Accompagnée d'une quinzaine de ministres, la Première ministre française Élisabeth Borne est arrivée dimanche à Alger pour une visite destinée à donner "une impulsion nouvelle" et concrète à la réconciliation amorcée en août par les présidents des deux pays. La cheffe du gouvernement a été accueillie par son homologue Aïmene Benabderrahmane à sa descente de l'avion. "Le temps de l'incompréhension est derrière nous", a-t-elle affirmé au site algérien TSA avant son voyage.
Élisabeth Borne entamera sa visite par des gestes mémoriels à l'instar du président Emmanuel Macron lors de sa visite fin août qui, après des mois de tensions, a permis de réchauffer les relations entre les deux pays. Elle déposera une gerbe au Monument des Martyrs, haut lieu de la mémoire algérienne de la guerre d'indépendance (1954-1962) face à la France, ainsi qu'au cimetière Saint-Eugène à Alger, où reposent nombre de Français nés en Algérie.
Un "partenariat renouvelé"
Prélude au voyage de Élisabeth Borne, Emmanuel Macron s'est entretenu dimanche matin au téléphone avec son homologue Abdelmadjid Tebboune, plaidant de nouveau pour la concrétisation du "partenariat renouvelé et ambitieux", selon l'Élysée. Rien pourtant n'est attendu, lors de cette visite de deux jours, sur la question sensible de la mémoire de la colonisation et de la guerre d'Algérie.
Les présidents français et algérien avaient annoncé en août l'installation prochaine d'une commission d'historiens des deux rives, mais elle est "encore en cours de constitution", selon Paris. La cheffe du gouvernement français rencontrera et déjeunera lundi avec le président Tebboune, qui avait conclu avec Emmanuel Macron le 27 août un "partenariat renouvelé" autour de six axes qui restent à concrétiser.
"Vers des projets concrets"
Élisabeth Borne présidera auparavant dimanche, avec son homologue algérien, la réunion du cinquième Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN), dont la dernière édition remonte à 2017, où il sera surtout question de "coopération économique". La tenue du CIHN en soi "est déjà une avancée" dans le dialogue politique, salue Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam) à Genève.
Le CIHN doit se conclure par la signature "d'accords", qui ne seront pas forcément des contrats d'entreprises et porteront sur la formation, la transition énergétique, la coopération économique, la jeunesse et l'éducation, ainsi que le régalien. Il s'agit pour Paris de donner une "impulsion nouvelle" à la relation franco-algérienne "vers des projets concrets". Toutefois sur l'autre question délicate des visas, "les discussions n'ont pas encore abouti", disait jeudi Matignon.
Les présidents des deux pays avaient fin août ouvert la voie à un assouplissement du régime de visas accordés à l'Algérie, en échange d'une coopération accrue d'Alger dans la lutte contre l'immigration illégale. Cette question empoisonne la relation bilatérale depuis que la France a divisé par deux le nombre de visas octroyés à l'Algérie, jugée pas assez prompte à réadmettre ses ressortissants expulsés de France.
Le gaz n'est pas à l'ordre du jour
Sur le gaz, la visite de Emmanuel Macron, accompagné par la présidente d'Engie Catherine MacGregor, avait généré beaucoup d'attentes sur des livraisons de gaz algérien vers la France, dans le contexte d'une raréfaction du gaz russe en Europe. Ce dossier "n'est pas à l'ordre du jour" de la visite, selon Matignon. Élisabeth Borne a dit à TSA souhaiter "néanmoins continuer à développer notre partenariat dans ce secteur avec l'Algérie, notamment en matière de GNL, et pour accroître l'efficience de ses capacités de production gazière".
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Élisabeth Borne n'a emmené avec elle qu'un seul grand groupe, Sanofi, qui a un projet d'usine à insuline, et quatre PME : Générale Energie, qui envisage la construction d'une usine de recyclage et transformation de noyaux d'olives; Infinite Orbits, qui a un projet de premier microsatellite algérien; Neo-Eco, qui travaille sur le traitement des déchets comme l'amiante, et Avril, spécialisée dans la transformation de céréales.
De son côté Business France, structure publique chargée des investissements internationaux, emmène plusieurs dizaines d'entreprises venues pour le Forum des affaires franco-algérien, qui sera inauguré lundi par les deux Premiers ministres. Autre axe de la visite, la jeunesse, que Élisabeth Borne rencontrera lundi au lycée français puis à l'ambassade, avec des représentants de la société civile algérienne. "S'il n'est question ni de mémoire, ni de sécurité, ni de nos approvisionnements, à quoi va servir un déplacement d'une telle ampleur ?", s'est demandé vendredi la députée de l'opposition de droite (LR, Les Républicains) Michèle Tabarot.