Emmanuel Macron poursuit son offensive pour tourner la page de la crise des retraites. À l'occasion du premier anniversaire de sa réélection lundi, il annonce son intention de se "réengager" tous azimuts dans le débat, et défend le principe d'une grande loi sur l'immigration. Dans un long échange avec onze lecteurs du Parisien réalisé vendredi à l'Elysée et mis en ligne dimanche soir par le quotidien, le chef de l'État répond sur tous les thèmes, du bilan de l'exécutif aux chantiers à venir, en passant par la possibilité de voir Marine Le Pen lui succéder en 2027. La représentante d'extrême droite arrivera au pouvoir "si on ne sait pas répondre aux défis du pays et si on installe une habitude du mensonge ou de déni du réel", met-il en garde.
Se "mouiller" davantage
Très en retrait depuis le début de l'année pendant qu'Elisabeth Borne et son gouvernement défendaient la retraite à 64 ans, le président reconnaît qu'il aurait dû se "mouiller" davantage sur la réforme phare de son second quinquennat. "Peut-être que l'erreur a été de ne pas être assez présent pour donner une constance et porter cette réforme moi-même", dit-il. Il affirme toutefois, sans s'étendre outre mesure, que sa Première ministre Elisabeth Borne a sa "confiance" car "elle fait bien son travail dans un moment difficile". Et il semble décidé à passer d'un extrême à l'autre en termes de présence médiatique.
"Je dois me réengager dans le débat public parce qu'il y a des choses qui ne sont pas claires. Donc, je le fais partout", lance Emmanuel Macron, qui s'est donné cent jours pour relancer un mandat dans l'impasse et a commencé à retourner se frotter aux Français et à leur mécontentement sur le terrain. Conspué lors d'un bain de foule en Alsace, suivi partout où il est annoncé par des manifestants et leurs concerts de casseroles, il rejette les procès de "mépris", y compris sur des "petites phrases" passées, et assure accepter la contestation. Sans convaincre les oppositions de gauche, qui ont ironisé dimanche en retour sur sa capacité à déminer la situation. "Jour 6 des 100 jours d'apaisement : ne jamais se remettre en question", a ainsi grincé le patron des députés PS Boris Vallaud.
"Construire une majorité politique"
Aux Français, il prédit encore des moments difficiles sur le front de l'inflation, sans annoncer de nouvelle mesure immédiate pour y faire face. "Je vais être honnête, les prix alimentaires, ça va être dur jusqu'à la fin de l'été", prévient le président. Selon lui, "la clé, c'est que le travail paye mieux", mais cela dépendra "des employeurs et du dialogue social". En attendant qu'Elisabeth Borne précise mercredi la feuille de route du gouvernement, toujours privé de majorité absolue à l'Assemblée nationale, Emmanuel Macron se montre prudent sur ses chantiers. Mais il annonce vouloir, sur l'immigration, "un seul texte" à la fois "efficace et juste", pour "durcir nos règles" afin "que ceux qui n'ont pas de raison d'être ici" puissent être plus rapidement "raccompagnés chez eux" tout en améliorant l'intégration. Exit, donc, l'hypothèse d'un projet saucissonné en plusieurs textes pour faciliter son adoption, comme il l'avait lui même évoquée il y a un mois.
Pour autant, il ne dit pas avec quelle majorité il compte le faire passer. "Je ne sais pas vous dire quel sera le chemin. Il faut construire une majorité politique", élude-t-il, tout en rappelant que "l'utilisation de l'article 49.3, c'est le ou la Première ministre qui le propose" avant tout. Or, Elisabeth Borne a dit ne plus vouloir recourir, hors budget, à cet outil constitutionnel dont l'usage pour les retraites a été vivement dénoncé.
Un projet de restauration écologique dans les écoles
Sur le front social, il remet sur le métier sans plus de précisions la réforme du RSA "pour que jamais une heure de travail ne puisse être moins intéressante" que ce dispositif, ainsi que "la solidarité à la source" pour que tous ceux qui ont droit aux aides les reçoivent. A un auto-entrepreneur se disant prêt à embaucher s'il était exonéré de charge sur le premier emploi créé, Emmanuel Macron répond "banco", sans détailler. "Je vous promets qu'on regarde et qu'on revient vers vous", ajoute-t-il.
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Emmanuel Macron affiche une certaine prudence sur la généralisation du service national universel (SNU). "Je ne vais pas vous dire que la rentrée prochaine le SNU sera obligatoire. C'est une question de montée en charge progressive. Quelques départements, puis un peu plus", dit-il. Alors qu'un lecteur lui reproche de ne pas assez parler d'écologie, le chef de l'Etat confirme vouloir "lancer un grand projet de restauration écologique de nos écoles". Sur la santé, il réaffirme vouloir "accélérer la délégation d'actes (prescription de certains médicaments ouverte aux pharmaciens, vérification de la vue par des opticiens, etc.)", mais déplore sans prendre de pincettes: "je me tape les corporatismes".