Le président Emmanuel Macron s'est plus que jamais affiché en pro-Européen en présentant jeudi ses ambitions pour la présidence française du Conseil de l'UE, dont les priorité sont de rendre l'Europe plus "puissante dans le monde" mais aussi de mieux protéger ses frontières extérieures. Au cours d'une longue conférence de presse solennelle à l'Elysée, le chef de l'Etat a affirmé sa détermination à faire que cette présidence de six mois s'avère "utile" même si elle va percuter de plein fouet la campagne pour la présidentielle d'avril et les législatives de juin.
La souveraineté européenne en soutien à la souveraineté nationale
Selon lui, cette coïncidence ne pose pas de problème car "peut-être que la politique de la France changera" à l'issue du second tour le 24 avril, mais "à coup sûr la France restera la France". Alors que ses opposants l'accusent d'être déjà "en campagne", il a répété qu'il gouvernerait "jusqu'au dernier quart d'heure" de son mandat et qu'il allait donc continuer à faire des "choix" sur "les défis", "qu'ils soient sanitaires, migratoires". Debout derrière une table face à une centaine de journalistes dans la salle des fêtes, Emmanuel Macron a longuement défendu l'importance cruciale de renforcer la souveraineté européenne en soutien à la souveraineté nationale.
"S'il fallait résumer en une phrase l'objectif de cette présidence, je dirais que nous devons passer d'une Europe de coopération à l'intérieur de nos frontières à une Europe puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maître de son destin", a-t-il déclaré. "Face à toutes ces crises qui percutent l'Europe, nombreux sont ceux qui voudraient ne s'en remettre qu'à la seule nation. Ces nations sont notre force, notre fierté, mais l'unité européenne est leur complément indispensable", selon lui. "Nous devons agir en Européens, nous devons penser en Européens", a-t-il martelé.
Réformer Schengen pour que l'UE "protège ses frontières"
Depuis son élection en 2017, célébrée au son de l'hymne de l'UE, Emmanuel Macron se pose en chef de file des pro-Européens face aux "nationalistes" et "populistes", et vante les avancées obtenues à 27, comme le plan de relance post-Covid-19 de 750 milliards d'euros adopté en 2020. Pour la présidence française (la PFUE), Paris a choisi comme devise "Relance, puissance et appartenance" et comme emblème un U et un E bleu et rouge traversés par une flèche blanche, symbole de "l'ambition d'aller de l'avant", a expliqué le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Clément Beaune.
Pendant une introduction d'une heure, Emmanuel Macron a détaillé ses multiples chantiers pour cette treizième présidence tournante française et la première depuis 2008. Dont celui, jugé prioritaire, de réformer l'espace Schengen pour que l'UE "protège ses frontières" face aux crises migratoires qui se succèdent. Il a proposé de "repenser le cadre budgétaire" de l'Europe jusqu'ici défini par les critères de Maastricht, estimant que la question du "pour ou contre le 3%" de déficit était "dépassée".
Un "grand travail sur l'histoire de l'Europe" face au "révisionnisme"
Le chef de l'État a aussi annoncé la tenue d'un sommet entre l'Union africaine et l'UE les 17 et 18 février à Bruxelles afin de "refonder en profondeur" la relation "un peu fatiguée" entre les deux continents. Parmi les autres propositions, figurent "la mise en œuvre concrète et véritable" d'un "service civique européen" de six mois pour les moins de 25 ans, et le lancement "un grand travail sur l'histoire de l'Europe" face au "révisionnisme" qui "s'installe dans plusieurs pays".
Quelque 400 rendez-vous sont prévus, essentiellement sur les trois premiers mois en raison de la présidentielle en France. Ils débuteront par un discours suivi d'un débat au Parlement européen le 19 janvier et seront répartis aux quatre coins de la France. Un sommet européen informel se tiendra les 10 et 11 mars, soit un mois juste avant le premier tour de la présidentielle.
"En finir avec l'image d'arrogance qui colle à la France", lance Macron
Les marges de manœuvre françaises seront toutefois limitées car si la présidence tournante permet de donner un élan à certaines priorités, il reste ensuite à construire des consensus à 27, ce qui n'est jamais aisé. "Pour peser en Europe, la France doit en finir avec cette image d'arrogance qui lui colle à la peau depuis le début de la présidence Macron", a attaqué la candidate du parti Les Républicains à la présidentielle Valérie Pécresse. Le chef de l'Etat "a parfois le bon discours, mais il y a une pratique qui est à l'opposé", a déploré le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure.
Selon un sondage Odoxa pour Le Figaro, les Français sont deux fois plus nombreux (32% contre 15%) à considérer que présider l'UE sera un atout plutôt qu'un handicap pour Emmanuel Macron et 63% assurent que les propositions des candidats sur l'Europe compteront dans leur choix de vote. A l'extrême droite, Eric Zemmour demande à Emmanuel Macron "d'imposer le principe de non-admission des migrants dans l'Union européenne".
Emmanuel Macron, vrai-faux candidat à la présidentielle ?
En fin de conférence de presse, le président a été interrogé sur sa volonté ou non de se présenter à l'élection présidentielle de 2022. Emmanuel Macron a préféré botter en touche, en jouant la carte de l'humour. "Je ne répondrai évidemment pas à cette dernière question ce jour", a lancé le chef de l'État. "C'est normal que vous me la posiez. Si demain, je suis dans la nature, et que l'un d'entre vous est là, vous me la poserez", a-t-il ajouté face aux journalistes. "D'abord, je le prends comme un signe d'affection, un désir caché, presque un appel", a poursuivi le président.