Elisabeth Borne a vanté mardi au Parlement de Strasbourg la "vitalité de la démocratie européenne", amorçant la campagne de la majorité, toujours à la recherche d'une tête de liste pour les élections de juin face à l'extrême droite, donnée favorite. La Première ministre a appelé à "puiser dans l'exemple" de Simone Veil, première présidente du Parlement européen, en inaugurant un bâtiment de l'institution à son nom.
"Gardons à l'esprit les combats de Simone Veil"
"À l'heure où certains accablent l'Europe par principe, par réflexe, gardons à l'esprit les combats de Simone Veil", qui a su "faire de blessures indicibles, le moteur de son engagement au service de la paix et de l'unité des Européens", a insisté Elisabeth Borne. La présidente du Parlement européen Roberta Metsola a aussi salué la militante à l'origine de la loi sur l'IVG, une femme qui "croyait à l'humanité et à la réconciliation". Elisabeth Borne va ensuite faire la tournée de sa famille européenne. Elle échangera notamment avec Stéphane Séjourné, président du groupe Renew (centristes), puis avec les eurodéputés français de ce groupe.
Missionnée par Emmanuel Macron pour faire valoir le bilan européen de la majorité, elle monte progressivement en puissance. À Bordeaux, le 6 octobre, elle a fait valoir "le seul bulletin de vote pro-européen", celui de sa majorité, face aux "pères déconstructeurs de l'Europe" de l'extrême droite. Elle a ensuite exhorté son parti Renaissance à se mobiliser "dès maintenant" avant de louer, en Irlande, les valeurs républicaines qui, à ses yeux, restent "un combat" en Europe alors que les mouvements populistes et d'extrême droite ont le vent en poupe.
"Défendre le bilan"
De quoi nourrir la rumeur qu'elle pourrait être elle-même tête de liste ? "Mais qui serait alors Première ministre ?" évacue-t-on à Matignon. L'hypothèse vient de "gens malveillants qui ne l'aiment pas" et veulent son départ de la rue de Varenne, assure un cadre de la majorité, alors qu'un remaniement pourrait avoir lieu en cas de condamnation fin novembre, par la Cour de justice de la République, du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.
Nathalie Loiseau, ancienne candidate du camp d'Emmanuel Macron aux Européennes de 2019, rappelle qu'elle avait été désignée en mars. Elle "ne croit pas du tout" à Elisabeth Borne tête de liste, car "elle souhaite rester Première ministre". Plusieurs noms circulent pour mener la liste de la majorité, dont celui de Stéphane Séjourné, qui dirige déjà Renaissance. "Stéphane a envie (...) mais il veut garantir au président une puissance politique" chez Renew, avance son entourage. En revanche, le nom d’Elisabeth Borne "n'a jamais émergé des rencontres avec Emmanuel Macron" à ce sujet, selon la même source.
"Humaniser l'Europe"
Les noms du commissaire européen Thierry Breton et de la secrétaire d'État chargée de l'Europe Laurence Boone, présents mardis, sont aussi cités. "Il faut quand même un profil assez politique, mais qui ne soit pas trop techno, et qui parle de ce que ça change, l'Europe, dans nos vies. Il faut vraiment arriver à humaniser l'Europe", plaide une ministre, qui préfèrerait qu'Elisabeth Borne reste à Matignon.
Outre la tête de liste, promise pour janvier, la stratégie de campagne n'est pas tout à fait arrêtée. "Soit on fait une campagne défensive" et "on fédère notre socle autour de Breton ou Séjourné", soit la campagne est "offensive" et "il faut une tête de liste qui accepte de porter le fer" contre Jordan Bardella, expose une source au sein de l'exécutif. Cette campagne sera surtout "la dernière" d'Emmanuel Macron, note un autre ministre.
En attendant, les discussions sont amorcées entre partenaires de la majorité, représentés par les ministres Franck Riester (Renaissance), Marc Fesneau (MoDem), et le député Pierre-Yves Bournazel (Horizons). Un premier contact a eu lieu entre Stéphane Séjourné et le patron du parti UDI (centristes) Hervé Marseille, désireux d'œuvrer à un "grand rassemblement". Selon un sondage OpinionWay paru lundi, la liste du RN sortirait gagnante aux Européennes, à neuf points devant celle de la majorité (28% contre 19%). Pour l'eurodéputée Manon Aubry, pressentie pour mener la liste de La France insoumise, "la macronie se cache, car elle sait qu'elle va subir un vote de sanction brutal".