Accusé depuis lundi de harcèlement sexuel par plusieurs élues d'Europe Écologie-Les Verts, il est désormais dans la tourmente. Denis Baupin, député de la 10e circonscription de Paris, a pourtant longtemps été reconnu pour des faits d'armes autrement plus glorieux. Adhérent aux Verts depuis 1989, l'ancien conseiller de Dominique Voynet, a été le monsieur "anti-bagnoles" de Bertrand Delanoë à la Mairie de Paris, avant de se tailler une solide réputation d'expert sur le nucléaire et la transition énergétique.
Conseiller de Dominique Voynet. Né à Cherbourg en 1962, Denis Baupin n'est pas, contrairement à beaucoup, venu chez les écologistes après un petit tour par l'extrême gauche. Son engagement est le fruit de l'opposition et du hasard. L'opposition, c'est celle à son expert-comptable de père, qui voit d'un mauvais œil l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand en 1981. Le hasard, c'est lorsqu'il pose ses yeux, à la fin des années 1980, sur le programme de l'écologiste Antoine Waechter. Séduit par les positions antimilitaristes et anti-société de consommation, il prend sa carte. L'ingénieur, formé à l'École Centrale de Paris, grimpe alors les échelons et rejoint Dominique Voynet, dont il sera le conseiller politique au Parlement européen, puis au ministère de l'Environnement à partir de 1997.
"Khmer vert". Mais ce sont surtout les Parisiens qui ont eu affaire à lui. Denis Baupin a incarné, entre 2001 et 2008, la politique des transports de la capitale. À l'époque, le maire, Bertrand Delanoë, veut limiter la voiture au profit des bus, tramways, métros, Noctiliens et Vélib'. Il trouve en Denis Baupin, qui n'a jamais possédé d'automobile et vomit ce mode de transport, l'artisan idéal de ce travail titanesque. Le fusible parfait, aussi. Ce "monsieur embouteillages" qui veut agrandir les couloirs de bus et réserver les voies sur berge aux piétons devient pour ses opposants un "khmer vert", quand il n'est pas un "monomaniaque blafard de la détestation des automobiles".
"Un gros bosseur". Pressenti pour le ministère des Transports en cas de victoire socialiste à la présidentielle de 2007, Denis Baupin est finalement resté à la mairie de Paris après les élections municipales de 2008. Chargé cette fois du développement durable et de l'environnement, le centralien s'empare de ses nouvelles prérogatives comme il a toujours su le faire : en travaillant avec acharnement. "C'est un gros bosseur, pas dilettante du tout, une rareté chez les Verts !" observait, un brin moqueur, le socialiste David Assouline dans Libération. Au sein de son propre camp, l'attitude de Denis Baupin ne fait pourtant pas l'unanimité. Sergio Coronado, qui l'a côtoyé lorsqu'il était adjoint au maire du 14e arrondissement de Paris, le jugeait en 2008 "sans charisme et sans générosité" dans Le Monde.
Parti d'EELV. Élu aux législatives en 2012, Denis Baupin devient vice-président de l'Assemblée nationale. Depuis, il fustige les errements des socialistes sur le nucléaire, que lui voudrait abandonner au plus vite, tout en prônant une collaboration d'Europe Ecologie-Les Verts avec l'exécutif. Se définissant comme un "pragmatique", il a ainsi soutenu le maintien des écologistes dans le gouvernement de Manuel Valls, puis le projet de loi sur la Transition énergétique, porté par Ségolène Royal, dont il a été rapporteur. Après 27 ans de cotisation, Denis Baupin a fini par rendre sa carte du parti, en avril dernier. Ses positions controversées en interne (il a voté pour la loi renseignement et s'est prononcé en faveur de la révision constitutionnelle), ainsi que la nomination au ministère du Logement d'Emmanuelle Cosse, sa femme depuis juin 2015, avaient fini par le mettre dans une position délicate.
"Cavaleur un peu pénible". Depuis lundi, les langues se délient. Alors qu'en 2006, une élue parisienne se contentait de glisser que Denis Baupin "ne résist[ait] pas à son envie de séduire", il apparaît désormais que ses gestes déplacés étaient connus de (presque) tous. Lui "conteste" pourtant "fondamentalement l'idée de harcèlement sexuel et plus encore d'agression sexuelle, lesquels lui sont totalement étrangers", selon un communiqué de son avocat. Ses amis ne le soutiennent plus et ses ennemis ne se privent pas. Ainsi de son vieux rival, Yves Contassot, conseiller de Paris, qui a souligné sur Europe 1 sa réputation de "cavaleur un peu pénible".