L’INFO. Ne pas froisser les progressistes, sans se couper de la droite "traditionnelle". Telle est la difficile équation sur le bureau de Nicolas Sarkozy. En refusant de se prononcer clairement sur l’abrogation ou non de la loi autorisant le mariage pour tous en cas de retour au pouvoir en 2017, l’ancien président a relancé un débat qui clive sa famille politique depuis des mois. D’autant plus que, mardi, la Cour de cassation a validé l'adoption des enfants nés sous PMA par une conjointe homosexuelle.
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"Est-ce que c'est le problème essentiel ?" Lors de son intervention télévisée sur France 2, dimanche dernier, Nicolas Sarkozy a soigneusement évité de répondre à la question de Laurent Delahousse : "Vous me dites il faut répondre comme ça, là, oui ou non ?", a-t-il d’abord protesté. "On est à l'école ? Est-ce que c'est le problème essentiel ?", a ensuite éludé le candidat à la présidence de l'UMP, préférant dénoncer un exécutif qui a "humilié la famille".
Une pirouette qui n’a convaincu personne dans son camp. "C’est un sujet révélateur de l’importance qu’il y a à être clair sur son projet. Si on n’est pas clair sur ce sujet, alors on ne le sera pas sur d’autres. Et c’est éliminatoire", assène Hervé Mariton à Europe 1. Le leader de la fronde parlementaire face à Christiane Taubira est, lui, sans ambigüité : il est favorable à l’abrogation.
"Je veux qu'on abroge la loi Taubira". Le député UMP de la Drôme est loin d’être isolé dans son camp. Laurent Wauquiez, membre de la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy, est sur la même longueur d’ondes : "je veux qu'on abroge la loi Taubira. Je veux qu'on respecte la communauté homosexuelle, qu'on propose des outils juridiques qui permettent de protéger l'union de deux homosexuels, mais je suis attaché à la famille, je suis contre la PMA et la GPA", a réaffirmé mardi le député-maire du Puy-en-Velay sur Radio Classique et LCI. Un autre sarkozyste du premier cercle, Guillaume Peltier, complète : "une loi à laquelle nous sommes opposés, nous avons pour obligation de la réécrire en profondeur une fois aux responsabilités."
Problème pour Nicolas Sarkozy, ses plus proches lieutenants ne sont pas d’accord. Nathalie Kosciusko-Morizet, figure du "progressisme de droite" sur laquelle il compte s’appuyer dans sa reconquête du pouvoir, est ainsi farouchement opposée à toute réécriture ou abrogation de la loi : "revenir en arrière sur la loi, je ne le souhaite pas du tout". Les plus modérés de l’UMP sont aussi sur cette ligne.
Juppé et Fillon sont clairs. Autre problème pour Nicolas Sarkozy, ses adversaires, eux, sont sans équivoque sur le sujet. Outre Hervé Mariton, vent debout contre cette loi depuis des mois, Alain Juppé et François Fillon sont tous les deux sur la même ligne : un retour en arrière n’est pas envisageable. "L'option de l'abrogation et du retour pur et simple à la situation antérieure aboutirait à une nouvelle fracture de la société française qui n'est pas souhaitable", plaidait en mars dernier François Fillon. "Je crois qu'il s'agit d'un acquis qui a été intégré par la société française", a renchéri le maire de Bordeaux la semaine dernière. Un seul homme est donc incapable de se positionner sur ce sujet brûlant.
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Il est urgent d’attendre. Pourtant, l’ancien président ne devrait pas "prendre position pendant la campagne UMP", a assuré son porte-parole Gérald Darmanin. "Nicolas Sarkozy pense que c'est une question trop compliquée pour répondre par oui ou par non", a encore affirmé le député-maire de Tourcoing. Mais à trop vouloir ménager le chèvre et le choux, Nicolas Sarkozy pourrait perdre à la fois le soutien des pro et des anti mariage homo. Du perdant-perdant, en somme.