Sarkozy, Benoît Puga a été maintenu à son poste par François Hollande. Ce qui était loin d'être une évidence. Ce catholique tendance tradi, père de onze enfants, opposé au "mariage pour tous", partage a priori peu de choses avec la politique socialiste. Mais les deux hommes ont su instaurer un rapport de confiance en se disant les choses "en toute franchise", rapporte Libération.
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Elle n'a aucun rôle officiel dans la diplomatie hollandaise. Pour autant, comme son entourage l'avait confié au Lab, Valérie Trierweiler "souhaite mobiliser l'opinion autant qu'il est possible" sur la crise syrienne. Si elle s'est toujours refusée à donner son avis sur le bien-fondé d'une intervention militaire, la compagne de François Hollande a, plusieurs fois, fait part de son indignation. Notamment sur Twitter où la Première dame compte plus de 245.000 abonnés. "Pour une fois, juste pour une fois, dire non tous ensemble à ce massacre", écrit-elle, le 22 août, au lendemain du massacre chimique dans les faubourgs de Damas. Dans une interview à M6, le 2 septembre, la Première dame exprime encore son émotion. "Je suis sans doute comme toutes les mères, je trouve qu'on ne peut pas accepter l'inacceptable" (…) et vraiment si vous voulez savoir ça m'a empêchée de dormir ces images, j'y pense encore, je ne sais pas comment on peut supporter ça, comment on peut accepter ça".