La "liberté", le "partage", "la transparence" et un immense "progrès pour la démocratie". Mardi, Nicolas Sarkozy avait choisi ses mots pour parler du numérique. Inaugurant le Googleplex, le siège parisien du géant Google, le président a caressé le monde du web dans le sens du poil, prenant soin de préciser qu’Internet "a amené pour le citoyen une transparence, face à laquelle, il ne sert à rien de résister".
Au passage, le chef de l’Etat a même concédé s’être "trompé" et avoir "crispé" les professionnels et utilisateurs du "web" en parlant il y a quelques mois de régulation. Il répondait alors, aux côtés du PDG de la firme, Eric Schmidt, à un jeu de questions-réponses avec de jeunes salariés Google.
Draguer le web, un poncif, en période électorale
Un petit exercice qui en rappelle un autre : la séance de questions-réponses en direct du siège de Facebook de Barack Obama, en avril dernier, quelques jours après avoir officialisé sa candidature à la présidentielle américaine.
Sans même aller chercher jusqu’aux Etats-Unis, on peut - pour montrer à quel point draguer le secteur digital est devenu un poncif à l’approche d’une élection - rappeler l’opération séduction lancée par Martine Aubry en juin dernier sur le numérique. Après un rendez-vous à la très branchée Cantine et une tribune sur le sujet publiée sur Rue89, elle avait présenté le volet Internet de son programme, en grande pompe, dans un autre spot parisien, le 104 dans le XIXe arrondissement (en savoir plus en cliquant ici).
Un enjeu de communication
En somme, courtiser le web est devenu le passage obligé d'une campagne électorale. "Il y a une prise de conscience que le numérique est un secteur stratégique", analyse sur Europe1.fr Arnaud Mercier, politologue et professeur en communication à l'université de Metz. "Ce sont les acteurs du numérique qui font les réseaux sur lesquels les gens s’expriment" durant la campagne. De plus, les pros du digital sont souvent les plus actifs quand il s’agit d’animer le débat sur le web. Sur Twitter, Facebook et autre Google +, ils disent haut et fort ce qu’ils pensent.
S’associer au numérique revient aussi, pour un politique, à montrer "qu’il est dans le coup". "Il faut ‘être résolument moderne’ disait Saint-Just. Il y a toujours eu en politique ce phénomène de course à la modernité où l’on voit les candidats tenter de s’associer à ce qui paraît être l’innovation, le symbole de l’air du temps", ajoute Arnaud Mercier.
Un enjeu d’image
En termes d’image, s’afficher avec les acteurs du numérique est également plus glamour, "plus valorisant que d’aller dans une usine en train de fermer. Le web symbolise aujourd’hui ce dynamisme économique, ce secteur fortement créateur d’emplois", explique encore le politologue. Le secteur digital peut alors apparaître comme une bouffée d’air frais dans l’anxiogène climat de la crise.
Enfin, pour Nicolas Sarkozy, il s’agit surtout de se réconcilier avec un secteur fâché, braqué, en début de quinquennat, avec la loi Hadopi. Pour les séduire, le chef de l’Etat a donc mis les petits plats dans les grands, cette semaine, multipliant les actions fortes. En entrée : la présentation, lundi, du très attendu data.gouv.fr, la plate forme rendant accessible les données l’état. En plat : la visite, mardi, chez Google. Et enfin, pour le dessert, le gotha de la conférence internationale Le Web’11 (qui rassemble la crème du secteur) est invité, mercredi, à l’Elysée. Ainsi, 300 personnes auront peut-être l’opportunité de discuter Internet avec Nicolas Sarkozy, avant son départ pour Bruxelles où se tiendra, jeudi et vendredi, un sommet européen sous haute tension.